(Ottawa) Le Canada devrait subir cette semaine des pressions de ses alliés de l’OTAN pour annuler son retrait de militaires en Irak, alors que l’Alliance atlantique se prépare plutôt à accroître sa présence dans ce pays.

L’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN) est toujours préoccupée par les extrémistes de Daech et les milices soutenues par l’Iran dans cette région. Le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, a prédit cette semaine que les ministres de la Défense des pays membres approuveraient le déploiement de plus d’instructeurs et de conseillers pour aider les forces de sécurité irakiennes à combattre Daech.

La mission en Irak va croître en ampleur

Le ministre canadien de la Défense, Harjit Sajjan, participera à cette réunion à huis clos de deux jours, cette semaine, pour discuter également de l’Afghanistan et des menaces posées par la Chine et la Russie.

En conférence de presse lundi, M. Stoltenberg s’attendait à ce que la mission de l’OTAN en Irak s’élargisse progressivement, « suite aux demandes du gouvernement irakien, en étroite coordination avec la coalition mondiale […] pour qu’ensemble, nous puissions nous assurer que (Daech) ne reviendra pas ».

L’extension proposée entraînerait une augmentation spectaculaire du nombre de militaires affectés à la mission de formation actuelle de l’OTAN — et entraînerait probablement une pression sur le Canada pour qu’il commence à redéployer des militaires en Irak, après en avoir retiré près de 200 depuis un an.

La mission actuelle de l’OTAN a été lancée en 2018 et a impliqué environ 500 militaires, dans le but de renforcer l’armée irakienne afin qu’elle puisse mieux combattre les groupes extrémistes comme Daech. Le Canada a fourni dès le départ 200 militaires à cette mission, qui a même été commandée par des Canadiens, dont la majore-générale Jennie Carignan.

Or, le ministère de la Défense affirme que seulement 17 soldats canadiens sont affectés actuellement à cette mission de l’OTAN, dont le commandement a été transféré au Danemark l’automne dernier.

Ailleurs dans la région

La mission de l’OTAN n’est pas le seul endroit où le Canada a commencé à retirer ses soldats dans la guerre contre Daech : les militaires affirment qu’ils avaient moins de 400 soldats dans la région en janvier, contre plus de 850 il y a plusieurs années.

Car en plus de la mission de formation de l’OTAN, le Canada a déployé des troupes de forces spéciales dans le nord de l’Irak et des avions de transport et des unités de renseignement au Koweït, en plus de et former des équipes de militaires en Jordanie et au Liban.

Un rapport publié la semaine dernière par l’inspecteur général du département américain de la Défense décrit toujours Daech comme une menace permanente. Les Américains estiment qu’entre 8000 et 16 000 combattants extrémistes sont en Irak et en Syrie voisine. Le rapport prévient aussi que les milices soutenues par l’Iran « représentaient certaines des plus grandes menaces ».

Des militaires canadiens à Erbil

Lundi dernier, une base militaire dans le nord de l’Irak abritant des soldats occidentaux, y compris des forces spéciales canadiennes, a été la cible d’une attaque à la roquette. Une personne a été tuée et plusieurs autres ont été blessées, dont un militaire américain. Selon la porte-parole du ministère canadien de la Défense, Jessica Lamirande, tout le personnel militaire canadien de la base située à côté de l’aéroport international d’Irbil, dans la région du Kurdistan irakien, était en sécurité.

L’une des nombreuses milices soutenues par l’Iran en Irak a revendiqué la responsabilité de l’attaque, la plus récente attribuée à ces milices, dans ce que de nombreux observateurs considèrent comme une « guerre par procuration », plus large et larvée, entre les États-Unis et l’Iran.

Le ministre Sajjan a refusé en décembre de préciser si la mission du Canada contre Daech serait même prolongée au-delà du 31 mars, comme il est prévu jusqu’à nouvel ordre. En entrevue à La Presse Canadienne, il soulignait simplement que le Canada continuerait d’être « un partenaire fiable ».

Bessma Momani, experte du Moyen-Orient à l’Université de Waterloo, rappelle toutefois que l’armée canadienne est fortement impliquée dans plusieurs autres missions, en particulier au pays, où elle a été sollicitée pour lutter contre la COVID-19.

Mais elle croit que le Canada peut — et doit — déployer plus de militaires en Irak, pour s’assurer que ce pays continue à se dresser non seulement contre Daech, mais aussi contre l’Iran et ses milices. « C’est une petite force, à mon humble avis », dit-elle. « L’effort est relativement faible, mais le potentiel de succès est vraiment élevé. »