(Ottawa) Comment le secteur le plus polluant de l’économie canadienne devra-t-il s’y prendre pour réduire ses émissions de gaz à effet de serre (GES) ? Le ministère de l’Environnement et du Changement climatique lance une consultation lundi pour déterminer si ce sera une bourse du carbone ou taxe sur le carbone qui s’appliquera à l’industrie pétrolière et gazière, a appris La Presse.

C’est l’une des « plus grosses pièces » du Plan de réduction des émissions pour 2030, selon une source au sein du cabinet du ministre de l’Environnement, Steven Guilbeault, qui n’était pas autorisée à parler publiquement. Le plan dévoilé en mars prévoit une réduction des GES émis par l’industrie pétrolière et gazière de 31 % sous les niveaux de 2005 d’ici 2030.

Le gouvernement n’a toujours pas défini combien de mégatonnes de gaz responsables des changements climatiques cela représente et il ne le fera pas lors de cette consultation. « Concentrons-nous sur le choix du meilleur système et quand on aura choisi le meilleur système, là on parlera du niveau », a-t-elle fait valoir.

Peu importe le niveau auquel il sera fixé, ce « plafond sera axé sur les émissions et ne concernera pas la production de pétrole et de gaz », souligne le ministère dans un document d’information. « Il optimisera les possibilités d’investir dans la décarbonisation du secteur tout en tenant compte de l’évolution des considérations de sécurité énergétique. »

Une coalition de groupes environnementaux, comprenant notamment Équiterre et la Fondation David Suzuki, réclame plutôt une réduction de la production de pétrole des sables bitumineux. L’Association canadienne des producteurs pétroliers rejette, quant à elle, l’idée de se faire imposer un plafond d’émission par règlement. Ces organisations ont soumis des mémoires au comité permanent des ressources naturelles de la Chambre des communes qui étudie la question depuis février.

Le ministère de l’Environnement et du Changement climatique choisira entre deux options : une bourse du carbone à l’image de celle du Québec ou l’imposition de la taxe sur le carbone. Dans un cas comme dans l’autre, l’option préférée s’appliquerait en particulier à l’industrie pétrolière et gazière.

Par exemple, seuls les joueurs de ce secteur participeraient à la bourse du carbone qui leur permettrait d’échanger des crédits pour s’assurer qu’elle soit efficace. « On veut s’assurer que les émissions proviennent de ce secteur-là », a précisé notre source. La taxe sur le carbone pourrait être révisée si elle n’est pas assez élevée pour que ce secteur atteigne sa cible, advenant le cas où ce serait l’option privilégiée.

Le plafond qui sera éventuellement fixé tiendra compte du règlement sur le méthane, l’un des GES, en vertu duquel l’industrie doit déjà les émissions de ce gaz de 75 % d’ici 2030. La consultation se terminera le 21 septembre et le modèle choisi sera présenté au début de l’année 2023.

Cette démarche ne concerne pas les subventions dont bénéficie l’industrie pétrolière et gazière, critiquées à maintes reprises par le Bloc québécois et le Nouveau Parti démocratique.

Cette industrie a produit 27 % des émissions de GES en 2020, ce qui lui vaut le titre de plus polluante, selon le ministère de l’Environnement et du Changement climatique.

Le Plan de réduction des émissions pour 2030 préconise une réduction globale de 40 % à 45 % des GES d’ici 2030 sous les niveaux de 2005. Le Canada est l’un des 195 pays signataires de l’Accord de Paris sur le climat pour limiter la hausse de la température mondiale sous les 2 °C et préférablement à 1,5 °C.

Il y a un peu plus d’un an, le gouvernement de Justin Trudeau a adopté la Loi sur la responsabilité en matière de carboneutralité pour y parvenir. L’objectif ultime est d’atteindre cette carboneutralité en 2050. Le premier rapport d’étape doit être déposé à la Chambre des communes et au Sénat en 2023.