(Ottawa) Le premier ministre Justin Trudeau compte sur le Bloc québécois et le Nouveau Parti démocratique (NPD) pour aider son gouvernement minoritaire à faire avancer des dossiers. Il anticipe de l’obstructionnisme systématique de la part des conservateurs.

Dans une entrevue à La Presse Canadienne, avant la reprise des travaux parlementaires, lundi, M. Trudeau a indiqué qu’il ne voulait pas seulement que les partis d’opposition plus compatibles sur le plan idéologique appuient l’adoption des projets de loi du gouvernement.

Il veut qu’ils appuient les mesures visant à interrompre le débat et à forcer le vote sur les projets de loi si les conservateurs recourent à des stratagèmes pour bloquer le cheminement de projets de loi, comme ils l’ont souvent fait lors de son premier mandat minoritaire.

« Nous le savons et nous l’avons vu, les conservateurs vont continuer d’essayer de jouer à tous les jeux partisans qu’ils peuvent, peu importe les conséquences sur les Canadiens. Ils sont beaucoup plus axés sur leurs propres intérêts en ce moment qu’ils ne le sont sur les intérêts des Canadiens », a-t-il déclaré.

Il a dit être ouvert à travailler avec les autres partis et à écouter leurs priorités.

Au cours de la dernière législature, tous les partis se sont réunis pour adopter rapidement des lois créant des centaines de milliards de dollars d’aide d’urgence pour aider les particuliers et les entreprises à rester à flot pendant la pandémie de COVID-19.

Mais sur d’autres sujets, les conservateurs ont régulièrement utilisé des manœuvres procédurales pour retarder ou empêcher l’avancement des projets de loi. Les libéraux se sont plaints d’obstructionnisme, mais les conservateurs ont reproché au gouvernement de ne pas gérer son propre programme et les autres partis d’opposition, généralement réticents à aider le gouvernement à écourter le débat, ont tacitement suivi.

Finalement, même le NPD et le Bloc sont devenus frustrés par les tactiques conservatrices et, vers la fin de la session, ils ont appuyé la clôture de quelques projets de loi qu’ils considéraient comme prioritaires, dans le but de les faire finalement adopter.

Leur soutien est arrivé trop tard pour que les projets en question – une interdiction des thérapies de conversion pour les Canadiens membres de la communauté LGBTQ+ et une réglementation des géants du de la diffusion en ligne – soient adoptés par le Sénat avant les vacances d’été. Ils sont finalement morts au feuilleton lorsque M. Trudeau a dissous le Parlement en août pour une élection anticipée.

M. Trudeau a espoir que les petits partis d’opposition seront moins susceptibles de laisser les conservateurs bloquer systématiquement le programme législatif du nouveau Parlement.

Il note qu’au cours des brèves quatre semaines ou le nouveau Parlement minoritaire a siégé avant Noël, les libéraux ont présenté trois projets de loi prioritaires qu’ils voulaient voir promulgués avant la pause des Fêtes : un interdisant les thérapies de conversion, un autre créant de nouveaux programmes d’aide ciblés en cas de pandémie et un dernier mettant en œuvre des congés de maladie payés pour les travailleurs fédéraux et réprimant le harcèlement des travailleurs de la santé.

Tous les trois ont passé les étapes de la Chambre des communes et du Sénat à une vitesse fulgurante. En cours de route, le NPD a appuyé la clôture des débats pour forcer un vote sur la reprise des séances hybrides de la Chambre et en a fait de même pour écourter le débat sur le projet de loi sur les congés de maladie.

« Le fait que nous ayons pu travailler en collaboration avec deux des partis de l’opposition pour faire de grandes choses est un signe vraiment positif », a dit M. Trudeau.

En fait, ce sont les conservateurs qui ont fait adopter le projet de loi sur la thérapie de conversion sans débat ni vote, une surprise étant donné qu’une majorité d’entre eux avaient voté contre la version précédente. Mais c’était une décision stratégique conçue pour éviter un deuxième combat perdu sur une question qui avait ouvert les conservateurs à des accusations d’être anti-LGBTQ+ – et non ce que les libéraux considèrent comme le signe avant-coureur d’une opposition officielle plus collaborative.

Au cours de la dernière législature, certaines des relations les plus houleuses entre les partis et les plus longues obstructions, y compris celles menées par les libéraux, ont eu lieu aux comités de la Chambre des communes.

Mais Trudeau espère que cela aussi changera au cours de la nouvelle session.

Peu avant le congé de Noël, les libéraux ont obtenu des appuis pour une motion qui modifie la règle de déclenchement d’une réunion d’urgence d’un comité. Au lieu que quatre membres du comité puissent insister pour qu’une réunion ait lieu, il doit maintenant y avoir quatre membres d’au moins deux partis différents.

« Nous avons fait en sorte que les conservateurs ne puissent pas être aussi obstructifs par eux-mêmes. Ils vont devoir trouver des partenaires actifs pour convoquer des comités », a-t-il déclaré.

Contrairement à la brève séance d’avant Noël, les libéraux ne présentent pas un nombre précis de projets de loi qu’ils veulent adopter d’ici la fin juin, lorsque le Parlement s’arrêtera pour l’été.

Mais M. Trudeau a clairement énoncé ses priorités d’ici là : traverser la pandémie, reconstruire l’économie, s’attaquer de manière plus forte aux changements climatiques, renforcer la loi sur les langues officielles, faire avancer la réconciliation avec les peuples autochtones, créer des mesures pour créer plus de logements abordables, offrir du soutien au secteur culturel, lutter contre la haine en ligne et obliger les géants de la diffusion en ligne comme Netflix à promouvoir et à soutenir financièrement le contenu canadien.