(Ottawa) Le projet de loi qui élargit l’accès à l’aide médicale à mourir est de nouveau engagé dans une course contre la montre et le ministre qui en est responsable promet de « remuer ciel et terre » pour le mener à terme, à temps.

Les sénateurs ont renvoyé le texte législatifamendé à la Chambre des communes. C-7 doit donc subir un nouvel examen des législateurs en moins de trois jours ouvrables.

La décision de la Cour supérieure du Québec, rendue en 2019, et qui déclare inconstitutionnelle la loi que C-7 ajuste, prendra effet le 26 février.

En offrant les plans sur son calendrier, comme il en est d’usage tous les jeudis après-midi aux Communes, le leader parlementaire du gouvernement Pablo Rodriguez a annoncé que les Communes étudieront les amendements à C-7 mardi.

Comme jeudi est réservé à un débat choisi par l’opposition, il ne restera que trois jours aux législateurs des deux Chambres pour finir le travail.

« Évidemment, je suis très conscient des délais », a déclaré le ministre fédéral de la Justice, David Lametti, jeudi après-midi, lors d’une conférence de presse tenue pour présenter un autre projet de loi.

« Comme d’habitude, je vais remuer ciel et terre pour qu’on arrive à la date limite avec une conclusion », a-t-il promis.

Il n’a pas voulu dire s’il serait prêt à demander un autre délai-ce serait le quatrième-avant l’entrée en vigueur du jugement de 2019.

Pour ce qui est des amendements des sénateurs, le ministre s’est contenté de dire qu’il les « analyse ».

Les sénateurs permettraient une demande anticipée d’aide médicale à mourir. Aussi, ils rendraient cette aide disponible aux personnes souffrant de maladie mentale, 18 mois après l’entrée en vigueur de C-7.

Le sort que les élus réserveront à ces deux amendements et aux trois autres ajoutés par le Sénat décidera du temps que prendra l’adoption finale du projet de loi.

Les bloquistes se disent « a priori » ouverts à ces deux amendements.

« C’est reçu avec la conscience que ce sont des propositions de compassion », a offert le chef bloquiste Yves-François Blanchet, au cours d’une conférence de presse jeudi matin, à Ottawa, tout en se désolant que cela vienne d’une « institution archaïque ».

Il a dit vouloir en discuter avec les membres de son caucus « mais, mon a priori est que ça devrait aller très bien du côté du Bloc québécois ».

M. Blanchet se dit convaincu qu’il est possible que C-7 devienne loi avant le 26 février, avec « un minimum de collaboration » et « de bonne foi » de la part de tous.

Les néo-démocrates n’ont pas encore officiellement rejeté la version sénatoriale du projet de loi, mais ils ont exprimé, à répétition, leur allergie à l’institution du Sénat.

« A priori, nous ne sommes pas fervents à l’idée de voir le Sénat élargir de manière significative des projets de loi », déclarait, dans un courriel, jeudi après-midi, le chef adjoint du Nouveau Parti démocratique (NPD), Alexandre Boulerice.

Les conservateurs, eux, ont exprimé clairement leur intention de ralentir l’adoption du projet de loi, comme ils l’ont fait en troisième lecture aux Communes. Ils veulent débattre à fond, disent-ils, et suggèrent que les députés siègent la nuit et les fins de semaine pour ce faire.

La majorité des députés conservateurs s’opposent au principe même de l’aide médicale à mourir.

Jeudi matin, leur chef Erin O’Toole s’en prenait à un des amendements des sénateurs.

« Nous avons des inquiétudes à propos de l’inclusion de la santé mentale dans le cadre d’un régime étatique d’aide à mourir », a-t-il dit.

Pendant ce temps, l’Association québécoise pour le droit de mourir dans la dignité (AQDMD) s’impatiente.

« L’association souhaite avant toute chose que le projet de loi C-7 soit adopté dès à présent, avec ou sans amendement, considérant que les patients sont dans l’urgence d’avoir un cadre juridique clair », peut-on lire dans un communiqué publié jeudi après-midi.

Le président de l’association, Georges L’Espérance, croit que les questions de maladie mentale et de demandes anticipées peuvent attendre la révision promise de la Loi sur l’aide médicale à mourir. Il craint qu’un autre débat sur ces questions ne génère « un processus d’allers-retours interminable entre la Chambre et le Sénat » et « un nouveau report de l’adoption de C-7 ».