Changement de ton au Bloc québécois: le parti prend maintenant pour cible le chef libéral Michael Ignatieff, allant jusqu'à utiliser une technique s'apparentant aux récentes publicités négatives du Parti conservateur.

Sommant M. Ignatieff de voter en faveur, aujourd'hui, d'un projet de loi visant à contraindre les sociétés sous juridiction fédérale au Québec à appliquer la loi 101, les bloquistes ont cherché, hier, à dépeindre le chef libéral comme un fédéraliste peu enclin à faire respecter la Charte de la langue française.

«Voilà quelqu'un qui dit reconnaître la nation québécoise, mais qui ne reconnaît pas la langue de la nation québécoise, qui est le français», a critiqué le chef du Bloc québécois, Gilles Duceppe, en parlant de M. Ignatieff.

«C'est la même position que MM. Dion, Martin, Chrétien, et Trudeau. Il n'y a pas de changement», a-t-il ajouté, remettant en question la «position d'ouverture» du nouveau chef libéral face à la nation québécoise.

En matinée, le leader parlementaire du Bloc, Pierre Paquette, a présenté des affiches relevant d'anciennes déclarations controversées de M. Ignatieff - l'adversaire principal des bloquistes au Québec selon les plus récents sondages.

Sur l'une d'entre elles, datant de 1995, le chef libéral compare le Québec à «un cas classique d'État ethnique en formation». Le style rappelle grandement une campagne publicitaire négative lancée le mois dernier par le Parti conservateur: des déclarations passées, des propos parfois tirés des livres écrits par Michael Ignatieff, sur fond de photos et de questionnements sur les intentions réelles du chef libéral.

Mais le Bloc se défend bien de se lancer dans «une campagne de salissage». «C'est important pour les Québécois de savoir c'est quoi le contenu de Michael Ignatieff et du Parti libéral du Canada, a souligné M. Paquette. Le Parti libéral a été obligé de reconnaître la nation québécoise lors de la motion que le Bloc québécois a déposée en 2006. Mais dans la réalité, ils ne veulent surtout pas que ça se concrétise.»

En conférence de presse, M. Paquette a sommé le chef libéral de voter, aujourd'hui, en faveur du projet de loi C-307, qui vise à assujettir à la loi 101 les entreprises et sociétés sur le territoire québécois qui relèvent du Code canadien du travail, comme les aéroports, les banques et Postes Canada, notamment. Celles-ci ne sont pas tenues actuellement d'offrir un environnement de travail en français à plus de 200 000 travailleurs québécois.

«Il nous dit qu'il veut faire les choses différemment, a dit le leader bloquiste. On lui donne une occasion de montrer que son parti est différent de ce qu'on a connu pendant les 40 dernières années.»

Le principal intéressé a rapidement rejeté d'un revers de main la requête du Bloc québécois, jugeant que les lois fédérales devaient plutôt selon lui «insister sur le bilinguisme comme un trait de notre caractère national».

«Je crois que ce projet de loi du Bloc ne respecte pas la dualité linguistique, pas seulement au Canada, mais aussi au Québec», a justifié M. Ignatieff, ajoutant qu'il ne votera tout simplement pas sur la question, puisqu'il s'agit d'un projet de loi privé.