Dans les prochaines années, l'eau deviendra un enjeu majeur pour le Canada et le gouvernement ne s'en préoccupe pas assez, selon les partis de l'opposition à Ottawa.

Libéraux, néo-démocrates et bloquistes ont réagi à la publication, hier, d'un rapport de l'ONU sur la situation mondiale de l'eau, qui montre du doigt le Canada pour l'utilisation massive de cette ressource dans la production du pétrole albertain.

 

«C'est clair qu'il y a un problème d'eau et d'assainissement dans les sables bitumineux, a déploré le critique libéral en environnement et énergie, David McGuinty. La façon dont on gère cette exploitation ne fonctionne pas. Il faut repenser comment on va procéder. Il faut repenser la connexion entre l'intégrité écologique de la région, la durabilité, la santé des gens qui y vivent et y travaillent, et l'exploitation.»

Alors que l'ONU voit poindre à l'horizon une crise mondiale de l'eau, M. McGuinty estime que le Canada ressentira rapidement une pression majeure des pays en développement et même des États-Unis, compte tenu des immenses réserves d'eau sur le territoire canadien. Or, le gouvernement n'a toujours pas adopté de politique nationale sur l'eau, déplore-t-il.

«Au Canada, nous n'avons pas de stratégie, a dit le député libéral. Nous ne savons même pas ce qu'on a comme source d'eau. Nous n'avons pas investi ce que nous aurions dû investir dans la science et les connaissances de la géologie hydraulique. Où est la stratégie nationale de l'eau, promise deux fois, dans deux discours du Trône et un budget? Depuis trois ans et demi, il n'y a rien.»

«Ça va être une source de soucis, de craintes. Et ça s'en vient très vite», a ajouté M. McGuinty.

Le chef du Bloc québécois, Gilles Duceppe, a pour sa part jugé «inacceptable» qu'Ottawa continue de «financer à hauteur de milliards» l'industrie des sables bitumineux, sachant les dommages qu'elle cause.

«On devrait être très inquiets de la situation», a-t-il dit, réagissant au rapport onusien sur la mise en valeur des ressources en eau.

En Chambre, le député bloquiste porte-parole en environnement, Bernard Bigras, a reproché au ministre de l'Environnement, Jim Prentice, de se comporter en «lobbyiste des pétrolières».

«Le ministre de l'Environnement se rend-il compte qu'en subventionnant l'industrie pétrolière comme il le fait, il contribue directement au désastre écologique que dénonce le rapport?» a demandé M. Bigras.

M. Prentice a rétorqué que le «dialogue sur l'énergie propre», annoncé en grande pompe lors de la visite du président américain Barack Obama à Ottawa, allait montrer la voie à suivre, notamment sur les questions de la gestion responsable des ressources énergétiques, de la recherche sur l'énergie propre et de l'utilisation efficiente de l'eau.

«Le Canada est et sera responsable dans l'exploitation de toutes les sources d'énergie», a dit le ministre.

Le NPD a pour sa part réclamé un moratoire sur le développement des sables bitumineux. «Ce dont on a besoin, c'est tout d'abord d'arrêter les nouveaux projets, a souligné le chef néo-démocrate, Jack Layton. On doit s'assurer que les règles que le gouvernement fédéral peut renforcer soient renforcées comme il le faut.»

Le rapport de l'ONU indique que la production du pétrole «non conventionnel», comme celui de l'Alberta, requiert 10 fois plus d'eau que le pétrole classique.

Le député libéral David McGuinty craint que l'amélioration technologique nécessaire pour réduire la quantité d'eau nécessaire à la production ne soit moins rapide que la croissance des investissements dans le développement des sables bitumineux.