Le gouvernement de Stephen Harper a dépêché plusieurs ministres lundi pour lancer une nouvelle offensive médiatique concernant la lutte contre la criminalité au pays.

De Vancouver à Terre-Neuve-et-Labrador, plusieurs ministres ont tenu des conférences de presse pour annoncer l'intention des conservateurs de rendre automatique l'inscription de toute personne reconnue coupable de crime à caractère sexuel au registre des délinquants sexuels, et cela, sans égard pour la gravité de ses gestes.

Selon le ministre de la Sécurité publique, Peter Van Loan, trop peu de délinquants se retrouvent actuellement dans ce registre, puisque près de 42 pour cent des individus coupables de tels crimes n'y sont pas inscrits.

Pour que le nom d'un délinquant sexuel figure au registre, le procureur de la Couronne doit actuellement en faire la demande au juge, qui détermine alors la pertinence de cette inscription.

«Cela a rendu le registre, on pourrait dire, à moitié inutile, puisque la moitié d'entre eux échappait à l'inscription.

Voilà pourquoi nous pensons que l'inclusion automatique est importante», a indiqué le ministre Van Loan en point de presse à Ottawa.

A son avis, les policiers étaient jusqu'à présent peu enclins à se servir du registre à leur disposition parce qu'ils ne croyaient pas qu'il était significatif.

Si le projet de loi conservateur est adopté, cela fera également en sorte de rendre automatique le prélèvement d'échantillons d'ADN des personnes coupables d'infraction sexuelle.

M. Van Loan souhaite d'autre part permettre aux policiers d'utiliser le registre pour prévenir les agressions et pas seulement pour enquêter sur celles-ci.

«Si les policiers constatent qu'un individu agit de façon louche, près d'une cour d'école par exemple, ils seront capables de rechercher de l'information avec la base de données. Ils pourront apprendre si cette personne est inscrite au registre des délinquants sexuels», a-t-il souligné.

Enfin, M. Van Loan veut contraindre les personnes ayant commis des crimes à caractère sexuel à l'étranger ou sous d'autres juridictions à s'inscrire au registre lorsqu'elles mettent les pieds au Canada.

«Le Canada ne sera plus une zone protégée à partir de laquelle les délinquants sexuels en voyage pourront opérer sans problème», a-t-il assuré.

La lutte contre le crime constitue traditionnellement un sujet qui plaît à l'électorat. Il n'est donc pas étonnant que les partis d'opposition se soient tous prononcés en faveur du projet de loi, en émettant toutefois certaines réserves.

Le chef de Bloc québécois, Gilles Duceppe, a dit vouloir s'assurer que le registre demeure accessible exclusivement aux forces de l'ordre et ne puisse tomber entre les mains du public, comme c'est le cas dans certains Etats américains.

«Ca doit être fait de façon très judicieuse, pour ne pas tomber dans la chasse aux sorcières», a-t-il souligné, ajoutant que les conservateurs se prenaient «pour des shérifs plus souvent qu'à leur tour».

Certaines craintes ont également été soulevées quant à la nature des crimes qui seraient inclus dans l'inscription automatique.

Si le Sénat donnait son accord à un projet de loi adopté par les Communes de faire passer l'âge légal du consentement sexuel de 14 ans à 16 ans, une personne qui aurait par exemple des relations sexuelles avec quelqu'un de moins de 16 ans et de cinq ans son cadet serait ajouté au registre, selon M. Van Loan.

Le néo-démocrate Joe Comartin a indiqué que si cela était bien le cas, il s'opposerait à cette dimension du projet de loi.

«J'aurais de sérieux problème avec ça», a-t-il expliqué.

Le député libéral Dominic LeBlanc a déploré pour sa part que le gouvernement conservateur était enclin à retirer aux juges du pouvoir en général, mais a malgré tout salué l'initiative du ministre.

Dans les milieux policiers, l'annonce des conservateurs a été également bien accueillie. L'Association des policiers provinciaux du Québec a réagit favorablement, notant que ces changements permettront «de répertorier davantage d'infractions possibles par ces délinquants».