(Québec) La couronne britannique a été mise à mal, mercredi, lors d’un débat houleux à l’Assemblée nationale.

Le gouvernement Legault a réaffirmé son engagement à supprimer le poste de lieutenant-gouverneur, qui représente la reine Élisabeth II au Québec, mais seulement « lorsque le contexte le permettra ».

Outrée, l’opposition péquiste, qui souhaitait faire adopter une motion moins nuancée, réclamant l’abolition de la monarchie britannique au Québec, a estimé que le gouvernement Legault était dès lors démasqué, n’affichant qu’un nationalisme de façade.

La motion péquiste a donc été défaite, les élus caquistes et libéraux ayant voté contre. Les solidaires l’ont appuyée.

Selon le chef parlementaire du Parti québécois, Pascal Bérubé, le nationalisme de la Coalition avenir Québec (CAQ) est mort en même temps que la motion, qui visait à dénoncer « un pouvoir archaïque et colonial conquis par les armes ».

Car aux yeux du gouvernement, « ce n’est jamais le bon moment, il y a plus important » que ce combat contre la monarchie, a conclu M. Bérubé, au terme d’un débat de deux heures au Salon bleu.

Le libellé initial de la motion ajoutait qu’il faudrait aussi supprimer « tous les autres symboles de la monarchie britannique au Québec », un segment biffé par le gouvernement dans sa proposition d’amendement, que le PQ a rejetée.

Le PQ voulait aussi que le gouvernement endosse l’idée de réclamer d’Ottawa le remboursement des dépenses associées au lieutenant-gouverneur et assumées par les contribuables québécois. Mais le gouvernement a biffé aussi ce paragraphe dans sa proposition.

Déçu, M. Bérubé a dit qu’il aurait souhaité voir « un sursaut de fierté » et « des convictions » surgir des banquettes gouvernementales au moment du vote.

Une « attraction touristique »

Pourtant, sur l’argumentaire, la ministre responsable des Relations canadiennes et des Institutions démocratiques, Sonia LeBel, partageait l’avis du PQ pour estimer que le poste de lieutenant-gouverneur constituait un « anachronisme » dont il faudrait se défaire.

À ses yeux, la monarchie doit être réduite à « une attraction touristique » pour les voyageurs en visite à Londres.

« Moi, je pense qu’à part être une attraction touristique intéressante quand on va en Angleterre, là, je pense qu’effectivement ce n’est plus pertinent », a-t-elle observé.

Loin de prendre ses distances, la ministre LeBel a donc semblé partager, sur le fond, la lecture de l’opposition péquiste, tout en présentant des amendements visant à nuancer la formulation de certains énoncés et, surtout, à reporter l’échéance.

Selon le chef du PQ, Paul St-Pierre Plamondon, le gouvernement n’a cherché qu’à se défiler, à faire dévier le débat et à « remettre aux calendes grecques » cet engagement inscrit au programme de la CAQ depuis des années.

La version gouvernementale de la motion stipulait donc « que l’Assemblée nationale convienne de la pertinence d’abolir la fonction de lieutenant-gouverneur lorsque le contexte le permettra ».

La motion faisait aussi référence au sondage récent indiquant que 74 % des Québécois souhaitaient l’abolition de la monarchie au Québec. Mme LeBel a indiqué que si on lui avait posé la question elle aurait probablement elle aussi répondu par l’affirmative.

Dans ses remarques, elle a observé que la fonction de lieutenant-gouverneur, même si elle n’est que « symbolique », faisait néanmoins partie des institutions démocratiques du Québec, qui sont difficilement « détricotables ».

« La CAQ n’est pas monarchiste, mais la CAQ est d’abord et avant tout résolument pragmatique. Et le nationalisme que nous préconisons est un nationalisme qui vise d’avoir des résultats concrets », a fait valoir la ministre LeBel.