(Drummondville) Le premier ministre François Legault donne déjà le ton de sa campagne électorale. Il met en garde les Québécois contre « les idéologues de gauche ou de droite » et le risque que le Québec devienne « une Louisiane » si Ottawa ne lui cède pas les pleins pouvoirs en immigration.

François Legault a révélé dimanche les grandes lignes de son plaidoyer électoral à la clôture du congrès de son parti, entouré de ses députés et de nombreux candidats dont sa nouvelle recrue Sonia Bélanger, PDG du CIUSSS du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal. La campagne sera lancée officiellement dans trois mois, en vue du scrutin du 3 octobre.

Dans un discours à forte saveur nationaliste, François Legault a mis le paquet pour souligner l’importance du rapatriement à Québec des pouvoirs en immigration, une demande que le gouvernement Trudeau a toujours rejetée. Un affrontement se dessine clairement.

« Je demande, aux prochaines élections, un mandat fort pour aller négocier ça avec le gouvernement fédéral. C’est une question de survie pour notre nation ! », a-t-il lancé, déclenchant une ovation.

Il demeure toutefois flou sur sa stratégie pour obtenir gain de cause devant la fin de non-recevoir du fédéral.

« Ce n’est pas dans les plans » qu’il tienne un référendum sur cet enjeu comme des militants l’ont suggéré au congrès. « Ce que j’ai besoin, c’est d’aller chercher un rapport de force en ayant l’appui du plus de Québécois possible » lors des élections, a-t-il martelé en conférence de presse. Il a évoqué que la tenue d’États généraux ou d’une commission de style Bélanger-Campeau fait partie des moyens possibles pour mobiliser la population autour de l’enjeu.

Il a « confiance de convaincre un des partis fédéraux qui a la possibilité de former le prochain gouvernement » d’acquiescer à sa demande. Tous les partis ont tout intérêt à le faire pour avoir l’appui des Québécois, a-t-il fait valoir alors que Justin Trudeau a été réélu l’automne dernier en rejetant sa revendication.

Pour lui, la situation « va évoluer » sur la scène fédérale et pourrait jouer en sa faveur. Justin Trudeau, « est-ce qu’il va être là » encore dans les prochaines années ? a-t-il soulevé.

Il dit agir de « bonne foi » car « il n’est pas question que François Legault tienne un référendum sur la souveraineté ».

Selon lui, « c’est important que les Québécois comprennent bien l’urgence de rapatrier les pouvoirs en immigration ». Si le Québec ne les obtient pas, « ça peut devenir une question de temps avant qu’on devienne une Louisiane », a-t-il soutenu.

Il a plaidé que 43 % des nouveaux arrivants sont choisis par Ottawa – 26 % sont issus du programme de réunification familiale et la moitié d’entre eux ne parle pas le français.

François Legault demande également aux Québécois de le réélire pour faire face à l’instabilité qui se profile en raison de l’inflation, de la guerre en Ukraine et d’une possible récession mondiale.

C’est à ce moment qu’il a décoché des flèches vers Québec solidaire et le Parti conservateur sans les nommer, ignorant libéraux et péquistes dans son discours.

« Il y a les oppositions de gauche et de droite. D’un côté, il y a ceux qui pensent que l’argent pousse dans les arbres. […] Et de l’autre côté, il y a ceux pour qui les changements climatiques, ça ne compte pas, […] que ce n’est pas important de bâtir une économie verte », a affirmé M. Legault.

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« Quand les temps sont pleins d’incertitudes, de turbulences et de dangers économiques, ce n’est pas le temps de se lancer dans des aventures avec des idéologues de gauche ou de droite. En fait, quand la mer est houleuse, c’est le temps de confier la barre à une équipe compétente, expérimentée et solide », a-t-il ajouté sous des applaudissements nourris.

Après le fameux chèque de 500 $ versé plus tôt cette année, il a promis de donner une bouffée d’oxygène aux contribuables s’il est réélu.

« Un gouvernement de la CAQ ne va pas vous laisser tomber face à l’inflation et va continuer de vous donner les moyens de passer au travers, c’est un engagement que je prends aujourd’hui », a-t-il dit.

Au cours des dernières semaines, François Legault a laissé entendre qu’il promettra des baisses des impôts au cours de la campagne électorale.

Le Québec est « plus fier » et « plus prospère » qu’en 2018, les deux éléments les plus importants pour « évaluer [son] bilan », selon lui. Il a rappelé, d’un côté, l’adoption des lois 21 sur la laïcité de l’État et 96 sur le français et, de l’autre, le bas taux de chômage tout comme les allègements financiers accordés par son gouvernement au cours du mandat. Il ne faut pas « casser cet élan en changeant de gouvernement », a-t-il insisté, avec le slogan « Plus que jamais » affiché sur des écrans géants.

Après avoir plaidé qu’il a « développé notre cohésion nationale » avec les lois 21 et 96, il a prononcé quelques phrases en anglais pour tenter de rassurer la minorité linguistique : « Je sais qu’il y en a qui rajoutent de l’huile sur le feu en prétendant que la loi 96 empêchera les Québécois anglophones de recevoir des soins de santé en anglais. Nous nous engageons à protéger votre accès aux soins de santé. »