(Québec) Le gouvernement Legault s’engage dans un bras de fer avec l’industrie gazière en déposant ce mercredi son projet de loi pour mettre fin à la recherche et à la production d’hydrocarbures. Celle-ci lui réclamera au moins 500 millions en compensation.

Ces 500 millions sont une estimation des dépenses des entreprises depuis 15 ans pour explorer le potentiel gazier et pétrolier du Québec, et circulent dans l’industrie. « C’est une approximation », explique Mario Lévesque, président de Ressources Utica. Elle est considérée comme un strict minimum par M. Lévesque, qui fait une comparaison avec les propriétaires de permis de taxi, qui ont touché une indemnité lorsque le gouvernement Legault les a fait disparaître.

Mais dans les faits, il souhaite recevoir un montant plus important qu’un simple remboursement de dépenses. « On a des certificats de découvertes dûment enregistrés. S’ils ferment l’industrie avec une loi, je vais considérer ça comme une expropriation », a-t-il dit.

Le président de l’Association de l’énergie du Québec (AEQ), Éric Tétrault, renchérit. « Si vous gagnez à la loterie et qu’on vous rembourse seulement votre billet, ce n’est pas une compensation, c’est une confiscation », indique-t-il dans une réponse écrite. Il estime que le montant de l’indemnité pourrait « probablement » se chiffrer en milliards de dollars. Les entreprises n’ont pas encore fait leurs comptes.

Il ne saurait y avoir de compensations sans indemnisations pour tous les bénéfices perdus dans les 15 dernières années.

Éric Tétrault, président de l’Association de l’énergie du Québec

Du gaz propre ?

Mais avant tout, l’AEQ tentera de convaincre une dernière fois que le gouvernement doit renoncer à ce projet de loi. Elle mettra sur la table deux études pour appuyer son point de vue. La première, pilotée par le Centre international de référence sur le cycle de vie des produits, procédés et services de Polytechnique Montréal, montre que l’importation à 100 % du gaz naturel des États-Unis et de l’Ouest canadien créera trois fois plus d’émissions globales que s’il était produit au Québec avec une « technologie zéro émission ».

Cette technologie, dont la société gazière albertaine Questerre fait la promotion, vise à capturer et stocker le carbone émis par l’exploitation du gaz naturel. Elle a d’ailleurs récemment signé une entente avec le Conseil de la Première Nation des Abénakis de Wôlinak dont l’objectif est de développer « un centre énergétique à émissions nettes nulles » dans le secteur de Bécancour.

Une deuxième étude, celle-ci de KPMG, démontrerait que le gouvernement du Québec « recevrait des bénéfices allant de 150 à 300 millions par année avec son gaz naturel », plaide l’AEQ, qui estime également qu’une « production québécoise de même volume que celle que l’on importe créerait 6000 emplois très bien rémunérés ».

Autre carte dans la manche de l’AEQ : elle fera valoir la « prépondérance du principe d’autodétermination des peuples autochtones tel que reconnu par la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones et le Cadre de reconnaissance et de mise en œuvre du gouvernement canadien adopté en juin dernier ». « Ce principe stipule clairement que les peuples autochtones ont des droits sur les ressources naturelles situées sur leurs terres ancestrales », souligne l’AEQ.

Le premier ministre François Legault, de son côté, avait affirmé en décembre dernier qu’il souhaitait « le moins possible de compensations » pour l’industrie. À l’automne, son gouvernement évoquait des ententes au cas par cas avec les entreprises.

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    Nombre de permis d’exploration des hydrocarbures en vigueur au Québec
    SOURCE : MINISTÈRE DE L’ÉNERGIE ET DES RESSOURCES NATURELLES