Le chef du Bloc québécois, Gilles Duceppe, entend profiter de la crise économique pour faire avancer l'ordre du jour souverainiste de sa formation.

Dans une entrevue-bilan de fin d'année avec La Presse, M. Duceppe a insisté sur la force de son mouvement au Québec. Le Bloc, le Parti québécois et Québec solidaire, trois formations souverainistes, détiennent 101 des 200 sièges de la province à la Chambre des communes et à l'Assemblée nationale, a-t-il fait valoir.

«Les Québécois ont fait confiance en majorité à des députés souverainistes», a noté M. Duceppe, en revenant sur les performances du PQ et du Bloc aux élections générales de 2008, et qui ont fait mentir bien des experts.

«On a maintenant à entreprendre cette nouvelle étape dans cette période de crise et à démontrer que la meilleure solution pour les Québécois, c'est de faire du Québec un pays»,

a-t-il ajouté.

Maître de ses choix

Le chef du Bloc affirme qu'en matière de culture, de justice, mais surtout d'environnement, le Québec serait mieux servi s'il était entièrement maître de ses choix. «S'il y avait des cibles absolues et s'il y avait une Bourse du carbone, c'est de l'argent qui entrerait» au Québec, a-t-il donné pour exemple.

«Or, il arrive que l'économie d'une bonne part du Canada est basée sur le pétrole. Ça enrichit le Canada, a-t-il ajouté. Il faut montrer que l'on a des intérêts fondamentalement différents.»

Gilles Duceppe l'a dit et il le répète : la coalition créée en fin d'année par le Parti libéral et le NPD, et appuyée par son parti, amenait à son avis des avancées importantes pour le Québec.

«Je soulignerais simplement le fait que voilà deux partis fédéralistes qui reconnaissent dans le préambule même de ce texte les Canadiens et les Québécois. Donc, il y a une différence, hein? Ça, c'est tout à fait neuf.»

Et il ne souscrit pas, du moins officiellement, à la thèse de ceux qui affirment que la coalition est moribonde. «Les libéraux se disent, et je le comprends : on va attendre de voir ce qu'il y a dans le budget», a-t-il dit.

Quant à son propre parti, il y a peu de chances qu'il vote pour le prochain budget conservateur - même s'il accepte de donner une chance au coureur. «Ça prendrait un changement de cap tellement majeur que je n'ai pas l'impression qu'il pourra le faire», a lancé M. Duceppe.

Mise en garde à Ignatieff

Coalition ou non, le chef du Bloc québécois a semblé sceptique face à la récente déclaration d'ouverture envers le Québec de son nouvel homologue du PLC.

Il a fait remarquer que des propos passés de Michael Ignatieff laissent songeur, comme ceux rapportés récemment par l'ancien ministre péquiste Joseph Facal, dans le Journal de Montréal.

M. Ignatieff a accusé l'ensemble de la classe politique du Québec de vivre «dans une bulle d'illusions, et quelqu'un doit crever cette bulle», a écrit M. Facal. « De toute façon, de quoi pourraient bien se plaindre ces "Québécois casquette de baseball sur la tête, installés dans leur Cherokee ou Winnebago, avec en sourdine de la musique country"», a aussi dénoncé l'ancien ministre, paraphrasant le chef du PLC.

«On verra bien à l'usage, a pour sa part lancé M. Duceppe. Mais il a dit à Québec qu'il respectait les Québécois, que les députés du Bloc étaient légitimes, mais qu'ils ne pouvaient pas grand-chose à Ottawa... Il faudrait remarquer que s'il voulait diriger une coalition, il ne le pourrait pas sans l'appui du Bloc.»