(Québec et Montréal) Alors qu’une crise du logement frappe plusieurs régions du Québec et à la veille du 1er juillet, le gouvernement Legault a annoncé mercredi la construction de 3000 nouveaux logements abordables en partenariat avec le Fonds de solidarité FTQ, le Mouvement Desjardins et Fondaction, dont 1000 copropriétés d’ici trois à cinq ans.

Le premier volet de l’entente vise à livrer 2000 logements sociaux et abordables d’ici trois ans. Le Fonds de solidarité et Desjardins se partageront une subvention de 350 millions, qui devront livrer les projets d’habitation, et « assurer leur abordabilité » pendant 35 ans « pour la majorité des logements ».

Le gouvernement Legault s’est également entendu avec Fondaction de la CSN pour créer 1000 condos abordables. Avec une subvention de 45 millions, ces logements de type copropriété seront construits « sur l’ensemble du territoire en cinq ans, dans le cadre du Fonds Coop Accès Proprio, mis sur pied par Fondaction et la Confédération québécoise des coopératives d’habitation ».

« L’avantage de cette initiative est double, puisque les ménages qui acquerront ces copropriétés abordables pourront devenir propriétaires et libéreront 1000 logements qui seront ainsi rendus accessibles à d’autres ménages. De plus, la formule permet que les copropriétés demeurent abordables pour les acquéreurs subséquents, du fait de son caractère collectif, et contribuera à lutter contre le surendettement des ménages », précise le cabinet de la ministre des Affaires municipales et de l’Habitation, Andrée Laforest, dans un communiqué de presse.

Le Ministère précise également que les ménages admissibles pourraient aussi bénéficier du Programme de supplément au loyer, une aide financière qui permet à des ménages à faible revenu d’habiter dans des logements faisant partie du marché privé ou appartenant à des coopératives d’habitation. Les locataires qui bénéficient de ce programme paient un loyer correspondant à 25 % de leur revenu.

Pour la ministre Laforest, cette annonce est la preuve que son gouvernement « multiplie les actions afin de contribuer à loger adéquatement tous les ménages à faibles et moyens revenus ».

« Succession d’interventions incohérentes »

Au Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU), la porte-parole Véronique Laflamme était perplexe après l’annonce de ces nouvelles initiatives. « On a de la misère à dire pour l’instant comment ça va se concrétiser. On ne sait pas qui seront les développeurs ni les propriétaires. Pourquoi créer un nouveau véhicule pour construire des logements dont les ménages à faibles et à modestes revenus ont tant besoin ? Ça aurait été plus simple de mettre les sommes dans le programme québécois AccèsLogis », affirme-t-elle.

On a l’impression d’une succession d’interventions incohérentes, alors qu’on a un programme qui pourrait très bien répondre à la demande s’il était indexé et ajusté aux nouvelles réalités.

Véronique Laflamme, porte-parole du FRAPRU

En ce qui concerne le Fonds pour réaliser des coopératives de propriétaires, le FRAPRU affirme que de développer l’accès à la propriété hors marché spéculatif peut aider des ménages à revenu modeste à améliorer leurs conditions de logement. « Mais on ne sait pas ici non plus quels seront les prix de ces logements », rappelle la porte-parole.

Appelée à réagir mercredi, la mairesse Valérie Plante a salué l’annonce de Québec, rappelant toutefois que les besoins sont grands. « On va avoir un peu plus de 400 logements pour Montréal. C’est une très bonne chose. Il en faut plus, mais on va les prendre. […] Il y a aussi encore beaucoup d’information à sortir sur où, quand et comment les projets vont sortir de terre », a-t-elle soulevé lors d’une mêlée de presse.

De son côté, Cédric Dussault, porte-parole du Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec, estime que la mesure est insuffisante pour contrer « la pire crise du logement de l’histoire du Québec moderne ». Il critique la stratégie de la ministre qui, selon lui, définance le logement social au profit du privé. « On crée une confusion grave en amalgamant “logement social” et “logement abordable”. Il n’y a rien pour le logement social, et “logement abordable”, ça ne veut rien dire. On détourne de l’argent public qui devrait aller au logement social pour pallier l’érosion du parc locatif privé plus abordable », a-t-il déploré.

Radio-Canada avait révélé lundi que la construction et la rénovation de près de 6000 logements sociaux étaient en péril à Montréal en raison d’une mésentente entre les gouvernements provincial et fédéral. En conférence de presse, la ministre Laforest a rejeté le blâme sur Ottawa, mais affirme que la signature d’une entente est imminente.

« J’ai écho que les deux paliers se parlent […] et c’est tant mieux. Cette question-là doit absolument se régler le plus rapidement possible, au plus tard avant le début de la campagne électorale à la fin août », a dit Mme Plante à ce sujet.