Les politiciens et les fonctionnaires fédéraux font sauter la caisse avec leurs frais de déplacement. Ils se rendent fréquemment - et à grands frais - à Londres, Paris, Genève, Sydney et à diverses destinations en Amérique du Nord.

Une enquête du Toronto Star a constaté que les dépenses des ministres, du personnel politique et des fonctionnaires sont bien loin de l'image de frugalité du gouvernement Harper.

Certains voyageurs du fédéral semblent incapables de trouver des billets pour Londres à moins de 6000$, bien qu'il y ait des sièges en classe économique pour 1000$ ou 2000$. Dans notre analyse de 60 000 relevés de voyages depuis quatre ans, nous avons trouvé des vols à 18 000$ pour l'Australie, à 7000$ pour Paris, à 11 000$ pour l'Indonésie et à 8000$ pour la Suisse.

À l'opposé, des enquêtes démontrent que les entreprises réduisent leurs frais de voyage en choisissant des vols plus économiques. Et au moins un gouvernement, celui de l'Alberta, s'est montré plus économe avec l'argent des contribuables. Par exemple, le ministre de l'Environnement de l'Alberta et un assistant ont dépensé seulement 320$ chacun pour se rendre à Bali à l'occasion d'une conférence des Nations unies sur les changements climatiques, l'an dernier.

L'ancien ministre fédéral de l'Environnement, John Baird, a pris un vol à 10 920$ pour la même conférence. Trois assistants et deux fonctionnaires l'ont accompagné à des tarifs semblables. Coût total de leur transport aérien : 61 000$.

Dans son enquête, le Toronto Star a découvert que les ministres du gouvernement Harper voyagent souvent avec une suite nombreuse, et à fort prix.

Par exemple, quand l'ancien ministre fédéral de l'Agriculture Chuck Strahl s'est rendu à Genève pour des discussions de l'Organisation mondiale du commerce en 2006, il était accompagné de cinq membres de son personnel politique (son chef de cabinet, deux conseillers en politique et deux secrétaires parlementaires) et de trois fonctionnaires: le sous-ministre, le sous-ministre adjoint et le négociateur commercial en chef, dont le rôle est de mener les négociations. Le voyage d'une semaine à Genève, qui a débuté par une rencontre des ministres provinciaux à Terre-Neuve, a coûté aux contribuables 84 000$ en billets d'avion et en frais d'hébergement. Le voyage de Strahl d'Ottawa à Terre-Neuve puis à Genève a coûté 7200$.

Répondant à des questions sur le voyage à Bali de l'ancien ministre de l'Environnement Baird, un porte-parole a dit que les vols en classe affaires «permettent aux membres de la délégation canadienne de travailler pendant le transport et de s'acquitter de leurs fonctions dès leur arrivée». Lorsqu'on lui a demandé si les voyageurs avaient, comme la délégation albertaine, envisagé des options moins coûteuses, le porte-parole Sujata Raisinghani a dit : «Nous ne pouvons pas spéculer ou commenter.»

Selon les règles du gouvernement, les voyages internationaux doivent être approuvés par le bureau du premier ministre.

Placé devant les constatations du Toronto Star, un porte-parole du premier ministre Stephen Harper a dit que le gouvernement limitera désormais à deux le nombre d'adjoints politiques qui voyagent à l'extérieur d'Ottawa. Kory Teneycke a aussi dit que le gouvernement étudie un plan pour inciter les voyageurs à choisir la classe économique.

«Notre gouvernement est toujours préoccupé par la façon dont est dépensé l'argent durement gagné des contribuables. Nous améliorons continuellement la façon dont nous gérons cet argent afin d'optimiser les dépenses», a-t-il dit.

Cet article est fondé sur des données et des entrevues avec des représentants du gouvernement et des professionnels du domaine du voyage. Les données proviennent d'environ 60 000 relevés de voyages du fédéral (70 millions de dollars en dépenses) divulgués par 20 des plus grands ministères, tels les Ressources naturelles, l'Environnement, la Santé et les Affaires étrangères. Les voyages ont eu lieu au cours d'une période de quatre ans - les deux dernières années du gouvernement libéral (2004-2006) et les deux premières années du gouvernement conservateur (2006-2008).

Tant les libéraux que les conservateurs ont dépensé beaucoup, mais l'analyse du Toronto Star démontre que la plupart des ministres conservateurs dépensent légèrement plus que les libéraux, qu'ils accusaient d'être de grands dépensiers.