(Charlottetown) À huit jours du scrutin, le Parti vert de l’Île-du-Prince-Édouard espère garder ses acquis des élections précédentes, mais certains experts prédisent qu’il pourrait perdre des sièges à l’Assemble législative.

Hannah Bell, une députée verte qui a décidé de ne se pas représenter en 2023, déplore que son parti n’ait pas été prêt à se lancer dans la campagne électorale.

Même si le chef conservateur Dennis King a déclenché les élections six mois avant la date prévue par la loi, Mme Bell soutient que tous les partis politiques savaient qu’elles se dérouleraient en 2023. Selon elle, sa formation n’a pas fait de travail de terrain ou même planifié une campagne, ce qui pourrait lui coûter des sièges le 3 avril.

« Comme je l’ai déjà dit à l’interne et à l’externe, je crois que le Parti vert a raté une belle chance de relancer en avance son élan en vues des élections. On doit commencer à préparer le prochain scrutin dès la fin de la campagne électorale. Et en rétrospective, les verts ont eu des problèmes à poursuivre leur élan de 2019. »

En 2019, ils avaient obtenu huit sièges, devenant le premier parti écologiste à former l’opposition officielle en Amérique du Nord.

Les conservateurs ont pu former un gouvernement minoritaire, le premier depuis le 19e siècle. Cela a donné aux verts de Peter Bevan-Baker une plus grande occasion de promouvoir des mesures et des politiques que les partis d’opposition du passé.

Toutefois, les conservateurs ont pu devenir majoritaires après avoir remporté une élection partielle en 2020.

Et les verts semblent piétiner. Au début de la campagne, les sondages les plaçaient très loin derrière les conservateurs. Par exemple, ils accusaient un retard de 27 points de pourcentage, selon un sondage de Narrative Research.

Ils ont eu tant de difficultés à attirer de nouveaux candidats qu’ils n’en présentent pas dans deux circonscriptions.

« Je ne prétendrais pas que je ne suis pas déçu. Je peux toutefois vous dire que ce n’est pas faute d’essayer », dit le chef du Parti vert, Peter Bevan-Baker.

Plusieurs sympathisants ont exprimé le désir d’être candidats au cours des quatre dernières années, mais ils y ont renoncé à cause de l’annonce anticipée des élections, explique-t-il. Ils ne voulaient pas tout abandonner d’un coup.

Don Desserud, un politologue de l’Université de l’Île-du-Prince-Édouard, croit que la percée du Parti vert d’il y a quatre ans était grandement attribuable à la désaffection de l’électorat libéral qui voulait du changement après 12 années de gouvernement libéral.

Selon lui, le prochain scrutin permettra de constater si les résultats de 2019 étaient un simple accident de parcours. Il souligne que certains de ces électeurs aiment bien les politiques proposées par les verts.

« Mais quand j’étudie les résultats des sondages, je ne le constate pas, reconnaît-il. Je vois que les verts sont revenus comme avant. »

Les libéraux, qui ne comptaient que quatre députés à la dissolution de l’Assemblée législative, accusent un faible retard sur les verts. Eux non plus ne sont pas parvenus à présenter des candidats dans tous les comtés, une première depuis 1919.

La cheffe libérale Sharon Cameron a bien pris soin de cibler le Parti vert depuis le début de la campagne afin de courtiser son ancien électorat. Elle a même choisi de se présenter dans la même circonscription que M. Bevan-Baker, brisant ainsi la tradition voulant qu’un chef n’affronte pas un autre chef dans le même comté.

L’historien Ed MacDonald dit que le vieux système politique binaire était bien enfoui dans l’esprit des plus vieilles générations. Pour plusieurs, l’allégeance politique relève du patrimoine familial. Il croit que les verts peuvent maintenir leurs acquis et même attirer de nouveaux électeurs en raison des changements démographiques sur l’Île-du-Prince-Édouard.

« Le paysage électoral de [la province] a changé et continue de le faire, avance-t-il. Plusieurs immigrants sont venus s’installer sur l’Île-du-Prince-Édouard, plusieurs personnes habitant d’autres régions du Canada aussi. Les gens changent d’allégeance plus que jamais, notamment dans les régions urbaines. »