(Montréal) Le débat sur le chemin Roxham au Québec prend une tournure inquiétante, estime le co-porte-parole de Québec solidaire (QS), Gabriel Nadeau-Dubois.

Il dénonce la « surenchère » politique, notamment le gazouillis de vendredi du Bloc québécois qui affirme que le Québec n’est pas un « tout-inclus ».

Dans les dernières semaines, le Parti québécois a aussi suggéré d’appeler la police, de distribuer des tracts et de créer une « enclave » pour barrer la route aux migrants.

« Je m’inquiète de la surenchère à laquelle on assiste », a déclaré dimanche M. Nadeau-Dubois en marge du conseil national de QS à Montréal.

Un tout-inclus, c’est un endroit où on va s’écraser sur la plage boire des margaritas. Les gens qui entrent au Québec pour faire des demandes d’asile, c’est des gens qui fuient la violence, l’exploitation, la persécution. Ce n’est pas du monde qui veut se la couler douce.

Gabriel Nadeau-Dubois

D’après lui, « ces comparaisons-là n’ont pas leur place ».

La question du chemin Roxham a été soulevée en point de presse à la suite du discours du candidat de QS dans Saint-Henri–Sainte-Anne, l’avocat en droit de l’immigration Guillaume Cliche-Rivard.

Il a déclaré devant les délégués de QS qui étaient réunis au Collège Ahuntsic que de parler d’ériger « des murs, des blocages policiers » en 2023 n’avait « aucun bon sens ».

L’an dernier, un nombre record de 39 171 demandeurs d’asile ont été interceptés au chemin Roxham, un point d’entrée non officiel situé à Saint-Bernard-de-Lacolle, en Montérégie.

Le gouvernement caquiste de François Legault exige qu’Ottawa assume les coûts engendrés et qu’il renégocie avec l’administration du président américain Joe Biden l’entente sur les tiers pays sûrs.

De son côté, QS propose de suspendre cette entente, le temps de la renégocier. Cela permettrait de demander l’asile à n’importe quel point d’entrée frontalier canadien, selon M. Cliche-Rivard.

« Ils vont pouvoir aller en Ontario ou en Colombie-Britannique s’ils le veulent. On va diluer la pression et ça va être bénéfique pour tout le monde », a-t-il affirmé.

L’affaire Elghawaby rebondit au conseil national

Plus tôt, des membres de QS avaient critiqué le parti pour sa gestion de ce qu’on appelle à présent l’affaire Elghawaby.

La nouvelle représentante spéciale du Canada chargée de lutter contre l’islamophobie, Amira Elghawaby, a déjà associé les Québécois à un « sentiment antimusulman ».

Elle s’en est excusée, mais le gouvernement Legault continue de réclamer sa démission.

Avant d’emboîter le pas au gouvernement, et de réclamer à son tour la démission d’Amira Elghawaby, QS avait rabroué son député Haroun Bouazzi, pour qui cette affaire était une « diversion ».

Pour le délégué de Hochelaga-Maisonneuve, Julien Arsenault, M. Bouazzi avait pourtant vu juste. « C’était la définition même de diversion », a-t-il plaidé au micro. Selon lui, QS a joué le jeu de la Coalition avenir Québec.

« Des excuses d’une femme musulmane de nos jours, celles-là, on ne les accepte pas. Est-ce qu’une femme doit en faire plus ? J’aurais aimé qu’on lui laisse une chance », a affirmé à La Presse Canadienne Laureline Manassero.

Annette Beauvais a fait la même analyse, tandis que Florence Bourdeau a soutenu lors d’un entretien que QS a « géré du mieux qu’il pouvait » en demandant même à rencontrer Mme Elghawaby, ce qui lui a été refusé.

« Elle doit lutter contre les préjugés et elle arrive avec une tonne de préjugés sur le Québec », a souligné Mme Bourdeau.

Le débat est somme toute resté très timide.

Parité, régions et indépendance

Les députés solidaires ont obtenu, lors de ce conseil national, le mandat d’effectuer une vaste tournée des régions ; le parti a perdu des plumes dans 45 circonscriptions rurales ou de banlieues lors des dernières élections.

On a également voté en faveur d’une proposition visant à trouver des moyens « d’imposer » des candidatures féminines dans certaines circonscriptions dites prenables, afin de renouer avec la parité au caucus.

Le parti s’est par ailleurs engagé, dimanche, à promouvoir « expressément et activement » l’indépendance du Québec, et à déployer un plan de communication destiné à la « visibiliser sur la scène nationale ».

Enfin, le conseil national a rendu un vibrant hommage à l’ex-députée de Rouyn-Noranda–Témiscamingue, Émilise Lessard-Therrien.

Elle a remercié tous ceux et celles qui lui ont envoyé des messages d’encouragement au lendemain de sa défaite électorale, le 3 octobre dernier.

En pleurs, elle a déclaré sur scène que ces messages l’avaient aidée à chasser la « honte » et l’« humiliation ». Mme Lessard-Therrien n’a pas caché son intention de se représenter aux élections de 2026.