(Québec) D’abord mal à l’aise avec cette pratique émergente révélée par La Presse, le gouvernement Legault permet finalement aux Québécois qui le souhaitent de recevoir l’aide médicale à mourir dans un salon funéraire.

L’histoire jusqu’ici

16 février 

La ministre Sonia Bélanger, dépose le projet de loi 11 dont l’objectif est d’élargir les critères d’admissibilité à l’aide médicale.

19 mai 

La Presse révèle que l’aide médicale à mourir est prodiguée dans certains lieux qui ne sont pas prévus à la loi, y compris dans un complexe funéraire en Montérégie.

25 mai

Après s’être dite « très inconfortable » avec cette pratique, la ministre Sonia Bélanger envisage de modifier le projet de loi 11 afin qu’il interdise la « promotion » de l’aide médicale à mourir, révèle La Presse.

Il élargit la permission de recevoir ce soin ultime dans tout autre lieu qui n’était pas prévu par la loi, pourvu qu’ils respectent de nouveaux critères.

La ministre déléguée à la Santé, Sonia Bélanger, a trouvé une voie de passage avec ses vis-à-vis de l’opposition, mardi, alors que l’étude détaillée du projet de loi 11 tire à sa fin. Ce texte législatif, qui élargit l’accès à l’aide médicale à mourir, réforme la Loi concernant les soins de fin de vie.

À l’heure actuelle, l’article 4 de cette loi prévoit que l’aide médicale à mourir est offerte « dans une installation maintenue par un établissement, dans les locaux d’une maison de soins palliatifs ou à domicile ». Or, de l’aveu même des députés en commission parlementaire, les élus ont appris le 19 mai dernier en lisant La Presse que ces soins étaient aussi pratiqués dans d’autres lieux. C’est le cas entre autres au complexe funéraire Haut-Richelieu, en Montérégie, qui a loué sa salle d’exposition à des clients pour qu’ils reçoivent, à leur demande, les soins de fin de vie.

Interpellés par cette nouvelle pratique qui n’était pas sur leur radar, la ministre Bélanger et les députés Jennifer Maccarone du Parti libéral, Christine Labrie de Québec solidaire et Joël Arseneau du Parti québécois, ont convenu mardi de nouvelles règles pour l’encadrer.

Rappelons que les aides médicales à mourir prodiguées à l’extérieur des lieux déjà prévus par la loi concernent moins de 1 % des cas.

Que prévoit le projet de loi ?

Ainsi, une fois le projet de loi adopté, un patient qui souhaite recevoir l’aide médicale à mourir dans un salon funéraire, dans un chalet qui n’est pas son domicile, dans un parc ou dans tout autre lieu, devra en faire la demande à son médecin traitant. Ce dernier ira ensuite obtenir l’approbation préalable auprès de son directeur des services professionnels (DSP) ou de la direction des soins infirmiers (DSI), dans le cas d’une infirmière praticienne spécialisée. La direction s’assurera que le lieu demandé par le patient convient aux règles et pratiques qui encadrent l’aide médicale à mourir.

De plus, le projet de loi 11 prévoit désormais que « nul ne peut faire la promotion ou la publicité d’un bien ou d’un service fourni dans le cadre d’une activité commerciale en l’associant directement ou indirectement à l’aide médicale à mourir, de même qu’exiger toute somme liée directement ou indirectement à l’obtention d’une telle aide ».

Sollicité par La Presse, le cabinet de la ministre Sonia Bélanger a confirmé que ce nouvel article de la loi interdira aux entreprises ou aux particuliers de facturer des frais à un patient qui demande de recevoir l’aide médicale à mourir sur leur propriété.

Dans le cas du complexe funéraire Haut-Richelieu, par exemple, il sera à l’avenir interdit de facturer des frais pour la location de la salle ou de faire la promotion du service.

De plus, le projet de loi prévoit que « quiconque contrevient au premier alinéa est passible d’une amende de 5 000 $ à 50 000 $ dans le cas d’une personne physique ou d’une amende de 15 000 $ à 150 000 $ dans les autres cas. En cas de récidive, les montants des amendes sont portés au double. »

En commission parlementaire, la ministre Bélanger a affirmé que les amendements qui ont été adoptés permettent d’encadrer cette pratique émergente, de la documenter, mais aussi d’éviter une certaine forme de commercialisation de l’aide médicale à mourir, tout en respectant la volonté des patients.

Les prochaines étapes 

Tout au long de la commission parlementaire, mardi, les députés de l’opposition ont plusieurs fois souligné que cette nouvelle approche constituait une évolution importante de l’encadrement de l’aide médicale à mourir au Québec et qu’elle n’avait pas été discutée lors des consultations sur le sujet.

Plusieurs médecins, dont le DGeorges L’Espérance, neurochirurgien retraité et président de l’Association québécoise pour le droit de mourir dans la dignité, ont toutefois témoigné dans La Presse au cours des derniers jours pour que le gouvernement n’interdise pas aux patients de recevoir l’aide médicale à mourir à l’extérieur des lieux déjà prévus par loi.

Le gouvernement Legault souhaite adopter le projet de loi 11 d’ici la fin de la session parlementaire, le 9 juin prochain. Ce texte législatif a été discuté et débattu dans une approche transpartisane par les différentes formations politiques.