(Québec) Le parti Québec solidaire est « colonialiste », car il s’oppose à la construction du tunnel Québec-Lévis, a affirmé vendredi Marie-Eve Proulx.

La députée caquiste de Côte-du-Sud a lancé cette accusation dans le cadre d’un débat de deux heures à l’Assemblée nationale au sujet du tunnel que veut construire son gouvernement.

Selon l’élue, refuser à sa région limitrophe cette infrastructure qui pourrait coûter dix milliards de dollars revient à dire « comment les gens doivent vivre en campagne ».

« Pour moi, Québec solidaire entretient une vision colonialiste d’un projet où le progrès est au centre du troisième lien », a dit Mme Proulx en direction de la députée de Taschereau, Catherine Dorion.

« Vision colonialiste, parce que les arguments qu’on entend, c’est : Il va y avoir des gens de la ruralité qui vont venir stationner dans nos rues, à Québec. Pour moi, c’est inacceptable », a continué la députée du gouvernement, pour qui ce tunnel est « un projet très progressiste ».

« Nous, à Québec solidaire, on pense, on sait comment les gens doivent vivre en campagne, puis ce n’est pas avec un projet comme ça qu’ils vont vivre adéquatement », a ajouté Mme Proulx.

Selon le dictionnaire Le Robert, le colonialisme est une « doctrine visant à légitimer l’occupation, la domination politique et l’exploitation économique de territoires par certains États ».

Bonnardel refuse de citer des experts

Catherine Dorion n’a pas réagi précisément à cette accusation de Marie-Eve Proulx, lors de ce débat qu’elle avait elle-même réclamé.

Mais « si la députée aime vraiment sa campagne puis qu’elle ne veut pas la voir devenir un paradis de béton puis de stationnements, il va falloir qu’elle fasse vraiment attention au développement et à comment ça se passe », a rétorqué la députée de Taschereau.

Et selon elle, il est faux de dire que ce tunnel ne concerne que la région de Québec ou de Bellechasse.

« GNL aussi concernait le Québec en entier […] Le Québec en entier s’est senti concerné, et la CAQ s’est pété la face sur ce projet-là, comme il va se péter la face sur le troisième lien », de lâcher la députée de Taschereau.

Celle-ci a demandé à plusieurs reprises au ministre des Transports de lui citer deux experts en faveur du troisième lien. François Bonnardel a évité de répondre.

« Je pense que je vais répondre à sa place : “je n’en ai pas d’études, je n’en ai pas d’expert” », a lancé Mme Dorion.

« Puis je vais vous le dire bien franchement, ce n’est pas pour rien que je vous posais cette question-là : je le sais qu’il n’y en a pas. »

La CAQ n’a pas sorti ce projet de son chapeau, selon M. Bonnardel, qui note que la construction d’un troisième lien entre Québec et Lévis est en réflexion depuis « une cinquantaine d’années ». Rappelons que le tunnel de deux étages aura six voies, dont deux réservées aux autobus.

François Bonnardel croit que tous les véhicules qui vont circuler dans le tunnel de 8,3 km seront « verts » à terme. « D’ici 20 ans, 15 ans, il y aura seulement des véhicules verts vendus au Québec. Quand je dis “verts”, je dis 100 % électriques ».

Le ministre des Transports a toutefois refusé de dire si le tunnel était un bon projet pour l’environnement, comme lui demandait le député libéral de Pontiac, André Fortin.

Celui-ci s’est montré surpris d’entendre Marie-Eve Proulx dire que le tunnel ne créerait pas d’étalement urbain, mais allait seulement permettre de faire revivre des villages existants.

« On ne peut pas dire qu’un projet comme le tunnel ne fera pas en sorte qu’il y ait de l’étalement urbain. Il va y en avoir, nécessairement », estime l’élu libéral.

« Partout ailleurs dans le monde, une autoroute supplémentaire en milieu urbain, ça cause de l’étalement urbain. Alors, j’aimerais juste qu’on ait un discours moindrement intelligent, moindrement basé sur les faits. »

L’exercice de deux heures a semblé une reprise de tous les débats sur le troisième lien à l’Assemblée nationale. « Tout ça, est-ce que ce n’est pas un peu un dialogue de sourds ? », s’est demandé M. Fortin.