(Québec) Les 11 députés de Québec solidaire (QS) prêteront serment à Charles III, dans l’espoir de faire adopter avec la Coalition avenir Québec un projet de loi pour rendre facultatif ce geste « inutile et archaïque ».

« Nous allons prendre nos responsabilités, entrer au Salon bleu, et nous assurer que plus personne ne soit obligé de faire ce serment humiliant », a affirmé le chef parlementaire Gabriel Nadeau-Dubois dans une communication écrite diffusée tôt jeudi matin.

À la mi-octobre, le Parti québécois (PQ) et QS ont refusé de prêter allégeance à la couronne lors de leur cérémonie d’assermentation. Ils tentaient de négocier une voie de passage pour éviter ce rituel jugé désuet.

Or mardi, le président de l’Assemblée nationale, François Paradis, a coupé court au débat : tant que le serment ne sera pas complété, ils ne pourront pas siéger au Salon bleu ni en commission parlementaire, quitte à se faire expulser. Il a également statué qu’il n’était pas possible de remédier à la situation par une simple motion parlementaire, comme le veut le PQ, mais plutôt par une loi.

Siéger pour voter

Mais pour voter une loi, il faut siéger au Salon bleu, et donc… prêter serment à Charles III. « La décision du président de l’Assemblée est très décevante, mais elle est claire et sans appel : pour corriger cette injustice pour de bon, il faut adopter un projet de loi. […] Quand on veut changer les règles du jeu, on ne peut pas s’en remettre aux autres. Il faut le faire soi-même. Nous allons prendre nos responsabilités, entrer au Salon bleu, et nous assurer que plus personne ne soit obligé de faire ce serment humiliant », a expliqué M. Nadeau-Dubois.

Il estime cependant que la prise de position des deux partis politiques n’était pas inutile, puisqu’elle a forcé la main de la Coalition avenir Québec. Jeudi, le parti de François Legault s’est engagé à adopter une loi : « On est prêt à déposer un projet de loi rapidement pour faire en sorte de mettre fin au serment d’allégeance au roi », a affirmé le ministre de la Justice et leader parlementaire caquiste Simon Jolin-Barrette.

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Le chef du Parti québécois, Paul St-Pierre Plamondon

Avec cette décision de QS, le PQ se retrouve isolé. Mercredi, le chef péquiste Paul St-Pierre Plamondon a maintenu la ligne dure. « Mentir et me parjurer comme premier geste comme élu, ça me répugne sincèrement. Prêter allégeance au représentant de l’Église anglicane, ça me répugne sincèrement. Et non, je n’ai pas l’intention de prêter serment », a-t-il lancé en mêlée de presse.

Prendre du temps

Il a toutefois affirmé que d’autres options étaient sur la table, par exemple le fait de demander Pascal Bérubé ou Joël Arseneau — les deux autres élus du PQ — de prêter serment pour siéger, ou de tout simplement de rester sur la ligne de côté le temps qu’un projet de loi soit adopté.

Il est peu probable que le Parti libéral donne son consentement pour une adoption rapide de la pièce législative : il avait d’ailleurs refusé de le faire en juin. Cela voudrait dire que les députés du PQ, s’ils persistent, devront prendre leur mal en patience au moins jusqu’au printemps.

Québec solidaire affirme que son premier geste sera de déposer sa propre version d’un projet de loi pour rendre facultatif le serment au roi. Cela ne devrait pas poser un problème puisque le parti de gauche a déjà déposé une première version en 2019.

Le parti s’engage également à collaborer avec le chef du PQ pour « résoudre l’impasse actuelle » et se dit toujours ouvert à « déposer une motion afin de permettre à tous les députés de siéger sans faire le serment controversé ». « Nous allons utiliser tous les moyens à notre disposition pour débloquer le cul-de-sac. Mais pour le faire, il faut siéger », a affirmé M. Nadeau-Dubois.