Bien que l’opération d’évacuation menée par ses militaires en Afghanistan soit officiellement terminée, le Canada continue de travailler avec ses alliés pour permettre à ses ressortissants de quitter le pays, a assuré vendredi matin le gouvernement. Mais le Canada ignore combien de citoyens canadiens, de résidents permanents et d’autres personnes inscrites sur sa liste prioritaire d’évacuation se trouvent encore coincés en Afghanistan.

« Ne perdez pas espoir ! », a lancé le ministre des Affaires étrangères, Marc Garneau, à l’endroit des Afghans qui espèrent l’aide du Canada pour sortir du pays. « On réalise qu’on n’a pas pu sortir tout le monde » avant le départ des militaires canadiens, a-t-il dit, avant d’assurer que le gouvernement allait déployer « tous les moyens possibles » pour les faire sortir du pays.

L’opération d’évacuation menée par les Forces armées canadiennes, qui a pris fin jeudi, aura permis à 3700 personnes de quitter l’Afghanistan. Avant que la capitale, Kaboul, ne tombe aux mains des talibans le 15 août, Ottawa avait identifié 6000 Afghans qui devaient être évacués. « [Jeudi], nous avons réussi à réserver 500 places sur un vol américain », a indiqué en téléconférence le ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté, Marco Mendicino.

Le ministre Marc Garneau a dit ignorer combien de ressortissants canadiens ou d’autres personnes dont le nom figure sur sa liste d’évacuation sont encore en Afghanistan. « Nous encourageons toujours les Canadiens à s’inscrire à l’ambassade lorsqu’ils se trouvent à l’étranger, mais ce n’est pas tout le monde qui le fait », a dit M. Garneau, qui a précisé s’attendre à obtenir des informations plus précises dans les prochains jours.

Certaines de ces personnes, a dit le ministre, ont peut-être réussi à quitter le pays à bord d’un vol affrété par un autre pays que le Canada.

Tous les employés canadiens de l’ambassade ont quitté l’Afghanistan, a rappelé M. Garneau. « Jusqu’à tout récemment, il y avait un petit groupe de huit militaires qui étaient restés sur place pour aider au pont aérien, mais eux aussi ont quitté » le pays, a dit le ministre. « En ce moment, il n’y a pas d’employés ou de militaires canadiens en Afghanistan. »

Parmi la douzaine de pays de l’OTAN qui ont participé au pont aérien d’évacuation hors d’Afghanistan dans les derniers jours, seuls le Royaume-Uni et les États-Unis sont encore sur place. Ces derniers, qui contrôlent l’aéroport de Kaboul, ont annoncé que leur opération prendrait fin le 31 août.

Vendredi, les Britanniques ont annoncé que leur opération d’évacuation tirait à sa fin et que leurs avions ne pourraient pas accueillir davantage de passagers que les 1000 personnes déjà sélectionnées qui se trouvaient à l’aéroport en attente de l’un de ses derniers vols. Le Royaume-Uni a dit estimer qu’après le départ de ses militaires « dans les prochains jours », de 100 à 150 citoyens britanniques seraient laissés derrière, ainsi qu’environ 1100 Afghans qui ont travaillé pour le Royaume-Uni et qui sont admissibles à l’évacuation.

Comment toutes ces personnes pourront-elles quitter l’Afghanistan lorsque les talibans prendront le contrôle de l’aéroport ? Le ministre Garneau a indiqué que cette question serait discutée lors des négociations entre « partenaires régionaux » et talibans. « Nous ne savons pas quand ça aura lieu, mais ce qui sera mis de l’avant, c’est qu’il est à l’avantage du pays que l’aéroport soit ouvert pour pouvoir y envoyer, par exemple, de l’aide humanitaire, ou pour que des gens puissent entrer dans le pays, et d’autres, en sortir. »

Par les airs, par la route

Plusieurs pays qui ont mis fin à leurs opérations d’évacuation ont d’ailleurs regretté vendredi d’avoir abandonné des gens à leur sort en Afghanistan. L’Allemagne a notamment reconnu avoir réussi à évacuer seulement un peu plus de la moitié des 10 000 personnes qu’elle aurait souhaité faire sortir du pays.

PHOTO AGENCE FRANCE-PRESSE

Un avion militaire américain quittant l'aéroport de Kaboul, vendredi. Ottawa dit travailler avec les États-Unis et d'autres pays pour évacuer des personnes d'Afghanistan, même si l'opération canadienne a pris fin.

En évoquant les 500 personnes sélectionnées par le Canada et évacuées d’Afghanistan par les États-Unis jeudi, le ministre Mendicino a dit qu’il continuerait à « travailler avec les États-Unis et d’autres pays pour mettre en place des ponts aériens chaque fois que c’est possible, et même au-delà de la date anticipée du retrait des militaires de la coalition le 31 août ».

Outre les citoyens et résidents permanents du Canada, leur famille ainsi que les Afghans qui ont travaillé pour le Canada, le gouvernement s’est engagé à accueillir des personnes dont la sécurité est particulièrement menacée par le retour des talibans.

Parmi eux, le ministre a évoqué les femmes, les militants des droits de la personne, les membres de minorités religieuses, les membres de la communauté LGBTQ+ et les journalistes.

La situation en Afghanistan est « d’une grande instabilité », a répété Marc Garneau, rappelant les explosions qui ont fait 170 morts jeudi. Il a dit espérer que le portrait « sera plus clair dans les jours à venir », notamment pour que les Afghans détenteurs de visas canadiens puissent quitter le pays de façon sûre.

Les talibans accepteront-ils de laisser partir ceux qui le souhaitent ? Les vols commerciaux reprendront-ils à Kaboul ? Sera-t-il possible de voyager jusqu’au Pakistan voisin pour rejoindre l’ambassade du Canada à Islamabad ? « Pour le moment, nous demandons aux gens de rester là où ils se trouvent », a conseillé M. Garneau. « Nous resterons en contact avec eux. »

Nombre de personnes évacuées par pays

Ressortissants et citoyens afghans parrainés par ces pays

  • Qatar : 40 000
  • Émirats arabes unis : 36 500
  • Royaume-Uni : 13 700
  • Allemagne : 5347
  • Italie : 4832
  • États-Unis : 4500*
  • Australie : 4100
  • Canada : 3700
  • France : 2600
  • Total des personnes évacuées entre le 14 et 27 août : environ 105 000

* Citoyens américains seulement. Le gouvernement américain n’a pas encore fourni de bilan plus précis de son opération d’évacuation.

Source : Reuters