Sentant le besoin de frapper un grand coup, le ministre des Finances, Jim Flaherty, imposera un régime minceur à tous les partis politiques aujourd'hui lorsqu'il fera la mise à jour économique et financière à la Chambre des communes.

Le ministre annoncera en effet que le gouvernement Harper mettra fin, à partir de l'an prochain, aux subventions que l'État verse aux partis politiques chaque trimestre en fonction des votes qu'ils obtiennent aux élections générales afin de les aider à financer leurs activités, a appris La Presse.Cette mesure, qui doit faire l'objet d'un vote à la Chambre des communes avant la fin de la session parlementaire à la mi-décembre, permettra à elle seule d'économiser quelque 27,6 millions de dollars par année aux contribuables.

Durant sa mise à jour économique fort attendue, le ministre Flaherty annoncera aussi que la hausse salariale des députés de 4600$ prévue l'an prochain sera annulée. Les députés empochent un salaire annuel de 155 400$. Les ministres, députés et hauts fonctionnaires devront voyager en classe économique à partir de maintenant. L'utilisation des avions du gouvernement (Challenger) sera aussi réduite.

M. Flaherty doit préciser aujourd'hui l'ampleur du surplus prévu durant le présent exercice financier qui prend fin le 31 mars et les déficits attendus au cours des exercices financiers de 2009-2010 et 2010-2011. Mais l'abolition de la subvention risque de faire très mal aux partis politiques, en particulier le Parti libéral, qui est sans le sou et a toute la misère du monde à récolter de l'argent des particuliers, et le Bloc québécois, qui en profite largement. Cette subvention fait partie de la vaste réforme de la loi sur le financement des partis politiques adoptée par l'ancien gouvernement libéral de Jean Chrétien en juin 2003 pour nettoyer les moeurs politiques à Ottawa.

Cette mesure privera le Parti conservateur de 10,4 millions de dollars en subvention annuelle de l'État. Le Parti libéral, qui a dû emprunter une bonne partie des 18 millions qu'il a dépensés durant la dernière campagne électorale et qui est actuellement engagé dans une deuxième course à la direction en moins de trois ans, encaissera une perte de 7,2 millions par année.

Pour sa part, le Bloc québécois verra ses coffres amputés de 2,75 millions par année tandis que le NPD devra se priver de près de cinq millions. Enfin, le Parti vert, qui avait été grand gagnant de cette réforme, verra quelque 1,9 million en subvention partir en fumée.

Le gouvernement Chrétien avait adopté cette réforme dans la foulée du scandale des commandites. Cette réforme, qui s'inspirait de celle adoptée par le gouvernement de René Lévesque au Québec, limitait à 5000$ par année les dons des entreprises, des syndicats et des individus aux partis politiques. En guise de compensation financière, les partis politiques obtenaient une subvention de l'État équivalant à 1,75$ par vote obtenu au scrutin précédent.

En arrivant au pouvoir, le gouvernement conservateur de Stephen Harper a décidé d'interdire les contributions des entreprises et des syndicats et de limiter à 1000$ les dons des individus. Cette limite a été élevée à 1100$ aujourd'hui. La subvention versée aux partis politiques s'élève quant à elle à environ 1,95$ par vote obtenu.

«Nous devons prêcher par l'exemple», a répété hier un stratège conservateur sous le couvert de l'anonymat. Il a dit souhaiter que l'ensemble des mesures de compressions qui seront annoncées par le ministre Flaherty seront adoptées unanimement à la Chambre des communes lorsque le tout sera soumis à un vote. Il s'agira alors d'un vote de confiance envers le gouvernement minoritaire conservateur.

Selon des informations obtenues par La Presse, hier, le Parti conservateur pourrait être contraint de mettre à pied certains employés à son siège social à la suite de ces compressions. Les autres partis politiques, qui dépendent encore plus de ces subventions de l'État, pourraient être contraints d'en faire autant.

Au cours des dernières années, le Parti conservateur a réussi à recueillir le plus d'argent, et de loin, de tous les partis politiques. Encore cette année, les coffres des conservateurs sont bien garnis. Au cours des neuf premiers mois de l'année, le Parti conservateur a récolté 14,8 millions alors que le Parti libéral n'a recueilli que 3,6 millions durant la même période.