(Québec) Québec ouvre sa porte aux réfugiés ukrainiens et promet de soutenir « à 100 % » les décisions que prendra le gouvernement Trudeau dans sa riposte contre le régime de Vladimir Poutine. Le gouvernement Legault se prépare également à une hausse encore plus importante de l’inflation.

Le gouvernement Legault se prépare déjà à accueillir des réfugiés ukrainiens, a confirmé jeudi la ministre des Relations internationales et de la Francophonie, Nadine Girault. « Ça peut être de l’aide humanitaire, de la solidarité. On peut débloquer des fonds aussi », a brièvement énuméré la ministre. Évidemment, il est encore trop tôt pour savoir combien de réfugiés le Québec pourrait accueillir.

Le premier ministre a aussi confirmé que le Québec ferait sa part pour aider les réfugiés pendant « les mois à venir ». Dans une publication Facebook, François Legault a condamné « fermement l’agression russe en Ukraine ». En point de presse à Maniwaki en fin d’après-midi, il a ajouté que le Québec avait « toujours fait [sa] part quand il y a eu des conflits à l’étranger pour accueillir sa part de réfugiés. On va faire notre part ».

« On a beaucoup parlé de liberté dans les derniers mois. Il y a un vrai problème de liberté pour le peuple ukrainien. C’est totalement inacceptable, ce que fait le président Poutine. On va appuyer Justin Trudeau et le gouvernement fédéral pour mettre en place toutes les mesures de répression, entre autres économique, pour cesser de faire des affaires avec la Russie », a lancé le premier ministre. Il espère que ces sanctions économiques mettront assez de « pression » pour qu’un cessez-le-feu soit observé.

Ce qu’il a fait, Vladimir Poutine, c’est qu’il a déguisé une guerre en mission de paix. C’est carrément ça qu’il a fait. C’est inacceptable, ça n’a aucun sens.

Nadine Girault, ministre des Relations internationales

Le gouvernement Legault a indiqué se ranger « à 100 % » derrière les décisions à venir du gouvernement Trudeau. « Le fédéral va décider comment il va répondre au niveau du Canada, et nous, on va supporter cette décision », a soutenu de son côté Mme Girault. Québec ne demande pas non plus aux diplomates russes de quitter la province.

« Un jour sombre pour la démocratie »

Les partis de l’opposition ont tous exprimé jeudi leur solidarité envers le peuple ukrainien. « C’est un jour sombre pour la démocratie de l’Occident », a déploré le chef parlementaire du Parti québécois, Joël Arsenault. « Ce qu’on souhaite, c’est que l’OTAN et les pays d’Europe comme de l’Amérique du Nord se réunissent et imposent les sanctions les plus fortes », a-t-il ajouté.

« On assiste à des scènes extrêmement, extrêmement inquiétantes », a réagi le chef parlementaire de Québec solidaire, Gabriel Nadeau-Dubois. « C’est des scènes qui sont inédites depuis la Seconde Guerre mondiale. Une agression, comme ça, d’un pays souverain, d’un État démocratique, c’est inédit. »

Mercredi, l’Assemblée nationale a exprimé d’une seule voix toute sa sympathie pour le peuple ukrainien en adoptant une motion de soutien et de solidarité qui invitait les élus à affirmer leur « solidarité avec le peuple ukrainien, ainsi qu’avec la très nombreuse diaspora présente au Québec, et en particulier à Montréal ». Le Québec compte pas moins de 40 000 personnes d’origine ukrainienne.

Inflation et incertitudes

Le déclenchement d’une guerre sur le sol européen par Vladimir Poutine aura des conséquences sur l’économie mondiale et celle du Québec, préviennent par ailleurs les ministres de l’Économie et des Finances, Pierre Fitzgibbon et Eric Girard. « Nos préoccupations sont avec les populations. Les développements des dernières heures sont préoccupants, et ça crée de l’incertitude. On le voit dans les marchés financiers », a noté M. Girard en mêlée de presse.

Il souligne que la Russie est un « important producteur d’énergie », que la guerre aura une incidence sur les prix du pétrole et du gaz. « Ça crée de l’inflation et ça pourrait ralentir l’économie mondiale », a souligné M. Girard. Il a ajouté que le Québec était prêt à appliquer les sanctions économiques qui seront annoncées par le gouvernement fédéral.

M. Fitzgibbon a affirmé de son côté que le Québec soutiendrait les entreprises québécoises qui seraient touchées par un éventuel embargo, et qui ont soit « une dépendance envers l’Ukraine ou la Russie ». Il estime qu’il faut se méfier de la Russie et de la Chine, « deux puissances avec lesquelles il faut faire attention ». Il s’agit, selon lui, d’une raison additionnelle de renforcer l’autosuffisance du Québec.

Une inflation encore plus importante, craint Leitão

L’ancien ministre des Finances et député libéral Carlos Leitão est également très inquiet de la situation. « Nous sommes vraiment extrêmement compatissants avec les Ukrainiens du Canada et les Ukrainiens en Ukraine. Ce qui est aussi important, c’est que cette tension internationale, qui monte à cause de l’invasion russe, a un effet sur les prix de l’énergie », a-t-il dit.

À son avis, dans quelques mois, les Québécois se souviendront de l’époque où l’inflation n’était qu’à 5 % comme étant « le bon vieux temps ».

« Ça va aller beaucoup plus que ça dans les mois à venir », a-t-il dit. Les citoyens québécois feront face, dit-il, à « une situation qui se détériore, qui se dégrade rapidement ».

Autre incertitude soulevée par le prévisionniste Leitão : l’invasion russe pourrait perturber considérablement les relations commerciales internationales. « Qu’est-ce que la Chine va faire ? Comment la Chine va réagir ? Est-ce que le commerce international va continuer de circuler librement quand il y avait déjà toutes sortes d’entraves avant ? Donc, ça se complexifie beaucoup », a-t-il dit.

Bien que les sanctions économiques soient nécessaires pour punir la Russie, elles risquent également de créer davantage de « pénuries de toutes sortes de composantes ». Cette crise pourrait même faire « dérailler la reprise économique », craint-il.

Avec La Presse Canadienne