(Ottawa) Les députés et des militants libéraux de l’ensemble du pays poussent l’idée de créer un revenu minimum garanti universel, malgré le manque apparent d’enthousiasme de leur chef Justin Trudeau.

La question sera débattue en priorité à l’occasion du congrès du Parti libéral du Canada, les 9 et 10 avril.

M. Trudeau n’avait pas claqué la porte à son caucus lorsque celui-ci avait lancé l’idée d’en débattre au cours du congrès 2021. Il avait toutefois indiqué qu’une réforme coûteuse de la sécurité sociale nationale ne figurait pas en tête de sa liste des mesures à prendre au moment où la pandémie a fait grimper le déficit fédéral dans la stratosphère.

« De toute évidence, la COVID a révélé les faiblesses de notre pays où les personnes vulnérables continuent de passer entre les mailles du filet, avait-il alors reconnu. Nous aurons également des discussions sur les prochaines étapes, mais nous nous concentrons beaucoup sur ce que nous devons faire pour contrôler la COVID-19. »

M. Trudeau n’aurait pas modifié son point de vue depuis ce temps, selon des sources internes.

Une résolution demandant au gouvernement fédéral d’instaurer un revenu universel de base pour tous les Canadiens est présentée par les Jeunes Libéraux et l’aile ontarienne du parti.

Les auteurs de la résolution estiment que ce programme serait un successeur logique à la Prestation canadienne d’urgence (PCU) mis en place pour venir en aide aux millions de Canadiens affectés par la pandémie. « Compte tenu du succès qu’a connu le programme de la PCU, un revenu universel de base aiderait les aînés et les Canadiens à faible revenu à maintenir un niveau de vie adéquat, quelle que soit leur situation professionnelle », font-ils valoir.

Ils soulignent aussi qu’un revenu minimum garanti « augmenterait le pouvoir de négociation des travailleurs puisqu’un revenu inconditionnel garanti fournit un levier pour refuser les salaires de misère et les conditions de travail dégradantes ».

Les partisans de la résolution disent également qu’un revenu minimum garanti permettrait de fusionner tous les programmes de soutien existants et de réduire les coûts administratifs. Il simplifierait les demandes de prestations pour les personnes dans le besoin, en leur assurant une sécurité de revenu et en réduisant la stigmatisation liée à la perception de l’aide sociale.

Toutefois, l’idée ne fait pas l’unanimité au sein de la formation.

« Le revenu de base est une idée simple et attrayante, mais quand on y regarde de plus près, il s’avère coûteux et inefficace », a dit un participant au processus d’élaboration des résolutions qui s’est déroulé en ligne.

« Il s’agit d’une politique inflationniste destructrice, basée sur des hypothèses fallacieuses et des notions idéalistes. Ce n’est pas une politique libérale, c’est vouloir chercher le soutien désastreux des communistes », a renchéri un autre opposant.

Certains craignent que cela n’encourage les gens à rester à la maison plutôt qu’à chercher du travail.

Des économistes ont soulevé des préoccupations similaires. De son côté, le directeur parlementaire du budget a fixé le coût net d’un programme annuel de revenu de base universel à 44 milliards par an, même si d’autres mesures de soutien étaient abrogées.

Normes nationales

Les délégués seront aussi appelés à débattre d’une résolution visant à exhorter le gouvernement du Canada à collaborer avec les gouvernements provinciaux et territoriaux pour l’établissement de normes nationales pour les centres de soin de longue durée, là où est survenu le plus grand nombre de décès liés à la COVID-19 au pays.

Cette résolution a elle aussi suscité de l’opposition. Des militants ont dit que le gouvernement fédéral ne devrait pas essayer d’imposer des normes nationales aux provinces et aux territoires, qui ont la compétence exclusive sur la prestation des soins de santé.

Mais la résolution a aussi des partisans plus virulents. « Si elles n’acceptent pas les normes, alors aucun financement, soutient l’un d’eux. Il est temps d’arrêter de jouer à ce jeu avec les provinces. Rien d’autre ne fera bouger l’aiguille. »

D’autres préfèrent que l’objectif soit de s’assurer que les personnes âgées reçoivent des soins à domicile adéquats afin qu’ils n’aient pas besoin de se retrouver dans un centre de soins de longue durée.

Parmi les autres résolutions figurent la fin des subventions pour les combustibles fossiles, des incitations au développement des sources d’énergie renouvelables et des financements pour recycler et relocaliser les travailleurs touchés par la transition vers une économie verte.

Le congrès se déroulera en ligne à cause de la pandémie.