(Québec) Le gouvernement Legault repousse de quatre ans l’application ferme d’un règlement visant la protection de l’eau en milieu agricole, même s’il est « cruciale pour la protection de l’eau et des sols », selon le ministre de l’Environnement Benoît Charette. Québec veut donner plus de temps aux exploitants agricoles pour se conformer aux nouvelles normes.

« Je ne dirai pas que le règlement est excessif, mais il faut se donner une période de conformité plus grande. Au cours des dernières semaines, la nouvelle n’a peut-être pas percolé, mais on a annoncé un délai de conformité de quelques années. On sera là pour accompagner les producteurs », a laissé tomber le ministre lors d’un échange avec le député libéral André Fortin durant l’étude des crédits budgétaires de son ministère, mercredi à l’Assemblée nationale.

Ce report concerne deux mesures annoncées en 2022. La première est une « exigence d’établir des bandes végétalisées de cinq mètres le long des cours d’eau, et de trois mètres le long des fossés », notamment pour éviter les rejets de pesticide dans les rivières.

La deuxième concerne une mesure qui forçait les exploitations agricoles à traiter les rejets trop polluants d’eau de lavage des fruits et des légumes.

Le cabinet du ministre a ensuite précisé que pendant cette période de quatre ans, nos inspecteurs vont faire de l’accompagnement pour les agriculteurs ». « On va leur demander de faire la démonstration de leur volonté réelle de changer leur pratique ou d’améliorer leur pratique. Dans un cas de mauvaise foi, des sanctions pourront toujours s’appliquer », a affirmé l’attachée de presse du ministre, Mélina Jalbert.

Le libellé exact de cet assouplissement n’est pas encore connu. Dans un communiqué de presse, le ministère a précisé qu’il « proposera dans les prochains mois, une modification réglementaire afin de donner plus de temps aux exploitants agricoles pour s’adapter à cette nouvelle exigence ».

Lorsque le règlement a été rendu public, en mai 2022, Québec affirmait qu’il était nécessaire pour « assurer la protection de l’environnement, particulièrement celle de l’eau et du sol, contre la pollution causée par certaines activités agricoles ».

La modernisation du Règlement sur les exploitations agricoles, cruciale pour la protection de l’eau et des sols, sera une occasion d’aller encore plus loin dans une meilleure cohabitation entre l’agriculture et l’environnement », disait alors Benoît Charette.

Le ministre de l’Environnement Benoît Charette, le 19 mai 2022

Son collègue ministre de l’Agriculture André Lamontagne chantait lui aussi les vertus environnementales de cette mesure. « Tout le travail effectué depuis mars 2021, avec la mise en place du comité composé du MAPAQ, du MELCC et de l’Union des producteurs agricoles, afin de reconnaître les pratiques qui visent à améliorer le bilan environnemental, est enfin porteur de résultats. L’annonce d’aujourd’hui vient confirmer l’importance qu’accorde notre gouvernement à une agriculture durable et saine pour l’environnement », disait-il.

Lors de l’étude des crédits, le député André Fortin a pris la défense des producteurs agricoles. Il estime que les exigences règlementaires sont trop importantes.

Le ministre Charette a rétorqué que les eaux de lavages de légumes ne sont pas exemptes de pollution, notamment en termes de sédiment et de pesticide. Il a pris pour exemple l’eau de lavage des pommes de terre, qui contient de l’amidon et fait « vieillir » les cours d’eau en provoquant leur sédimentation.

M. Fortin a rétorqué qu’une ferme de betterave avait dû fermer temporairement à la suite d’une plainte, puisque ses rejets dans un cours d’eau rendaient l’eau « rouge ».

« Une eau de lavage peut-être extrêmement dense et chargée en sédiment. La couleur n’est pas qu’une couleur. Si on vient affecter un cours d’eau, c’est sérieux », a dit M. Charette, en ajoutant du même souffle qu’il laissera finalement quatre années s’écouler avant d’appliquer le règlement de fgaçon ferme.

Son ministère a précisé qu’il « proposera dans les prochains mois, une modification réglementaire afin de donner plus de temps aux exploitants agricoles pour s’adapter à cette nouvelle exigence ».