Le Canadienne emprisonnée au Kenya parce qu'elle ne ressemblait pas à sa photo de passeport a effectué une apparition empreinte d'émotion devant des députés fédéraux, mercredi, et a réclamé des excuses de la part du ministre des Affaires étrangères, et un dédommagement financier de la part du gouvernement fédéral.

Lors de son témoignage devant le comité des Affaires étrangères, réuni d'urgence à Ottawa, Suaad Hagi Mohamud a rappelé que les autorités canadiennes avaient le devoir de protéger leurs citoyens. Dans son cas, non seulement les autorités ne l'ont pas fait, mais elles ont même contribué à son calvaire en l'accusant d'être une imposteure, a-t-elle soutenu.

«En tant que politiciens, vous avez le devoir de vous assurer que les Canadiens sont en sécurité (...). Mais vos fonctionnaires se sont emparés de mes droits et de mes libertés», a-t-elle lancé d'emblée.

La femme de 31 ans, à l'ossature frêle, a dû interrompre plusieurs fois son témoignage devant les députés, la voix brisée par l'émotion, devant essuyer ses larmes.

Elle a raconté comment elle s'est retrouvée en prison au Kenya après avoir été accusée d'être une imposteure, car des employés d'une compagnie aérienne, comparant son visage à sa photo de passeport, trouvaient que ses lèvres ne se ressemblaient pas.

Les nombreuses cartes d'identité qu'elle a alors présentées n'ont pas suffi à les convaincre.

«J'ai été emprisonnée avec des meurtriers (...). J'avais tellement peur, je ne pouvais pas dormir. Il y avait trop de monde là-dedans et nous dormions sur le plancher», a expliqué la jeune femme.

Même le ministre canadien des Affaires étrangères, Lawrence Cannon, a indiqué le 29 juillet dernier qu'il n'y avait pas de «preuve tangible» de son identité.

«Il a fait croire au pays que j'étais une imposteure», s'est-elle désolée.

Mme Mohamud est finalement rentrée au pays le 15 août, grâce à un échantillon de son ADN qu'il a été possible de comparer à celui de son fils, âgé de 12 ans, vivant à Toronto. Elle croit avoir été présumée coupable et demande désormais un dédommagement à la hauteur de 2,5 millions de dollars de la part du gouvernement fédéral.

«Je n'aurais jamais cru que j'irais en prison pour dire que j'étais une citoyenne canadienne», a-t-elle noté, avant de rappeler aux politiciens devant elle qu'il était de leur devoir de protéger leurs citoyens, «où qu'ils se trouvent».

À ses côtés, l'encourageant à poursuivre dans les passages difficiles de son témoignage, son avocat Julian Falconer est cependant sorti de ses gonds lorsqu'un député conservateur a semblé insinuer que sa cliente pourrait avoir quelque chose à se reprocher.

«Elle n'a rien à cacher», a-t-il répété. Plus tard, à la sortie du comité, Me Falconer a indiqué qu'on ne savait pas si les origines et la couleur de sa peau de Mme Mohamud avaient eu une influence sur l'attitude des fonctionnaires canadiens à son égard.

Le Secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères, Deepak Obhrai, a malgré tout soutenu que le gouvernement conservateur s'engageait à ce qu'il n'y ait pas de «citoyens de seconde classe».