(Ottawa) La Cour suprême décidera jeudi si elle entend la cause de Janick Murray-Hall sur la culture du cannabis à domicile, interdite au Québec. L’homme qui s’est fait connaître par le site satirique Journal de Mourréal conteste la constitutionnalité de deux articles de la loi québécoise.

« On a pénalisé ce qui venait d’être légalisé », a résumé son avocat Maxime Guérin en entrevue. Il estime que le gouvernement québécois a outrepassé ses compétences en interdisant la possession et la culture de cannabis à des fins personnelles, pourtant autorisées par le gouvernement fédéral.

La Cour d’appel a infirmé en septembre un jugement de première instance qui avait d’abord invalidé deux articles de la loi québécoise. La cour estime que la loi fédérale et la loi québécoise sont complémentaires et que, par conséquent, les objectifs du gouvernement du Québec « sont en harmonie » avec ceux du gouvernement fédéral.

L’État québécois avait fait valoir que sa loi visait à réduire les méfaits du cannabis pour protéger la santé et la sécurité des citoyens, particulièrement les jeunes, et d’éviter une brèche dans le monopole de la Société québécoise du cannabis (SQDC).

« Je ne vois pas en quoi quelqu’un qui fait pousser quatre plans va brimer le monopole de la SQDC, a fait valoir MGuérin. Est-ce que de permettre à M. ou Mme Tout-le-Monde de faire son vin ou sa propre bière chez soi brime le monopole de la SAQ ? Poser la question, c’est un peu y répondre. »

Il s’attaque plutôt à la constitutionnalité des articles 5 et 10 de la loi québécoise qui interdisent respectivement d’avoir en sa possession une plante de cannabis et d’en faire la culture à des fins personnelles. La loi fédérale autorise tout individu majeur à avoir quatre plantes de cannabis à la maison.

Cet argument avait d’abord convaincu la juge Manon Lavoie de la Cour supérieure qui avait invalidé les deux articles en septembre 2019 parce qu’ils « empiètent de façon importante sur la compétence fédérale en matière criminelle ».

Si la Cour suprême refuse d’entendre la cause jeudi, les articles de la loi québécoise demeureront valides et cela mettra fin aux procédures judiciaires. À l’inverse, un éventuel jugement aurait des répercussions ailleurs au pays.

Le Québec n’est pas la seule province à faire face à une contestation judiciaire pour avoir interdit la culture du cannabis à domicile. Un homme du nom de Jesse Lavoie conteste une loi similaire au Manitoba. La cause doit être entendue en mai par un juge de première instance.

La Loi encadrant le cannabis au Québec et la Loi sur le cannabis à Ottawa avaient été adoptées à une semaine d’intervalle en juin 2018. La légalisation du cannabis était l’une des promesses phares du premier ministre Justin Trudeau lors de son premier mandat. Elle est entrée en vigueur le 17 octobre 2018.

Le ministre de la Justice et procureur général du Québec, Simon Jolin-Barrette, a refusé notre demande d’entrevue, préférant réserver ses commentaires une fois que les procédures judiciaires seront terminées.