Les libéraux rêvent de reprendre le pouvoir le plus rapidement possible. Mais ils croient qu'il est encore trop tôt pour provoquer la chute du gouvernement conservateur aux Communes. Et même si le Parti libéral a vu ses appuis augmenter dans les sondages au cours des dernières semaines, il est peu probable que les bonzes du parti donnent suite à la suggestion de leur ancien chef, Jean Chrétien, qui a affirmé jeudi soir que les libéraux devraient essayer de déclencher des élections «le plus tôt possible».

En entrevue à la radio de CBC vendredi matin, l'actuel chef libéral, Michael Ignatieff, a affirmé que les Canadiens ne souhaitent pas d'élections hâtives. «Je veux continuer à faire fonctionner le Parlement», a affirmé Michael Ignatieff, que les militants libéraux, réunis en congrès national, confirmeront officiellement dans ses fonctions de chef aujourd'hui.

«Nous ne sommes pas encore prêts», a confié vendredi une source libérale sous le couvert de l'anonymat, soulignant que le parti doit rebâtir son organisation dans plusieurs régions du Québec. «Même si nous étions prêts, il faut l'appui du Bloc québécois et du NPD pour renverser le gouvernement conservateur. Dans l'état actuel des choses, je ne crois pas que ces deux partis seraient prêts à collaborer avec nous pour le faire», a affirmé cette source.

Le député libéral de Papineau, Justin Trudeau, a soutenu que le renouvellement du parti était loin d'être terminé. «Le renouvellement du Parti libéral va prendre trois ou quatre ans encore», a-t-il affirmé dans une entrevue accordée à l'animateur de radio Dave Rutherford, à Calgary.

Un député de la région de Toronto, Maurizio Bevilacqua, a fait écho à ces propos. Selon lui, les Canadiens ne sont pas nécessairement heureux de la façon dont le gouvernement dirige le pays, mais ils ne cognent pas à sa porte pour réclamer des élections, en ces temps de crise économique. «En temps et lieu, les Canadiens vont nous le faire savoir quand ils estimeront que des élections doivent avoir lieu. Et comme nous l'avons toujours fait dans le passé, nous allons respecter leur souhait», a dit M. Bevilacqua.

De proches collaborateurs de M. Ignatieff évaluent à 75% les chances que des élections fédérales aient lieu à l'automne. Ils croient toutefois que les libéraux doivent faire preuve de patience afin de permettre à leur chef de rebâtir le parti et de renflouer ses coffres. Le scénario le plus probable est donc un scrutin au printemps 2010, au moment du vote sur le prochain budget.

De passage vendredi à Edgeley, en Saskatchewan, le premier ministre Stephen Harper a mis en garde les libéraux contre la tentation de provoquer des élections anticipées. Il a affirmé que les Canadiens souhaitent que les élus travaillent de concert pour surmonter la crise économique.

«Nous venons d'avoir des élections. Ce que nous recherchons de la part de M. Ignatieff et des autres partis politiques, c'est évidemment une occasion de travailler ensemble pour faire avancer les intérêts du pays», a affirmé M. Harper.

Les libéraux ont profité de leur congrès vendredi soir pour rendre hommage à leur ancien chef Stéphane Dion. L'ancien premier ministre Paul Martin a présenté M. Dion aux militants. Jean Chrétien a également pris la parole. Invisible aux Communes depuis qu'il a quitté la barre du parti en décembre, M. Dion traîne toujours une dette de 150 000$ à la suite de la dernière course à la direction de 2006. Les libéraux ont décidé de lui donner un coup de main pour éliminer ce boulet financier en organisant des collectes de fonds.

Également, les libéraux ont organisé une série de conférences portant sur le Canada dans le monde, la crise économique et la justice sociale, entre autres. Aujourd'hui, les quelque 2000 militants libéraux devraient donner leur aval à une réforme du mode de sélection du prochain chef, qui serait élu par suffrage universel, mais pondéré pour accorder le même poids à chaque circonscription. Cette réforme avait été rejetée au congrès de décembre 2006 à Montréal.

Michael Ignatieff prononcera un discours cet après-midi pour conclure le congrès de trois jours.