(Québec) Le gouvernement Legault propose une hausse salariale de 9 % sur cinq ans aux 600 000 employés des secteurs public et parapublic, ainsi qu’un montant forfaitaire de 1000 $. Il se réserve aussi une marge de manœuvre pour hausser davantage les salaires de certains emplois bien précis. Les syndicats dénoncent cette offre qui, selon eux, « appauvrit » les travailleurs dans un contexte d’inflation.

La présidente du Conseil du trésor, Sonia LeBel, a fait cette annonce jeudi dans le cadre du dépôt des offres du gouvernement en vue du renouvellement des conventions collectives des employés de l’État. Elle dit vouloir assurer aux salariés des « conditions avantageuses, justes et équitables », tout en tenant compte de la « saine gestion des finances publiques ».

Il y a donc un gouffre qui sépare Québec et les syndicats. Avec l’inflation, les revenus de l’État en taxes et en impôts sont à la hausse et les syndicats du secteur public veulent toucher leur dû. Le Front commun pour la ronde 2023 des négociations du secteur public demande une hausse salariale de 9 % sur trois ans, à laquelle serait ajoutée une compensation salariale équivalente à l’inflation. Si les prévisions de la Banque du Canada sont justes, cette augmentation totaliserait donc près de 23 %.

Et chaque point de pourcentage d’augmentation a un effet appréciable sur le budget du gouvernement. En 2022-2023, la rémunération globale pour les employés du secteur public québécois était de 60 milliards, soit 56 % des dépenses de programme. Cela inclut le salaire de 800 000 employés syndiqués et cadres. Chaque point de pourcentage d’augmentation équivaut approximativement à une hausse de budget de 600 millions pour les finances publiques, note le Conseil du trésor.

Lorsqu’on fait remarquer à Mme LeBel que l’inflation a été très élevée en 2021 et 2022 – l’argument utilisé par les syndicats –, elle rétorque qu’elle « regarde vers l’avenir » et que son offre pour la période 2023-2027 suit les projections de l’inflation pour ces années futures.

Une offre « très insatisfaisante »

Concrètement, l’offre du gouvernement Legault ne passe pas auprès des travailleurs du secteur public. « Si nos troupes n’étaient pas mobilisées, je peux vous dire qu’elles vont l’être à partir d’aujourd’hui », a affirmé jeudi François Enault, premier vice-président de la Confédération des syndicats nationaux (CSN).

Selon Daniel Boyer, président de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ), « si on acceptait la proposition qui nous est faite, il y aurait un appauvrissement » des employés. L’Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS) et la Centrale des syndicats du Québec (CSQ), qui complètent avec la CSN et la FTQ le Front commun syndical, pressent Québec d’entamer les négociations.

Du côté de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ), la présidente, Julie Bouchard, qualifie les offres gouvernementales de « très, très, très insatisfaisantes ».

« Ce dépôt-là est un levier extraordinaire pour que nos 80 000 membres continuent à se mobiliser et à se battre pour leurs conditions de travail », a-t-elle dit.

« C’est le jour de la marmotte », a pour sa part affirmé Mélanie Hubert, présidente de la Fédération autonome de l’enseignement (FAE).

« Ce qui nous a été présenté est à des années-lumière de ce qu’on a déposé comme demandes. […] La proposition [du gouvernement] ne permettra pas de rattraper l’inflation des dernières années », dénonce-t-elle.

Des solutions concrètes

Lors de sa présentation, Mme LeBel a fait un constat critique étonnant : les interventions du gouvernement Legault dans les réseaux de l’éducation et de la santé n’ont pas porté leurs fruits.

La ronde de négociations précédente m’a permis de faire des constats importants. […] Force est de constater que les investissements gouvernementaux majeurs que nous avons faits, particulièrement dans les deux réseaux, la santé et l’éducation, n’ont pas eu sur le terrain les effets attendus. La population, les élèves, les patients attendent toujours des résultats concrets, et je pense qu’il est temps de se questionner sérieusement sur ce qui ne fonctionne pas.

Sonia LeBel, présidente du Conseil du trésor

Le gouvernement Legault propose encore une fois une approche différenciée en favorisant certains corps d’emplois. Lors des dernières négociations, il a bonifié le salaire des enseignants, des infirmières et des préposés aux bénéficiaires. Cette fois-ci, c’est encore les secteurs de la santé et de l’éducation qui seront ciblés. Mme LeBel a mentionné spécifiquement les psychologues, moins bien payés que dans le secteur privé. Elle dit disposer d’une marge de manœuvre équivalente à une hausse de 2,5 %, soit 1,5 milliard de dollars, pour les contenter.

Jeudi, Mme LeBel a affirmé qu’elle avait trois « axes prioritaires » : l’enseignement, la santé et la santé mentale. La présidente du Conseil du trésor veut une ronde de négociations qui propose des solutions concrètes qui vont permettre à la population d’avoir de meilleurs services publics.