(Québec) Les partis de l’opposition veulent que Michael Sabia, qui sera le prochain PDG d’Hydro-Québec, vienne présenter sa vision du développement énergétique du Québec à l’Assemblée nationale lorsqu’il entrera en fonction.
« Est-ce que monsieur Sabia va acheter la vision caquiste par rapport au Dollarama de l’énergie ? Est-ce que monsieur Sabia va avoir la liberté de dire ce qu’il pense par rapport à l’avenir énergétique du Québec ? Et est-ce qu’aujourd’hui, les Québécois vont en avoir pour leur argent par rapport à une vision énergétique très claire ? », a lancé le député libéral Monsef Derraji en point de presse mercredi.
Il reproche au gouvernement Legault le flou entourant le chantier énergétique qu’il veut lancer : quelle place l’économie d’énergie et la construction de nouveaux barrages occuperont-elles ? s’est-il demandé. Pourquoi le gouvernement Legault n’a-t-il pas été capable de convaincre Volkswagen d’installer une usine de batteries au Québec, par manque d’énergie ? « C’est beaucoup, c’est 10 milliards que le fédéral a investis. On l’a raté », a-t-il déploré.
C’est dans ce contexte que M. Sabia, qui a dirigé la Caisse de dépôt et placement du Québec et lancé l’ambitieux projet du Réseau express métropolitain, arrivera à la tête d’Hydro-Québec. Il succédera à Sophie Brochu, qui a quitté son poste deux ans avant la fin de son mandat, quelques mois après avoir exprimé son désaccord avec les orientations du gouvernement Legault.
Pourra-t-il rester debout face à François Legault et au ministre de l’Énergie Pierre Fitzgibbon ? « La question, c’est debout pourquoi ? », rétorque le député de Québec solidaire Haroun Bouazzi. « On va donner la chance au coureur. Mais il faut avoir une vision, et on a besoin d’entendre cette vision ici, à l’Assemblée nationale », a-t-il dit.
Le défi de la transition énergétique
Il souligne que M. Sabia a « beaucoup d’expérience en gestion, en finance », mais qu’Hydro-Québec fait plutôt face à des « questions opérationnelles très compliquées » et à un défi de « transition énergétique ».
M. Bouazzi déplore que le gouvernement Legault n’ait toujours aucun plan officiel sur cette question, alors qu’il en a fait un cheval de bataille en campagne électorale. Québec veut doper la production d’énergie d’Hydro-Québec pour accélérer l’électrification de l’économie québécoise afin de réduire la consommation d’hydrocarbures.
Mais les grands contrats d’exportation d’énergie vers le Massachusetts et New York viennent réduire la marge de manœuvre d’Hydro-Québec, qui se retrouve aujourd’hui incapable d’accepter de gros projets industriels, trop énergivores. Il a d’ailleurs critiqué ces contrats d’exportation.
« Le principal critère, actuellement, c’est de réussir une transition écologique juste. On a de vrais problèmes de choix de société à faire. […] Le gouvernement n’a pas de plan sur papier. Hydro-Québec, oui, mais il n’est pas venu l’expliquer à l’Assemblée nationale », a-t-il dit.
Nationalisme
Le député péquiste Pascal Bérubé a affirmé qu’il ne connaît « aucun engagement de Michael Sabia en matière énergétique, en matière environnementale ».
« Il y a des enjeux environnementaux. Il y a les relations avec les Autochtones. Il y a les relations avec l’environnement. Il y a le virage, la transition énergétique. Il y a peut-être une sensibilité que je ne connais pas. Ce serait bien de l’entendre à l’Assemblée nationale, de pouvoir lui poser des questions en début de mandat », a-t-il dit.
Il a toutefois critiqué les origines de M. Sabia, qui n’est pas né au Québec. « Les libéraux l’aimaient beaucoup, les caquistes l’aiment autant. L’Ontarien Michael Sabia a une carrière remarquable dans le domaine financier », a-t-il dit. Il a affirmé « qu’au Québec, il y a plein de talents qui auraient pu être mis à contribution ». « Moi, je veux un nationaliste à la tête d’Hydro-Québec. Est-ce que Michael Sabia est un nationaliste québécois au plan économique ? »
La première ministre péquiste Pauline Marois avait pourtant renouvelé le contrat de M. Sabia en 2013 et était satisfaite de son travail à la tête de la Caisse de dépôt et placement du Québec. M. Bérubé, qui était ministre à l’époque, a rétorqué que son gouvernement a « prolongé son contrat », mais que « ce n’est pas [lui] qui l’[a] nommé ».
Le premier ministre François Legault a affirmé que M. Sabia était un gestionnaire « crédible », mais n’a pas voulu faire davantage de commentaires, en expliquant que « les annonces seront faites au moment approprié ». Le ministre de l’Éducation Bernard Drainville a soutenu « qu’il a fait un excellent travail comme PDG de la Caisse ».