(Ottawa) La communauté ukrainienne fourbit ses armes. Une demande de contrôle judiciaire a été déposée mardi en Cour fédérale contre le gouvernement Trudeau afin de contester l’envoi de turbines destinées au gazoduc russe Nord Stream 1.

« Cette décision d’accorder le permis n’était pas raisonnable, transparente, ou dûment autorisée », a exposé par voie de communiqué le Congrès mondial ukrainien, à l’origine de la démarche engagée par un Canadien qui habite en Ukraine.

« La décision du Canada d’enfreindre les sanctions et de renvoyer la turbine de Siemens en Russie est une grave erreur aux conséquences désastreuses », ajoute l’organisation, en arguant que cette requête devrait être un incitatif pour « trouver une solution ».

Ottawa a permis samedi dernier, pour une « durée limitée », à Siemens Canada de faire entorse au régime de sanctions et d’envoyer à la Russie, via l’Allemagne, six turbines qui étaient en réparation dans une usine de Montréal.

Cette « durée limitée » serait de deux ans, selon les informations rapportées mardi dans le quotidien The Globe and Mail. La dérogation autorise la compagnie à recevoir et livrer jusqu’à six turbines à des fins d’entretien.

Au bureau de la ministre canadienne des Affaires étrangères, Mélanie Joly, on fait valoir qu’il existe « un calendrier d’entretien régulier » pour ces turbines, que le permis remet cette horloge à zéro, et qu’il peut par ailleurs « être révoqué à tout moment ».

Appui européen

Après les États-Unis, la Commission européenne s’est ralliée à la décision du Canada.

La Commission « accueille favorablement la décision de restituer une turbine de gazoduc à l’Allemagne », car « avec le retour de cette pièce, l’une des excuses utilisées par la Russie pour réduire les flux de gaz vient de disparaître », lit-on dans un communiqué publié mardi.

La branche exécutive de l’Union européenne affirme qu’elle « continue de travailler en étroite collaboration avec ses partenaires internationaux, dont le Canada et les États-Unis, afin d’assurer la sécurité énergétique de l’Europe pour l’hiver à venir ».

L’entorse du gouvernement Trudeau à son régime de sanctions contre le Kremlin a toutefois suscité l’ire de Kyiv, comme en a témoigné lundi le président Volodymyr Zelensky, qui a eu des mots très durs à l’endroit de celui qu’il qualifie souvent d’« ami » et annoncé la convocation du chargé d’affaires d’Ottawa en Ukraine.

Réunion d’urgence réclamée

Préoccupés par les répercussions de la dérogation, les élus de l’opposition qui siègent au Comité permanent des affaires étrangères et du développement international exigent la tenue d’une rencontre immédiate.

Le conservateur Michael Chong a écrit au président dudit comité, le libéral Ali Ehsassi, et en a fait la requête. La représentante du Nouveau Parti démocratique au comité, Heather McPherson, a aussi demandé une réunion d’urgence.

Pas de discussion Trudeau-Zelensky

Le premier ministre Justin Trudeau et le président Volodymyr Zelensky n’ont apparemment pas échangé depuis que cette querelle diplomatique a éclaté, à en croire une déclaration fournie mardi par le bureau du dirigeant canadien.

« Nous vous tiendrons au courant de leur prochain appel, a signalé une porte-parole dans un courriel. Nous sommes en constante communication avec nos partenaires ukrainiens et nous continuerons de les appuyer sans relâche. »