(Montréal) Des voix continuent de s’élever pour presser le gouvernement fédéral de mettre sur pied « le plus tôt possible » un programme de régularisation pour les migrants sans statut au pays afin d’enrayer au plus vite les discriminations auxquelles ils font face.

À la veille de la journée internationale des droits des femmes, des organismes ont témoigné à quel point la précarité et l’insécurité que vivent ces personnes sans statut migratoire frappe encore plus les femmes, souvent déjà victimes d’inégalités en raison de leur sexe.

Elles sont confrontées à diverses formes de violences et d’abus, notamment sexuels et psychologiques, en plus d’obstacles dans l’accès aux services et la défense de leurs droits, ont décrit des intervenantes du milieu communautaire en conférence de presse, mardi matin, à Montréal.

Celles-ci représentaient, entre autres, Solidarité sans frontière, l’Alliance pour une justice de genre dans la migration, le Mouvement contre le viol et l’inceste, l’Écho des femmes de la Petite Patrie, la Mission communautaire de Montréal et le collectif Femmes de diverses origines.

« Nous voulons dire que le programme de régularisation doit être une voie pour réparer les violences faites aux femmes sans statut », a revendiqué Bénédicte Carole Ze du Centre des travailleurs et travailleuses immigrants.

De nombreuses personnes actuellement sans statut sont arrivées au Canada comme demandeuses d’asile ou avec un permis de travail temporaire ou d'études ou un visa de visiteur, a indiqué Mme Ze. La perte de leur statut peut s’expliquer dans bien des cas par des raisons administratives ou par une méconnaissance de leurs droits.

Malgré cette situation, plusieurs demeurent sur le marché du travail, mais elles sont reléguées à des emplois précaires.

Elles sont cantonnées « à la pauvreté, au travail non déclaré, au travail sans droit, au travail sans aucune protection sociale », a déploré Susana Ponte Rivera, intervenante communautaire à l’Écho des femmes de la Petite Patrie.

« Contraindre les femmes à vivre sans statut d’immigration, c’est les confiner à une vie d’abus répétés », a-t-elle soutenu.

Des migrantes sans statut victimes de violences et de harcèlement préfèrent se taire plutôt que de dénoncer à la police par crainte d’être ensuite expulsées du pays, ont souligné des intervenantes en conférence de presse.

« Si elles sont assez bonnes pour travailler, elles sont assez bonnes pour rester ici et avoir les mêmes droits et avoir accès à des services comme tout autre être humain », a fait valoir Marie Boti, membre fondatrice de Femmes de diverses origines, qui organise la manifestation annuelle du 8 mars à Montréal.

« Ce n’est pas de gaieté de cœur que les gens quittent leur pays, c’est à cause de la guerre, des désastres climatiques et de la destruction environnementale », a-t-elle poursuivi.

« Immédiat et urgent »

Le ministre fédéral de l’Immigration, Sean Fraser, planche sur un programme de régularisation des sans-papiers qui se fait attendre depuis des mois. Des informations rapportées par Radio-Canada mardi laissent entendre qu’un tel programme pourrait être dévoilé d’ici l’été.

L’attachée de presse du ministre Fraser a toutefois indiqué à La Presse Canadienne qu’aucun échéancier n’avait été établi quant à une éventuelle annonce.

Plusieurs groupes commencent à s’impatienter face à Ottawa. « On réclame que ce soit immédiat et urgent parce qu’on a beaucoup souffert. On veut nos droits comme des personnes légales », a déclaré la porte-parole de Solidarité sans frontière, Samira Jasmin.

Susana Ponte Rivera a mentionné que « les organismes communautaires sont engagés depuis bientôt un an dans des pourparlers et des communications avec le gouvernement fédéral ».

« Nous espérons que ce sera le plus tôt possible [la mise sur pied du programme] parce que plus longtemps qu’on attend, plus longtemps des femmes vivent des abus inacceptables », a-t-elle affirmé.

Les organismes appellent Ottawa à être inclusif dans ses critères d’admissibilité en incluant aussi les personnes ne pouvant travailler en raison d’une maladie ou d’un handicap.

Ils souhaitent également que le programme évite des exclusions comme celles s’étant retrouvées dans le programme du gouvernement Legault qui visait à donner la résidence permanente aux demandeurs d’asile ayant été considérés comme des « anges gardiens » lors de la première vague de COVID-19.

Plusieurs personnes avaient été exclues alors qu’elles avaient contribué à l’effort de lutte contre la pandémie, non seulement dans le milieu de la santé, mais aussi dans de nombreux autres services essentiels.