(Ottawa) Les Jeux olympiques de Pékin devraient être repoussés d’un an, le temps qu’une mission d’observation internationale indépendante se rende au Xinjiang pour faire le point sur la situation des Ouïghours. Et si la Chine refuse l’accès ou que les constats d’une possible mission sont effarants, l’évènement devrait être relocalisé.

C’est ce qui est contenu dans la résolution que traîne dans sa valise le député bloquiste Alexis Brunelle-Duceppe, qui s’envole ce mercredi pour Prague afin de participer au sommet annuel du Congrès mondial ouïghour. Il a bon espoir que la motion y sera adoptée, ce qui lui permettrait de ramener l’enjeu sur le tapis de la Chambre des communes.

À trois mois de l’ouverture des Jeux, l’élu a dû changer de stratégie. Lui qui plaidait pour une relocalisation de l’évènement international – la proposition était contenue dans une motion qui a été adoptée à l’unanimité en février dernier à Ottawa – suggère désormais un report d’un an, de 2022 à 2023.

Il est arrivé, dans l’histoire, que des Jeux olympiques soient reportés. Dans un passé très récent, ceux de Tokyo l’ont été à quelques mois d’avis, en raison de la pandémie.

C’est faisable ! Et si on est capables de le faire pour une pandémie, expliquez-moi pour quelle raison on ne serait pas capables pour un génocide.

Alexis Brunelle-Duceppe, député bloquiste

Les fédérations sportives et les athlètes, en général, sont tièdes à l’idée d’un boycottage des Jeux – ce que cette résolution ne ferait pas, insiste le député – en disant notamment qu’il s’agit d’instrumentation politique. « C’est complètement l’inverse ! Je ne veux pas que nos athlètes soient utilisés par un régime tyrannique », offre l’élu en réplique.

PHOTO ANDRÉ PICHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Selon le député, les Jeux devraient être reportés, le temps qu’une mission d’observation internationale indépendante se rende au Xinjiang pour faire le point sur la situation des Ouïghours

Des obstacles

Le directeur exécutif de l’Uyghur Rights Advocacy Project, Mehmet Tothi, ne se prive pas d’établir un parallèle entre ces Jeux et ceux de Berlin, en 1936. « Adolf Hitler avait utilisé l’évènement pour glorifier son régime nazi. Et l’Holocauste ne s’était pas encore produit. Ici, le génocide des Ouïghours est en cours », avance-t-il.

Mais il est évident que les appels à la relocalisation ou au report de la grand-messe de Pékin se heurtent à l’opposition du Comité international olympique, où la Chine exerce une grande influence, et aux intérêts des multinationales qui veulent en tirer profit, dit M. Tothi.

N’empêche, à Prague, la résolution devrait être adoptée. Et ensuite, pour que le geste soit vraiment multilatéral, les autres parlementaires qui seront sur place – il y aura des représentants de plusieurs pays de l’Union européenne – seront invités à la soumettre à leur Parlement respectif.

Elle pourrait donc revenir à la Chambre des communes, dont les travaux reprennent le 22 novembre. En février dernier, tous les députés ont voté en faveur de la motion déposée par le conservateur Michael Chong – qui devrait aussi être dans la capitale tchèque cette semaine – à l’exception des ministres, qui se sont abstenus.

La Chine a été l’hôte des Jeux d’été de 2008. À l’époque, la communauté internationale était préoccupée par la répression des Tibétains.

L’ex-premier ministre Stephen Harper avait refusé de se rendre à la cérémonie d’ouverture, ce qui avait été critiqué à l’époque par le camp libéral. Deux ministres de son gouvernement s’étaient toutefois déplacés afin de prendre part à l’évènement.

Il n’a pas encore été décidé si la nouvelle ministre des Sports, Pascale St-Onge, fera le déplacement en Chine. La cérémonie d’ouverture des Jeux d’hiver est prévue le 4 février prochain.