Affirmant vouloir défendre les droits des travailleurs, le NPD s'immisce dans un débat cher au Bloc québécois: forcer les entreprises de compétence fédérale implantées au Québec à respecter la loi 101. Le chef adjoint et seul député québécois du NPD, Thomas Mulcair, a déposé hier un projet de loi modifiant le Code canadien du travail pour y inclure le droit de travailler en français au Québec.

En juin dernier, le Bloc québécois avait mordu la poussière aux Communes avec un projet de loi similaire, déposé en février. Conservateurs et libéraux avaient alors reproché aux amendements proposés de brimer les droits de la minorité anglophone du Québec et des francophones du reste du Canada. Les médias anglophones aussi avaient protesté.C'était la deuxième tentative du Bloc québécois de faire imposer le français aux banques, aéroports, compagnies de télécommunications, bureaux de Postes Canada et autres entreprises de compétence fédérale qui font affaire au Québec. Le Bloc évalue qu'il y a entre 200 000 et 250 000 travailleurs qui ne sont pas couverts par la Charte de la langue française.

Mais contrairement aux projets de loi bloquistes, le texte déposé par le NPD ne propose pas de modifier la Loi sur les langues officielles.

«On est en train de créer un nouveau droit au Québec. On n'enlève rien aux francophones hors Québec, a souligné M. Mulcair. Pour ce qui est des anglophones du Québec, j'en suis. Demandez-leur de trouver dans cette liste quelque chose qui vient brimer leurs droits. Je ne vois rien.»

Le projet de loi néo-démocrate précise d'ailleurs que les exigences prévues (offres d'emploi, conventions collectives, communications rédigées en français, droit d'exercer ses activités en français), «n'ont pas pour effet d'exclure une langue autre que le français; l'usage de cette autre langue ne doit cependant pas l'emporter sur l'usage du français».

«C'est tellement net, clair et précis que j'ai l'impression que le gouvernement conservateur va avoir du mal à trouver un prétexte pour ne pas l'appuyer», a jugé M. Mulcair. Il estime que ce serait une façon, pour le gouvernement conservateur, de faire un «geste concret pour la reconnaissance de la nation québécoise».

L'appui éventuel du gouvernement conservateur est toutefois loin d'être acquis. «La loi fédérale sur les langues officielles s'assure déjà de protéger la langue française au Québec», s'est contenté de répondre Deirdra McCracken, porte-parole du ministre responsable des langues officielles, James Moore.

Même son de cloche chez les bloquistes, qui estiment que le projet de loi néo-démocrate pourrait ne pas aller assez loin. «Si ça se limite à avoir le droit (de travailler en français), ça existe déjà en vertu des deux langues officielles. Ce n'est pas ça que l'on demande. C'est que la langue de travail soit reconnue comme étant le français, a dit le chef du Bloc, Gilles Duceppe. On va étudier attentivement le projet. Si ça va dans la bonne direction, on n'a pas de problème à l'appuyer.»

Du côté des libéraux, on doute qu'une telle modification au Code du travail puisse se faire sans heurter les droits des anglophones. «Si ça peut faire avancer le fait français au Québec sans porter atteinte aux droits des minorités soit anglophones au Québec ou francophones ailleurs, on va l'appuyer, a dit le critique libéral Pablo Rodriguez. Mais ce n'est pas garanti. On doit voir ce qu'il y a là-dedans.»