(Ottawa) Des fonctionnaires d’Affaires mondiales Canada ont été chargés d’examiner les processus en place dans le but de s’assurer que les repas servis lors de vols nolisés pour des responsables de haut niveau ne coûtent pas les yeux de la tête comme ça a été le cas lors d’un voyage au Moyen-Orient de la gouverneure générale.

« Nous sommes tous d’accord que certains éléments relatifs aux dépenses des vols sont problématiques […] et c’est pourquoi nous avons déjà commencé à mettre en œuvre un groupe de travail pour regarder les processus », a déclaré le chef du protocole du Canada, Stewart Wheeler, lors d’une comparution, jeudi, devant le comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires.

M. Wheeler répondait à une question de la deuxième vice-présidente du comité, la bloquiste Julie Vignola, qui se demandait si « diplomatiquement parlant, c’est hors de question » ou pas de planifier des repas « froids, transportables », sans aller jusqu’à « des sandwichs pas de croûte aux cretons moutarde ou bien au beurre de “peanuts” banane ».

D’autres députés se sont jetés dans la mêlée, chaque fois en soulignant leur indignation à la suite des révélations à l’effet que la facture de quelques repas servis à bord de l’avion gouvernemental qui transportait la représentante de la reine avait été de plus de 80 000 $, soit des déjeuners et des dîners à 350 $ par personne selon les calculs du Bloc québécois.

Le vice-président libéral du comité, Majid Jowhari, a par exemple suggéré qu’un plafond soit établi aux dépenses par repas sur les vols, rappelant au passage que les députés doivent eux-mêmes respecter des allocations journalières.

« C’est précisément le type de drapeaux que je souhaite que notre équipe développe », a répondu le chef du protocole à un autre député qui avait une demande semblable.

Les repas servis sur les vols qui ont suscité la controverse n’avaient pas de quoi lever des « flags », a insisté Christine MacIntyre du Bureau du secrétaire du gouverneur général, qui était elle-même sur un vol. « Les coûts nous ont tous choqués. On nous a servi des œufs, des omelettes », a-t-elle relaté.

Mme MacIntyre a elle-même évoqué qu’il n’est pas nécessaire de servir des repas sur « un petit vol, un vol d’une heure et demie ».

Pas si simple

Les députés ont appris au fil de leurs questions que la défense nationale a souvent une faible marge de manœuvre dans les commandes des repas, et ce, malgré qu’Affaires mondiales Canada ne demande que des plats « standards » à l’image de ceux servis sur des vols commerciaux.

Il est fréquent qu’aux aéroports où les avions du gouvernement se posent il n’y ait qu’un seul traiteur disponible. Ce type de « monopole » empêche de négocier, a expliqué le lieutenant-général Eric Kenny, commandant de l’Aviation royale canadienne.

C’est son organisation qui a notamment pour mission d’assurer des voyages sûrs aux « VVIP », des personnes « très, très importantes » ou « very, very important persons », a-t-il mentionné.

De plus, les coûts associés à la nourriture elle-même ne composent qu’une fraction de la facture. Il faut ajouter des frais de manutention et de livraison, de stockage, de nettoyage et de gestion des déchets alimentaires, a énuméré le haut gradé, ajoutant que ces frais sont facturés, quel que soit le nombre de passagers sur le vol.

Malgré une réticence du lieutenant-général en raison du fait que les coûts ne seraient pas détaillés par les traiteurs, de nombreux élus lui ont demandé de transmettre au comité les menus et la ventilation des dépenses.

Le gouvernement canadien réalise désormais des économies en réduisant le nombre de repas excédentaires qui sont commandés afin d’offrir un choix aux passagers. La proportion a été réduite à 65 % en 2019 puis à 20 % après les révélations du mois de juin, a dit le lieutenant-général Kenny en répondant à une question du député conservateur Pierre Paul-Hus.

Il a été mentionné que les repas servis aux passagers sont les mêmes que ceux pour l’équipage puisque c’est plus simple en matière de logistique, mais que ces derniers sont servis parmi ce qu’il reste.

Tout en déclarant que de déterminer quelle quantité commander est « un art », selon le chef du protocole, il a noté que l’une des conclusions des discussions a été qu’il est possible que « tout le monde mange la même chose », à l’exception de ceux qui ont des restrictions alimentaires. C’est d’ailleurs ce qui se serait produit lors du voyage à destination de Londres pour les funérailles de la reine la semaine dernière.

M. Wheeler a aussi déclaré qu’« en aucun temps dans le processus », la gouverneure générale ne révise les menus qui sont servis.

La convocation de la représentante de la gouverneure générale et du ministère de la Défense nationale est le résultat d’une initiative du Bloc québécois.

Le chef bloquiste, Yves-François Blanchet, a déclaré jeudi que sa formation entend mettre en œuvre une « stratégie » pour « faire une dénonciation en règle de la monarchie », la gouverneure générale étant selon lui un autre exemple d’« une patente d’un autre millénaire qui ne devrait pas exister ».