(Ottawa) Depuis une semaine, l’ancien ministre de la Sécurité publique Ralph Goodale doit endosser les habits d’un diplomate. Mais cela ne l’empêchera pas de poursuivre les efforts qu’il mène depuis près d’un an afin d’obtenir des réponses – et des comptes – de l’Iran sur la tragédie du vol 752 de la compagnie Ukraine International Airlines, abattu par les forces armées iraniennes le 8 janvier 2020.

Nommé par le premier ministre Justin Trudeau au poste de haut-commissaire du Canada au Royaume-Uni et en Irlande du Nord, M. Goodale en fait quasiment une affaire personnelle pour les familles canadiennes qui ont perdu un proche dans cette tragédie.

Parmi les 176 victimes, 55 étaient des citoyens canadiens et 30, des résidents permanents du Canada. Au cours de la dernière année, M. Goodale a agi comme conseiller spécial de M. Trudeau afin de soutenir la réponse continue du Canada dans cette triste affaire. En décembre dernier, il a publié un volumineux rapport contenant plusieurs recommandations pour éviter qu’une telle tragédie ne se reproduise et pour forcer le régime iranien à rendre des comptes.

J’ai un grand intérêt personnel dans cette affaire et je vais l’ajouter à ma longue liste de dossiers prioritaires.

Ralph Goodale, dans une entrevue accordée à La Presse

« Le Royaume-Uni a aussi eu des ressortissants qui ont été tués. Le pays fait partie du groupe de coordination et de réponse internationale à cette tragédie, tout comme le Canada, l’Ukraine, la Suède et l’Afghanistan. Il est avantageux de se retrouver à Londres pour s’assurer que nos deux pays continuent de travailler de concert pour obtenir des réponses et une justice pour toutes les familles des victimes », a ajouté le nouveau diplomate.

Récemment, le Bureau d’enquête sur les accidents d’aéronefs de la République islamique d’Iran a publié son rapport final d’enquête sur le vol 752 d’Ukraine International Airlines. Le rapport a été jugé « incomplet » par les autorités canadiennes, d’autant qu’il ne contenait « ni faits ni preuves tangibles ».

PHOTO EBRAHIM NOROOZI, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Débris de l’avion du vol 752 d’Ukraine International Airlines après avoir été abattu par les forces armées iraniennes le 8 janvier 2020

Le Canada continue d’ailleurs de réclamer « une enquête complète et transparente, conforme aux normes internationales, afin de répondre à toutes les questions critiques en suspens ».

Agenda chargé

Après une longue carrière en politique fédérale – il a été ministre de l’Agriculture, des Ressources naturelles et des Travaux publics dans le gouvernement de Jean Chrétien, ministre des Finances dans le gouvernement de Paul Martin, et ministre de la Sécurité publique dans le gouvernement de Justin Trudeau –, M. Goodale ne chômera pas dans ses nouvelles fonctions de diplomate.

Car le Royaume-Uni sera l’hôte de deux sommets internationaux importants d’ici la fin de l’année. D’abord le Sommet du G7, qui aura lieu dans la ville côtière de Carbis Bay, dans les Cornouailles, du 11 au 13 juin. Ensuite, le pays accueillera la Conférence des Nations unies sur les changements climatiques (COP28) à Glasgow, du 1er au 12 novembre. La préparation du Canada à ces sommets remplira les premiers mois de son mandat.

« À l’heure actuelle, les efforts de tous les pays visent à combattre la COVID-19. Il en sera évidemment question durant le Sommet du G7. Il faut que ces efforts pour régler cette crise soient coordonnés, aujourd’hui et à long terme. Le premier ministre Boris Johnson souhaiterait que ce sommet se déroule en présence des leaders. Mais on ne sait toujours pas si ce sera possible », a souligné M. Goodale.

Quant à la conférence sur les changements climatiques, le retour des États-Unis dans la lutte pour freiner le réchauffement de la planète change la donne, selon M. Goodale. Le leadership des États-Unis aura un impact décisif sur les autres pays tels que la Chine et la Russie, a-t-il analysé.

À ces dossiers, il faut évidemment ajouter les négociations visant à conclure un traiter de libre-échange permanent entre le Canada et le Royaume-Uni à la suite du Brexit.

Les deux pays ont choisi de parapher un accord temporaire qui est entré en vigueur le 1er avril et qui s’inspire largement de l’entente qui existe entre le Canada et l’Union européenne. On souhaite conclure un accord de libre-échange permanent d’ici un an, a indiqué M. Goodale. Les échanges commerciaux entre les deux pays frisent les 45 milliards de dollars annuellement.

« Les échanges commerciaux sont importants entre les deux pays. Mais nous croyons que cela pourrait être plus important encore », a-t-il dit.

Arrivé au Royaume-Uni dimanche, M. Goodale devra se soumettre à une quarantaine de 10 jours. Il devra aussi subir deux tests de dépistage.

« Ce sera le moment idéal pour lire mes cahiers de breffage. Ils sont assez costauds », a lancé au bout du fil le nouveau diplomate.