Le sacro-saint secret entourant traditionnellement le dépôt d'un budget fédéral a été sérieusement mis à mal par le gouvernement Harper.

Les conservateurs ne cessent en effet depuis quelques jours, au grand dam de l'opposition, de vendre la mèche, annonçant à tout venant et avec précision les grands thèmes de l'exercice budgétaire 2009-2010 qui sera déposé cet après-midi aux Communes par le ministre des Finances, Jim Flaherty.

 

Encore hier, le ministre des Transports, de l'Infrastructure et des Collectivités, John Baird, a convoqué la presse pour annoncer des mesures de relance économique totalisant 7 milliards de dollars, soit un nouveau fonds de 4 milliards pour stimuler les infrastructures urbaines, un autre de 2 milliards pour les infrastructures des collèges et des universités et un dernier milliard de dollars pour les infrastructures énergétiques renouvelables ou vertes.

«Ce gouvernement méprise complètement les parlementaires en dévoilant des parties de son budget avant même son dépôt», a reproché hier le chef du Bloc québécois, Gilles Duceppe.

Peu de surprises

En fait, les nouvelles dépenses annoncées totalisent à ce jour environ 17,5 milliards, soit quasiment la totalité des mesures de relance de l'économie qui seront contenues dans le budget d'aujourd'hui pour l'exercice financier 2009-2010.

Si l'on tient compte du déficit prévu et dévoilé par Jim Flaherty la semaine dernière, soit 34 milliards en 2009-2010, et si l'on soustrait de cette somme le manque à gagner de 10 à 15 milliards imputables à une baisse des revenus de l'État en raison de la crise économique, Ottawa s'est donc autorisé, toujours en 2009-2010, de nouvelles dépenses de l'ordre de 19 à 24 milliards.

De cette somme, 17,5 milliards sont déjà placés, comme l'a fait savoir le gouvernement ces derniers jours. Cela signifie qu'aujourd'hui, le ministre Flaherty s'est gardé de 1,5 milliard à 6,5 milliards de surprises, dont certainement les baisses d'impôts «permanentes» promises aux familles et aux entreprises par le premier ministre Stephen Harper.

Toute cette stratégie d'annonces bien orchestrées de certains plats du menu budgétaire a visé tout simplement à préparer le grand public au traumatisme du déficit de 64 milliards sur deux ans et à tenter de contourner certaines réactions éventuellement négatives de l'opposition.

Le ministre John Baird a pour sa part expliqué la stratégie gouvernementale de la manière suivante hier: «Nous avons l'importante responsabilité de communiquer notre plan aux Canadiens. Il y a beaucoup d'autres mesures dans le budget. Nous avons eu la préparation budgétaire la plus ouverte depuis de nombreuses années dans ce pays et je suis heureux que nous puissions le présenter aux Canadiens et de façon officielle au Parlement.»

Ce que l'on sait déjà de l'exercice d'aujourd'hui, outre les 7 milliards dévoilés hier pour les infrastructures, c'est que le gouvernement conservateur versera 2 milliards supplémentaires dans la caisse de l'assurance emploi, dont 1,5 milliard pour des programmes de formation destinés aux travailleurs âgés qui ont perdu leur emploi, ainsi que 500 millions pour la formation ciblée des apprentis.

Aide à la culture

Le ministre du Patrimoine, James Moore, a pour sa part annoncé en fin de semaine de nouveaux investissements de 160 millions pour la culture. Le gouvernement a aussi annoncé quelque 250 millions pour la création d'une agence de développement économique consacrée entièrement au Sud ontarien, une région durement frappée par la crise.

Ottawa va également verser 4 milliards pour venir en aide aux constructeurs automobiles américains installés en Ontario.

Du côté du logement social, les sommes déjà annoncées totalisent quelque 2,75 milliards. En dépit de l'importance de ces investissements, beaucoup reprochent déjà au gouvernement Harper de se cantonner uniquement dans la rénovation des logements sociaux plutôt que de répondre à l'importante demande de construction de nouveaux logements sociaux pour les familles à faibles revenus.

Le gouvernement Harper a également annoncé un fonds d'aide d'un milliard de dollars pour secourir les communautés touchées par les pertes d'emplois dans les secteurs manufacturiers et forestiers. Les agriculteurs recevront pour leur part 500 millions pour les aider à réduire leurs coûts de production et 50 millions pour agrandir la capacité de production des abattoirs.