(Ottawa) À quelques jours de la rencontre des premiers ministres portant sur la hausse des transferts en santé, le gouvernement Trudeau garde ses cartes le plus près de lui au sujet de l’effort financier qu’il est prêt à faire pour remettre le réseau de la santé sur ses rails.

Le premier ministre Justin Trudeau a convoqué ses homologues provinciaux à une rencontre de travail le 7 février, mais les émissaires fédéraux se sont abstenus jusqu’ici de révéler le montant qu’Ottawa est prêt à mettre sur la table pour consolider les réseaux de la santé au pays.

Si l’optimisme est toujours de mise quant à la possibilité de conclure une entente à long terme au cours des prochaines semaines, tout indique que Justin Trudeau attendra à mardi prochain, jour de la rencontre, pour donner les détails financiers aux premiers ministres des provinces.

« Nous n’avons absolument aucun détail au sujet des intentions fédérales », a lancé une source provinciale sur un ton exaspéré.

« C’est à peine si on sait où aura lieu la rencontre des premiers ministres. C’est visiblement une tactique de négociations de la part du gouvernement fédéral », a ajouté cette source provinciale, bien au fait du dossier. Cette source a requis l’anonymat, parce qu’elle n’était pas autorisée à parler publiquement des détails de la rencontre.

« On s’attend maintenant à ce que le premier ministre dévoile les détails de l’entente qu’il a en tête uniquement lorsqu’il va rencontrer les premiers ministres des provinces. »

Depuis plusieurs mois, les provinces font front commun pour réclamer une hausse substantielle des transferts en santé de 28 milliards de dollars par année. Selon les calculs des provinces, cela permettrait de faire en sorte qu’Ottawa paie 35 % des coûts des soins de santé au pays, comparativement à 22 % aujourd’hui.

Justin Trudeau a déjà fait savoir qu’il n’a pas l’intention d’accéder à cette demande, allant jusqu’à souligner que les provinces ont, dans l’immédiat, une capacité financière suffisante pour investir davantage à court terme dans le réseau de la santé si elles le souhaitent.

En outre, le gouvernement fédéral conteste la méthode de calcul des provinces et soutient qu’il défraie déjà 35 % des coûts si l’on tient compte des points d’impôts qui leur ont été transférés dans les années 1970.

Des sources fédérales jointes par La Presse ont aussi refusé de donner même un ordre de grandeur de l’effort financier qu’Ottawa est prêt à consentir. Visiblement, cette stratégie vise à s’assurer que le gouvernement fédéral ne prêtera pas le flanc aux critiques des premiers ministres avant la tenue de la rencontre.

« On a un ordre de grandeur en tête », s’est borné à dire une source fédérale, refusant du même souffle de donner plus de détails.

Cela dit, l’entente que souhaite conclure Ottawa sera d’une durée de 10 ans. Cette entente pourra être réévaluée après cinq ans afin de tenir compte des changements démographiques et d’ajuster les montants si cela s’avère nécessaire.

Parallèlement, Ottawa entend signer des accords bilatéraux avec chacune des provinces afin de tenir compte de leurs besoins. Elles pourraient ainsi utiliser cet argent pour leurs priorités respectives en matière de soins de santé, comme la santé mentale, les soins primaires, ou encore s’attaquer plus rapidement à la liste d’attente en chirurgie.

Jeudi soir la ministre des Finances Chrystia Freeland a rencontré ses homologues provinciaux à Toronto dans le cadre d’un « dîner de travail ». Il a été impossible de savoir si elle avait l’intention de préciser les investissements supplémentaires qu’Ottawa comptait faire en santé lors de cette rencontre.

Selon des informations obtenues par La Presse, le gouvernement Trudeau a bon espoir de conclure rapidement des ententes bilatérales avec certaines provinces, comme il l’avait fait d’ailleurs dans le cas du programme national de garderies.

La Colombie-Britannique pourrait être la première à conclure une telle entente. Le premier ministre de cette province, David Eby, était d’ailleurs de passage mercredi à Ottawa. Il a eu une rencontre avec Justin Trudeau.

En point de presse, M. Eby a déclaré que M. Trudeau ne lui avait pas fourni de détails financiers sur le financement de la santé durant la rencontre de 45 minutes. « Il a dit qu’il présenterait une proposition très claire et compréhensible pour les premiers ministres ».

Les mandarins fédéraux s’attendent aussi à ce que le premier ministre de l’Ontario, Doug Ford, signe aussi rapidement une entente avec Ottawa. « Nous devrions conclure un accord peu de temps après » le 7 février, a affirmé M. Ford mercredi. « Nous ne pouvons pas continuer à faire traîner ça alors que nous ressentons tous une pression sur les soins de santé ».