(Ottawa) Le chef du Parti conservateur Pierre Poilievre promet de parler sans arrêt à la Chambre des communes à compter de mercredi soir pour empêcher l’adoption du projet de loi C-47 visant à mettre en œuvre le budget fédéral. Il lancera ainsi la guérilla parlementaire promise par son parti tant que le gouvernement Trudeau ne présentera pas un plan de retour à l’équilibre budgétaire.

Selon le chef conservateur, le dernier budget fédéral est mauvais pour l’économie et les familles canadiennes qui peinent à joindre les deux bouts parce qu’il alimente l’inflation en raison des dépenses élevées qu’il contient.

« Aujourd’hui, je vais me lever à la Chambre des communes pour le débat sur le budget et je vais continuer de parler et de parler et de parler sans arrêt pour empêcher l’adoption de ce budget », a annoncé le chef conservateur durant un discours devant ses députés qui était ouvert aux médias.

« À n’importe quel moment, si le premier ministre veut que je permette l’adoption de son budget, il pourra se lever lui-même pour annoncer l’année dans laquelle on aura un budget équilibré. Donc, s’il veut que j’arrête de bloquer son budget, il doit commencer à commencer à équilibrer le budget. C’est bien simple. C’est le gros bon sens », a-t-il ajouté du même souffle.

M. Poilievre a annoncé ses intentions moins de deux heures après que la Banque du Canada a décrété une nouvelle hausse du taux directeur d’un quart de point afin de juguler l’inflation, qui était de 4,4 % en avril. En un an, la Banque du Canada a augmenté le taux directeur à neuf reprises, le faisant passer de 0,25 à 4,75 %.

À ce sujet, le chef conservateur a prédit que le Canada serait au bord d’une crise financière en raison de la hausse importante des taux d’intérêt au pays tandis que bon nombre de Canadiens ont des dettes hypothécaires très élevées.

M. Poilievre, qui a promis de congédier le gouverneur de la Banque du Canada Tiff Macklem s’il prend le pouvoir aux prochaines élections, a reconnu qu’il incombe à la Banque du Canada de fixer le taux d’intérêt. Mais il a soutenu que les dépenses incontrôlées du gouvernement Trudeau au cours des dernières années sont une cause directe de l’inflation.

« La Banque doit prendre en considération l’inflation que le gouvernement est en train de causer et c’est clair que le fait, cher Justin, que vous imprimiez autant d’argent pour emprunter et pour ajouter à notre dette nationale - que vous avez déjà doublée en ajoutant plus que tous les autres premiers ministres ensemble -, ça gonfle les prix. Le coût du gouvernement augmente le coût de la vie », a-t-il argué.

Les taux d'intérêt inquiètent Freeland

S’adressant aux journalistes quelques minutes auparavant, la ministre des Finances Chrystia Freeland a pris acte de la décision de la Banque du Canada – rappelant que la Banque du Canada mène une politique monétaire indépendante du gouvernement fédéral.

PHOTO ADRIAN WYLD, LA PRESSE CANADIENNE

Chrystia Freeland

Elle a reconnu que cette décision causera des soucis financiers à plusieurs familles canadiennes. Mais elle a affirmé que la force du marché de l’emploi et la baisse du taux d’inflation au cours des 12 derniers mois démontrent que l’économie canadienne est résiliente et que les politiques fiscales du gouvernement Trudeau rapportent des dividendes.

Elle s’est toutefois dite inquiète de l’impact de cette neuvième hausse du taux directeur sur la capacité de payer des familles canadiennes.

« C’est un enjeu qui m’inquiète beaucoup », a affirmé la ministre Freeland.

« Il y a toujours deux enjeux qui créent de vraies difficultés pour les Canadiens. D’un côté, il y a l’inflation. D’un autre côté, il y a les taux d’intérêt élevés. J’ai absolument confiance, et les Canadiens et les Canadiennes doivent avoir confiance que l’inflation est en train de diminuer et qu’on va arriver à un niveau d’inflation stable et normal », a-t-elle dit.

Elle a repris à son compte les projections de la Banque du Canada selon lesquelles le taux d’inflation devrait s’établir à 3 % d’ici la fin de l’été.

« Les taux d’intérêt élevés créent vraiment les difficultés pour les Canadiens, pour les familles canadiennes. On doit comprendre qu’on approche la fin de cette période difficile. Chaque mois qui passe, on est plus proche de la fin ».

Elle a fait valoir que le gouvernement doit venir en aide aux plus vulnérables. Et des mesures comme le rabais pour l’épicerie visent justement à donner un coup de pouce financier ciblé aux familles dans le besoin.

« C’est important et c’est la bonne chose à faire. Mais d’un autre côté, on doit aussi prendre une approche responsable du côté fiscal pour ne pas mettre de l’huile sur le feu de l’inflation, et c’est ce qu’on fait aussi. »