L'opposition libérale accuse le gouvernement conservateur d'avoir manqué de transparence dans l'attribution à l'entreprise Royal LePage d'un contrat visant les déménagements des employés fédéraux.

Comme La Presse l'avait annoncé la semaine dernière, le ministère des Travaux publics a annoncé en catimini, hier, sur son site, qu'un «nouveau contrat» avait été attribué à Brookfield Global Relocation Services, nouveau nom des Services de relogement Royal LePage, pour une durée de cinq ans, dans le cadre du Programme de réinstallation intégré.Autour de 20 000 employés fédéraux, dont 15 000 membres des Forces canadiennes, sont déplacés chaque année d'une ville à l'autre. Royal LePage détient le contrat depuis une décennie. Or, l'entreprise a été le seul soumissionnaire, dans un processus d'appel d'offres critiqué par l'industrie.

Depuis 2002, le dossier est entaché de controverses, d'enquêtes et de poursuites. Une enquête a d'abord révélé que des fonctionnaires s'étaient placés en conflit d'intérêts en acceptant des cadeaux de Royal LePage. Puis, en 2006, la vérificatrice générale, Sheila Fraser, a conclu que le processus d'appel d'offres de 2004 contenait aussi des irrégularités.

«Les conservateurs ont promis de changer le processus, mais ils n'ont rien fait, a dit hier la critique libérale en matière de Travaux publics, Martha Hall Findlay. Ils savaient qu'il y avait des problèmes. Ils ont eu des avis depuis des mois. Ça soulève bien des questions.»

Dans une lettre envoyée à Christian Paradis, le ministre des Travaux publics, la députée libérale somme le gouvernement de démontrer que le processus a été transparent et équitable, «sans quoi la procédure en question devrait être reprise».

«On a posé des questions en comité. On a essayé. On n'a eu aucune réponse, a-t-elle ajouté. C'est difficile de dire si le processus a été équitable ou non, mais ce que je peux dire, c'est que ce n'est pas transparent.»

La députée néo-démocrate Carol Hughes s'inquiète aussi du fait que le contrat, évalué à 150 millions de dollars, ait été attribué sans qu'il y ait concurrence. «Il va falloir voir si le processus fonctionne ou pas. La vérificatrice générale a déjà dit que c'était problématique. Ce serait peut-être le moment de voir si on ne devrait pas scinder le contrat», a souligné Mme Hughes.

Dès l'appel d'offres, en avril, l'industrie s'était insurgée contre les courts délais accordés pour soumissionner, mais aussi pour se préparer à remplir un contrat de cette ampleur.

«Le processus était tel que seul Royal LePage pouvait obtenir le contrat», a estimé hier Vickie Campbell, présidente de l'entreprise TransferEASE Relocation, qui avait soumissionné le même contrat en 2004. Mme Campbell s'était rendue à Ottawa l'automne dernier pour présenter aux responsables des recommandations afin d'avoir un «processus ouvert», qui permettrait à d'autres entreprises de soumissionner.

«Quand l'appel d'offres a été publié, aucun changement n'avait été fait à la suite de mes recommandations ou de celles d'autres entreprises», a souligné Mme Campbell. Elle réclame maintenant que la vérificatrice générale se penche de nouveau sur l'attribution de ce lucratif contrat.

Le ministre Paradis n'était «pas disponible» pour répondre aux questions de La Presse, hier, a-t-on indiqué à son bureau.