(Québec ) Le Parti québécois et le Parti libéral du Québec réclament la dissolution de l’Unité permanente anticorruption (UPAC) après les révélations voulant que l’ex-commissaire Robert Lafrenière ait « orchestré un système de fuites » à des fins personnelles.

Pour le Parti québécois, « on peut difficilement remettre la pâte à dents dans le tube » et passer l’éponge sur l’administration de l’UPAC malgré l’arrivée d’une nouvelle garde. « Si, à l’époque, c’était une police politique ? La réponse, c’est oui. Et le fait qu’on ait encore des gens qui étaient là à l’époque, qui sont là présentement à l’UPAC, nous invite à croire que rien n’a changé », a fait valoir le député péquiste Martin Ouellet.

Le chef Paul St-Pierre Plamondon va plus loin et réclame que « la responsabilité pénale des gens qui ont posé ces gestes-là » soit démontrée. Le Parti québécois affirme que l’on a maintenant « des indications » que les fuites seraient venues de M. Lafrenière et d’autres membres de l’organisation. Si ces éléments se confirment dans l’enquête Projet Serment du Bureau des enquêtes indépendantes (BEI), ces gens doivent être « traduits en justice ».

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Paul St-Pierre Plamondon, chef du Parti québécois

« Il y a des enquêtes en cours, mais il me semble qu’il y a une seule certitude sur laquelle on doit tous être d’accord : si quelqu’un a manipulé le système de justice et a posé des gestes de manière à corrompre notre processus policier et notre processus de justice, il va falloir qu’il y ait des coupables. Il va falloir qu’il y ait des responsables, à tout le moins pour cette petite partie là », a fait valoir le chef péquiste.

Mardi, le premier ministre François Legault a rappelé que l’ex-commissaire Robert Lafrenière avait « été choisi par le gouvernement libéral » et que l’opposition dont il faisait partie à l’époque avait demandé que la nomination du prochain commissaire se fasse avec l’appui des deux tiers des députés de l’Assemblée nationale. « C’est ce qu’on a fait », a lancé brièvement M. Legault, affirmant que la direction de l’UPAC avait été changée.

Les Québécois n'ont plus confiance, selon Mme Anglade

La cheffe libérale Dominique Anglade demande elle aussi que l’UPAC, un corps policier pourtant créé sous le règne du PLQ de Jean Charest en 2011, soit dissoute. « On a [aujourd’hui] des informations qu’on n’avait pas à l’époque », a plaidé Mme Anglade, qui maintient que le gouvernement libéral de Philippe Couillard « n’avait pas de pression » pour reconduire M. Lafrenière à la tête de l’UPAC en 2016.

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Dominique Anglade

Elle a affirmé néanmoins que l’arrestation de l’ex-vice-première ministre Nathalie Normandeau, le jour du dépôt du budget provincial en 2016, avait éveillé des « soupçons » quant à savoir s’il s’agissait d’un geste « politique ». « Évidemment que ça soulève des questions, mais tu ne peux pas te baser sur des soupçons, tu dois te baser sur des faits [à la fin] », a-t-elle nuancé.

Selon Mme Anglade, les Québécois n’ont plus confiance en l’UPAC et celle-ci devrait être démantelée. « J’ai de la misère à voir la pertinence de l’institution, et c’est à eux de faire la démonstration de leur pertinence », a-t-elle indiqué mardi devant les journalistes.

Le juge de la Cour du Québec André Perreault, dans sa décision de septembre 2020 ordonnant l’arrêt du processus judiciaire pour délais déraisonnables dans la cause de Mme Normandeau, a écrit que Robert Lafrenière aurait « orchestré un système de fuites » d’informations sensibles afin de faire avancer ses intérêts personnels. Ces informations ont été rendues publiques lundi seulement.

En entrevue avec La Presse jeudi dernier, Robert Lafrenière a nié les allégations et promis de défendre sa réputation.

Selon Québec solidaire, il faut encore donner la chance au coureur alors que le nouveau commissaire, Frédérick Gaudreau, s’est donné en 2021 trois ans pour mettre fin à la « crise de confiance » qui ébranle son organisation. « Est-ce qu’on a fait le tour du jardin ? Je ne crois pas. Est-ce qu’on laisse la chance d’atterrir à l’UPAC 2.0 ? […] Oui », a expliqué la co-porte-parole de la formation, Manon Massé.