(Québec) La session parlementaire qui s’est terminée vendredi à Québec marque le début d’une longue (pré) campagne électorale. François Legault a demandé à ses ministres de cesser les annonces gouvernementales à compter du 1er juillet pour se concentrer tout l’été sur leurs engagements en vue de l’élection. Les partis d’oppositions, malgré les sondages qui favorisent pour l’instant la Coalition avenir Québec (CAQ), jurent qu’ils n’ont pas dit leur dernier mot.

Legault veut un mandat fort, comme Doug Ford 

François Legault veut un « mandat fort ». Fort à quel point, alors que la CAQ comptait déjà une majorité de députés à l’Assemblée nationale (76 élus, très exactement), le premier ministre ne le dit pas. Seul indice : Doug Forg, qui a été réélu au début du mois de juin en renforçant sa majorité à Queen’s Park, en Ontario, « il a eu un mandat fort », malgré un faible taux de participation. D’ici au jour du scrutin, le 3 octobre prochain, M. Legault s’attend à parler d’économie et d’inflation. Il termine un premier mandat au gouvernement en défendant son bilan, marqué par la pandémie. En santé, même s’il n’a pas rempli sa promesse d’assurer à tous les Québécois une prise en charge par un médecin, il rappelle que l’entente qui lie Québec aux omnipraticiens se termine en 2023. Ensuite, « on est capable d’arriver à changer le réseau de la santé ». Aux Québécois qui s’inquiètent de l’inflation, François Legault leur promet un nouveau chèque cet automne pour les aider avec les prix qui ne cessent de monter, si les électeurs le choisissent à nouveau, précise-t-il. « Je ne prends rien pour acquis », a répété plusieurs fois le chef caquiste, vendredi. Il s’attend à ce que le gouvernement Trudeau aide le Parti libéral du Québec (PLQ) en campagne électorale. Ce serait de bonne guerre : François Legault a lui-même incité les Québécois à bouder le Parti libéral du Canada lors des dernières élections canadiennes. Face à Ottawa, le premier ministre québécois souhaite toujours rapatrier tous les pouvoirs en immigration. Dans son point de presse, il a cité une étude commandée par son parti au démographe Marc Termote, qui recommandait que le Québec détienne ces pouvoirs. Mais ce même démographe soulignait aussi que le Québec devrait accueillir 58 000 immigrants par année, pour éviter un déclin démographique. Le premier ministre préfère ne pas s’attarder sur ce point. Après tout, il a promis de ne pas augmenter le seuil d’immigration à plus de 50 000 nouveaux arrivants par année au cours d’un potentiel second mandat.

Dominique Anglade veut une majorité 

Photo Jacques Boissinot, La Presse Canadienne

La cheffe du Parti libéral, Dominique Anglade

Alors qu’elle est elle-même en danger dans sa circonscription selon les projections de Québec125, un modèle statistique basé sur les projections électorales, la cheffe du Parti libéral, Dominique Anglade, ne vise rien de moins qu’une majorité lors des prochaines élections. « Très confiante. Puis, si vous voulez un chiffre exact, je vais vous dire 63 », a-t-elle répondu à la question sur le résultat attendu au 3 octobre. Elle reconnaît « le défi » devant elle tandis qu’elle peine à faire bouger l’aiguille en sa faveur. La fin de session a d’ailleurs été marquée par son absence au Salon bleu, alors qu’elle cherche à combler son déficit de popularité en se rendant sur le terrain. Elle répond avoir trouvé « un équilibre ». Le bilan libéral marquait par ailleurs la fin d’une ère puisque la moitié du caucus, dont plusieurs ténors qui ont été ministres, ne sollicite pas de nouveau mandat. L’ambiance était à la fête vendredi au Parlement alors que des élus et employés politiques libéraux ont entonné le Ô Canada (en français et anglais) et Gens du pays. Des chants assez forts pour les entendre pendant le bilan de Québec solidaire.

Québec solidaire veut faire des gains

Photo Jacques Boissinot, La Presse Canadienne

Le chef parlementaire de Québec solidaire, Gabriel Nadeau-Dubois

Malgré les sondages défavorables, le chef parlementaire de Québec solidaire, Gabriel Nadeau-Dubois, s’attend à faire des gains en campagne électorale. « On ne fait pas ça pour participer, ce n’est pas la ligue de hockey communautaire. On est là pour gagner. On veut faire des gains, on veut conserver nos 10 circonscriptions et faire élire la plus grande équipe qu’on a jamais eue », a lancé M. Nadeau-Dubois, qui part en campagne « la tête haute ». « Qui a déstabilisé François Legault dans les dernières années ? C’est Québec solidaire », s’est-il vanté. Le jeune politicien devra toutefois convaincre les Québécois qu’il n’est plus le jeune leader étudiant polarisant de 2012. En campagne, ils vont découvrir « une personne qui a pris de l’expérience, qui a pris de la maturité », a-t-il dit. La députée sortante Catherine Dorion n’a pas participé aux au revoir officiels avec ses collègues.

« Rien n’est joué », dit le Parti québécois 

Photo Jacques Boissinot, La Presse Canadienne

Le chef du Parti québécois, Paul St-Pierre Plamondon

Tandis que les sondages le placent dans un creux historique, le PQ a lancé vendredi un ultime appel aux souverainistes : « l’élection n’a pas eu lieu et l’élection n’est pas jouée », a déclaré le chef Paul St-Pierre Plamondon. Il refuse de voir cet appel comme un message de désespoir. « Je trouve que c’est le rôle, aussi, du Parti québécois d’être dans le registre de l’espoir », a-t-il plaidé. Malgré les temps durs, Paul St-Pierre Plamondon promet de mener une campagne « vigoureuse, énergique et sentie », pendant laquelle il veut avoir du « fun ». Lui qui a affirmé lors de son élection qu’il serait chef pour longtemps n’a pas voulu répondre à la question s’il allait rester, advenant une défaite. La contribution de Véronique Hivon à la création de Tribunaux spécialisés en violence sexuelle et celle de Sylvain Gaudreault en matière d’environnement ont été soulignées comme de bons coups de la session.

Les conservateurs veulent faire entrer la « grogne »

PHOTO YAN DOUBLET, ARCHIVES LE SOLEIL

Le chef du Parti conservateur du Québec, Eric Duhaime

Le chef du Parti conservateur du Québec (PCQ) espérait amener la « grogne » au Parlement lors de l’entrée de la formation politique à l’Assemblée nationale, en juin 2021. Éric Duhaime affirme avoir réussi son pari, même s’il pourrait perdre son seul et unique siège en octobre. « Notre objectif, c’était justement de prendre toute cette grogne qui était à l’extérieur du Parlement puis de la faire entrer dans les murs du Parlement », a dit M. Duhaime jeudi. Le chef a rappelé le projet de loi 898 pour mettre fin à l’état d’urgence sanitaire, déposé sans succès par l’unique députée du PCQ, Claire Samson, qui ne se représente pas. Il cite aussi le nombre de membres du parti, qui a explosé. Il y en aurait 59 000 aujourd’hui. Cette première session parlementaire aura aussi permis à M. Duhaime de tenir des conférences de presse au Parlement. Il a aussi été invité au débat des chefs en vue des prochaines élections, autant de petites victoires, selon lui.

Avec Gabriel Béland, La Presse