Le poids politique du Québec sera protégé dans le redécoupage électoral en vue au Canada. Une forte majorité d’élus fédéraux se sont positionnés mercredi en faveur d’une motion réclamant que le Québec ne perde aucune circonscription.

Sur les 324 élus ayant participé au vote, 261 se sont prononcés en faveur de la motion déposée par le chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet, voulant que « tout scénario de redécoupage de la carte électorale fédérale qui aurait pour effet de faire perdre une ou des circonscriptions au Québec ou de diminuer le poids politique du Québec à la Chambre des communes [doive] être rejeté ».

Tous les élus libéraux ont voté pour à l’exception d’un seul, le député ontarien de Scarborough–Guildwood, John McKay. La motion divise aussi fortement le caucus conservateur : tous les élus québécois ont voté pour, mais bon nombre de députés de l’Ouest canadien s’y sont opposés. Les néo-démocrates présents, eux, ont tous voté pour.

« C’est clairement un gain pour le Québec. Ç’a été adopté de façon lourde, très majoritaire », a réagi M. Blanchet en point de presse, peu après. « Ça ne termine pas le débat, ça ouvre la discussion », a-t-il toutefois nuancé, disant espérer « être capable de faire cheminer plus loin » son projet de loi sur la question, déposé au début de février.

Sa motion avait été déposée dans la foulée d’une proposition récente d’Élections Canada selon laquelle le nombre de sièges aux Communes devrait passer de 338 à 342 dès 2024 pour tenir compte des changements dans la population. L’Ontario et la Colombie-Britannique, qui détiennent 121 et 42 sièges, devraient en obtenir 1 de plus chacun. L’Alberta, qui a 34 sièges, devrait en obtenir 3 de plus. Le Québec, lui, devrait en principe perdre 1 de ses 78 sièges, parce que sa population croît à un rythme moins élevé.

Dans les derniers mois, cette nouvelle répartition des sièges avait provoqué de vives réactions. Le gouvernement Legault était monté au créneau, tandis que Justin Trudeau s’était contenté de dire qu’il ne s’agissait que d’une recommandation.

« Aucune province ne devrait perdre de sièges. Les conservateurs vont continuer de défendre les intérêts des Québécois et des Canadiens », a promis le chef adjoint et lieutenant pour le Québec des conservateurs, Luc Berthold, qui avait déposé une motion très similaire sur le poids politique de la province mercredi, sans toutefois obtenir de consentement.

Une « législation » en vue ?

Avant le vote, mercredi, plusieurs élus libéraux québécois avaient ouvert la porte à la révision du cadre juridique. « Ce qui est très important est de garder 78 sièges pour le Québec. Et pour le reste, on verra avec Élections Canada comment on peut faire ça légalement et que ce soit bien fait », a illustré le député d’Argenteuil–La Petite-Nation, Stéphane Lauzon.

La députée de Brossard–Saint-Lambert, Alexandra Mendès, a aussi estimé qu’il y aurait un travail de « rééquilibrage » à faire. « On ne peut pas non plus augmenter sans cesse la Chambre des communes. […] Tout ça va être mesuré dans une éventuelle législation qui sera proposée », a-t-elle dit, promettant toutefois pour sa part d’appuyer la motion des bloquistes.

Le ministre François-Philippe Champagne, élu dans Saint-Maurice–Champlain, a quant à lui jugé que le poids politique du Québec était « une question importante pour l’ensemble du caucus libéral ». « L’ensemble des gens ici veulent que le Québec ait une place spéciale. Et on veut continuer dans cette vision-là », a-t-il noté, prudemment. « Évidemment, on a des changements dans la population canadienne, et toute démocratie doit en tenir compte. Mais il est clair aussi que nous devons être sensibles outre mesure au fait français et à la situation du Québec », a enfin expliqué le député de Gatineau, Steven MacKinnon.