(Ottawa) Le ministre fédéral des Affaires intergouvernementales, Dominic LeBlanc, persiste et signe en affirmant qu’un accord sur une hausse des transferts en santé avec le Nouveau-Brunswick seulement pourrait survenir si jugé nécessaire, puisqu’Ottawa ne veut pas donner de « droit de veto à d’autres provinces ».

« Si [le premier ministre Blaine] Higgs nous arrive avec une proposition qui fait beaucoup de bon sens, nous n’allons pas donner un droit de veto à d’autres provinces sur la capacité de faire des choses importantes au Nouveau-Brunswick », a-t-il dit mardi en mêlée de presse avant de se rendre à la période des questions.

Quelques semaines plus tôt, il avait évoqué cette possibilité d’une entente « bilatérale » en entrevue avec le média local néo-brunswickois Telegraph-Journal.

Appelé à clarifier ses propos mardi, M. LeBlanc a soutenu avoir voulu « utiliser ça comme exemple » et faire référence à une rencontre qu’il a eue avec M. Higgs.

« [Il] est très ouvert à travailler avec nous afin d’avoir des résultats pour les investissements du fédéral en santé, d’avoir une visibilité pour dire aux patients et aux personnes qui travaillent dans le système de la santé qu’un investissement fédéral a amélioré [les choses] de telle ou telle façon. »

Pressé de questions par les journalistes, le ministre n’est pas allé jusqu’à dire que le fédéral est maintenant prêt à discuter avec chaque province et territoire individuellement en vue d’ententes à la pièce.

« On n’est pas rendus là parce qu’on a des discussions, souvent, multilatérales avec plusieurs provinces. Les discussions sont en cours. Je demeure optimiste », a-t-il affirmé.

Au début du mois, les discussions sur les transferts en santé ont achoppé en marge d’une rencontre à Vancouver entre les ministres provinciaux de la Santé et leur homologue fédéral, Jean-Yves Duclos.

Dans une entrevue accordée à l’émission Midi Info diffusée la semaine même sur les ondes de Radio-Canada, M. LeBlanc avait reproché à plusieurs premiers ministres provinciaux de tenir un discours différent en privé que celui en public, donnant en exemple le communiqué du Conseil de la fédération, selon lui écrit d’avance.

« En privé, [des] premiers ministres nous disent “Non, non, on comprend qu’il faut avoir des conditions appropriées et on s’attend [à ce] que vous vouliez des résultats pour les patients, pour les utilisateurs du système de soins de santé », avait-il dit.

Questionné mardi à savoir si une majorité de premiers ministres avaient selon lui ce discours distinct en privé, M. LeBlanc a évité de répondre clairement.

« C’est probablement plus que deux et moins de 13, si j’avais à deviner. […] Ça dépend de la semaine. Des fois, ça peut aller à cinq. Des fois, ça peut descendre à un », a-t-il ironisé.

Plus tôt mardi, le premier ministre Justin Trudeau a déploré le résultat de la récente rencontre tenue à Vancouver.

« Malheureusement, les provinces ont décidé de ne pas s’engager et de discuter de ce plan-là, mais nous restons là pour être partenaires », a-t-il laissé tomber avant de se rendre à la réunion hebdomadaire de son conseil des ministres.

Le premier ministre était alors interpellé, en mêlée de presse, sur l’engorgement dans plusieurs hôpitaux pédiatriques, un peu partout au pays, et l’achoppement des discussions au sujet des transferts en santé.

Après s’être dit « énormément » inquiet relativement aux systèmes de santé et « particulièrement [pour] les enfants », il est revenu sur la réunion avec M. Duclos.

« Quand les ministres de la Santé se sont rencontrés, il y a quelques semaines, il y avait un plan pour augmenter les ressources humaines, pour aider les gens à répondre aux besoins urgents », a-t-il offert à propos de la marche à suivre qui a été proposée, selon lui, par le fédéral.

PHOTO HEYWOOD YU, LA PRESSE CANADIENNE

Justin Trudeau

Les provinces et territoires réclament d’Ottawa, depuis plusieurs années, une hausse récurrente des transferts en santé. Ils souhaitent que la contribution du fédéral augmente de façon à couvrir 35 % des coûts en matière de santé, une compétence provinciale.

Le gouvernement Trudeau se dit ouvert à avancer plus d’argent, mais insiste aussi sur les résultats auxquels s’attendent les Canadiens, répètent publiquement ses représentants depuis des mois.

Le gouvernement québécois de François Legault martèle depuis le début du front commun avec les provinces et territoires que l’argent d’Ottawa doit être versé sans condition.

« Mes collègues de la santé et moi-même, on s’entend tous et toutes sur les priorités des diagnostics et des solutions aux problèmes qu’on connaît maintenant. Ensemble, à Vancouver […], on était tous d’accord », a dit M. Duclos dans les couloirs du parlement.

« Le problème, c’est que les premiers ministres – les patrons de mes collègues ministres de la Santé – leur ont demandé de ne pas parler de résultats en public et de focaliser entièrement sur les dollars », a-t-il conclu.

De son côté, le bureau du ministre québécois de la Santé, Christian Dubé, a déclaré par écrit que « le recrutement de la main-d’œuvre et la gestion des ressources » sont des compétences provinciales.

« Nous avons déjà un plan au Québec. Lors de son passage à Vancouver, Christian Dubé a présenté à ses homologues des autres provinces le volet ressources humaines du Plan santé du Québec, pour que notre réseau devienne un employeur de choix », a-t-on soutenu dans un courriel envoyé à La Presse Canadienne.

Le cabinet du ministre a par ailleurs rappelé que Québec s’est dit ouvert à présenter des données à Ottawa. On faisait ainsi référence à la demande de M. Duclos pour l’utilisation d’indicateurs de santé communs ainsi que la création d’un système de données sur la santé de « classe mondiale » pour le pays.