(Ottawa) Que le gouvernement canadien inscrive les Gardiens de la révolution islamique (GRI) de l’Iran à sa liste des entités terroristes est souhaitable « en principe », mais en pratique, c’est « irréaliste », estime un expert de l’Iran.

Les libéraux peinent ces jours-ci à justifier le fait que, même s’ils ont appuyé en juin 2018 une motion conservatrice appelant à « inscrire immédiatement » le bras armé du régime iranien à sa liste, ils ne l’aient toujours pas fait.

L’enjeu a refait surface après que la jeune Mahsa Amini a été battue à mort à Téhéran pour cause d’exposition de mèches de cheveux en public. Si le gouvernement a annoncé que des sanctions seraient imposées au régime, il semble embêté par l’enjeu du GRI.

« On va continuer à [évaluer] la situation avec nos fonctionnaires », a par exemple dit le ministre de la Sécurité publique, Marco Mendicino, en mêlée de presse, mercredi, sans expliquer pour quelle raison le dossier tardait.

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Le ministre de la Sécurité publique, Marco Mendicino

L’inscription de cette force à la liste d’Ottawa n’est pas si simple qu’il n’y paraît, souligne en entrevue Thomas Juneau, professeur agrégé en Affaires publiques et internationales de l’Université d’Ottawa.

« La force est composée de 150 000 personnes, et il y aussi des milliers de vétérans qui ont été conscrits », expose le spécialiste de la politique iranienne. Certains d’entre eux ont donc été enrôlés contre leur gré, et parfois comme employés de soutien, et non comme soldats.

« Si on désigne le CGRI comme entité terroriste, la tâche des agences de renseignement serait énorme. Leur capacité à contrôler toutes les sanctions que le Canada a imposées est déjà débordée », ajoute Thomas Juneau.

Le politologue préconise des « sanctions ciblées », par exemple contre des dirigeants du régime iranien qui envoient au Canada des enfants qui vivent dans l’opulence et dont la présence au pays est « extrêmement démoralisante » pour la diaspora iranienne.

Lundi, le premier ministre Justin Trudeau a annoncé des sanctions contre « des dizaines d’individus et de responsables iraniens », dont « plusieurs membres du leadership de la garde révolutionnaire iranienne ».

On ignorait toujours, mercredi, qui était frappé de sanctions.

La liste des entités terroristes du Canada compte près de 80 groupes et organisations.

On y trouve la Brigade al-Qods des Gardiens de la révolution islamique, « l’unité clandestine du GRI chargée des opérations menées à l’étranger et de la diffusion dans le monde de l’idéologie de la révolution islamique par l’entremise, entre autres, d’activités de facilitation du terrorisme », décrit-on sur un site gouvernemental.

Les derniers groupes à être mis à l’index sont Aryan Strikeforce, James Mason, Three Percenters, et État islamique — République démocratique du Congo, en juin 2021.