Alors que les systèmes de santé sont fragilisés par la COVID-19, les premiers ministres de toutes les provinces canadiennes ont fait front commun, jeudi, pour demander au gouvernement Trudeau de hausser substantiellement les transferts en santé. Pendant ce temps, en Abitibi, le variant sud-africain continue de gagner du terrain.

À la veille du dépôt du prochain budget à Ottawa, les premiers ministres provinciaux plaident pour que la contribution fédérale aux coûts des soins de santé passe de 22 % à 35 %, ce qui, concrètement, ferait passer les transferts de 42 à 70 milliards par année. Ils demandent aussi que l’argent soit remis sans condition.

« M. Trudeau a dit qu’il voulait s’occuper d’abord de la pandémie et ensuite des transferts en santé ; on n’est pas d’accord avec lui. Il y a des décisions importantes qui doivent être prises maintenant », a déclaré le premier ministre François Legault lors d’une conférence de presse à Montréal, à laquelle les premiers ministres de la majorité des autres provinces ont participé virtuellement.

« Les provinces et territoires vont aussi déposer leur budget prochainement, et on doit se poser des questions sur les services qu’on est capables de financer, a-t-il ajouté. Je donne un exemple du Québec où on a augmenté de 8000 les préposés dans les CHSLD, mais la question qui se pose, c’est : comment peut-on financer ces nouveaux postes au cours des prochaines années ? »

En raison du vieillissement de la population, des nouvelles technologies et du coût des médicaments, les besoins en santé augmentent de 5 % par année, alors que la contribution du gouvernement fédéral est seulement indexée de 3 % annuellement.

Année après année, la proportion des dépenses en santé financées par le gouvernement fédéral diminue.

François Legault, premier ministre du Québec

Le Conseil de la fédération, qui est présidé par M. Legault, a rencontré tous les partis de l’opposition à Ottawa pour savoir s’ils étaient d’accord d’augmenter les transferts de 28 milliards. « Le Bloc québécois et le NPD sont d’accord avec le montant. Le Parti conservateur est d’accord avec le principe, mais n’a pas encore établi quel serait le montant », a précisé M. Legault.

Le variant sud-africain maintenant dominant en Abitibi

Le Québec a rapporté jeudi 707 nouveaux cas positifs de COVID-19 et 20 décès supplémentaires, dont 4 sont survenus dans les 24 heures précédant le bilan. Les hospitalisations ont connu une légère hausse.

Le variant sud-africain, dont la présence a été confirmée pour la première fois au début de janvier en Abitibi-Témiscamingue, est désormais devenu la souche dominante, a indiqué la Dre Omobola Sobanjo, médecin-conseil au CISSS de l’Abitibi-Témiscamingue, en point de presse jeudi.

« Environ 70 % de nos tests reviennent soit confirmés par séquençage ou présomptifs par criblage », a précisé la Dre Sobanjo. Ce variant a pris le dessus au début de février. Jusqu’ici, 40 cas ont été confirmés par séquençage, mais il est possible que la souche ait été présente avant janvier, alors qu’il n’y avait pas de séquençage.

« On n’a pas d’indication que c’est relié à l’industrie minière », a aussi indiqué la médecin-conseil, en précisant que les recherches se poursuivent avec l’Institut national de santé publique du Québec.

Le vaccin d’AstraZeneca, réputé moins efficace contre ce variant sud-africain, ne sera pas pour autant exclu de la région. « L’efficacité contre ce variant est moindre pour tous les vaccins, a souligné la Dre Sobanjo. Toutefois, on voit qu’il y a encore une efficacité. C’est pour ça qu’on ne peut pas prendre le risque, on doit l’utiliser. »

Le vaccin d’AstraZeneca, pour l’usage duquel on attend l’avis du Comité sur l’immunisation du Québec, est un outil supplémentaire qui permettra de vacciner des personnes qui ne peuvent se déplacer, a fait valoir la médecin.

Variant émergent en Outaouais

En Outaouais, où aucun cas de variant n’avait encore été confirmé, « une trentaine de cas présomptifs » sont en évaluation, a annoncé le CISSS jeudi. Une analyse de l’importante éclosion du CHSLD Lionel-Émond, où 42 résidants et 16 employés ont été infectés, alors que 98 % des résidants avaient reçu une première dose de vaccin en décembre, a aussi été déclenchée. Les trois quarts des résidants ont peu ou pas de symptômes, mais deux d’entre eux sont morts.

Le bilan quotidien de la situation sanitaire dans la province indique aussi que 16 619 doses de vaccin ont été administrées dans la journée de mercredi. Ce chiffre se situe dans la moyenne des derniers jours, alors qu’un sommet de 17 489 doses ont été administrées le 1er mars.

Au chapitre des hospitalisations, huit nouvelles personnes ont été admises pour être soignées en raison du coronavirus, ce qui porte le total à 626 patients. Le bilan des patients aux soins intensifs recule de 5, pour s’établir à 115.

Dans ses plus récentes projections publiées jeudi, l’Institut national d’excellence en santé et en services sociaux a estimé que 86 % des nouveaux patients nécessitant d’être hospitalisés le seraient à Montréal, à Laval, en Montérégie, dans Lanaudière et dans les Laurentides. Heureusement, il ne prévoit pas de dépassement des capacités hospitalières au cours des trois prochaines semaines.

En revanche, l’Institut national de santé publique du Québec a prévenu jeudi qu’un assouplissement des mesures pourrait engendrer de 2000 à 4000 cas par jour en raison de la contagion du variant du Royaume-Uni.

— Avec Hugo Pilon-Larose, La Presse, et La Presse Canadienne