(Québec) La réforme des normes de santé et de sécurité du travail proposée par le gouvernement Legault est déjà dépassée, juge Québec solidaire (QS).

Le ministre du Travail, Jean Boulet, devra donc en proposer une version « fortement modifiée », a indiqué le leader parlementaire de QS, Gabriel Nadeau-Dubois, mercredi.

La semaine dernière lors des consultations en commission parlementaire, de nombreux groupes et syndicats ont notamment qualifié le projet de loi 59 de « sexiste ».

En vertu de cette réforme, plusieurs secteurs d’emploi à majorité féminins ne seraient plus assujettis aux mécanismes de prévention actuels. Ainsi les hôpitaux seraient considérés à faibles risques d’accident alors qu’un grand nombre de lésions est rapporté chaque année.

« On laisse tomber encore une fois les femmes qui travaillent dans les secteurs comme la santé et l’éducation en ne reconnaissant que très peu les risques de santé et de sécurité liés à leur travail », a déploré M. Nadeau-Dubois, en conférence de presse mercredi à l’Assemblée nationale.

« On ne pourra pas relancer l’économie en pensant seulement aux secteurs majoritairement masculins et il est temps que le ministre Boulet réalise que son projet de loi est passé date. »

Le parti de gauche demande de pouvoir travailler sur « une version fortement modifiée » du texte lors de l’étape de l’étude du projet de loi, article par article.

Le projet de loi 59 vise à réduire les coûts d’indemnisation des victimes d’accidents de travail.

Vieille de 40 ans, la loi actuelle prévoit quatre grands mécanismes de prévention : un comité de santé-sécurité, un programme de santé spécifique à l’établissement, un programme de prévention et un représentant à la prévention. En vertu de la réforme, les employeurs seraient plutôt divisés selon leur taille et entre niveaux de risque faible, modéré et élevé, avec des mécanismes de prévention ajustés à chacun.

En vertu de ce nouveau classement, 60 % des secteurs actuellement jugés prioritaires _ qui ont droit aux quatre mécanismes de prévention actuels _ seraient désormais classés dans les catégories à risques « faible » ou « modéré », conclut la CSN.

Le projet de loi révise aussi la liste des maladies « présumées professionnelles », en y ajoutant une présomption pour le trouble de stress post-traumatique et neuf nouveaux cancers professionnels.

Cependant, plusieurs intervenants ont déploré l’absence, dans cette liste, de l’épuisement professionnel, de troubles musculo-squelettiques, ou encore de la maladie de Parkinson dans le milieu agricole.

En outre, les syndicats ont dénoncé l’élimination de la notion de la « prépondérance » de l’avis du médecin traitant en matière de retour au travail ou de réadaptation. Selon les organisations de travailleurs, cela signifie le retour de la « médecine de compagnie », c’est-à-dire des médecins payés par l’employeur qui contesteront chacune des demandes d’indemnisation.

La Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) a versé des prestations totalisant 2,22  milliards en 2018. Elle avait alors accepté 103 406 lésions professionnelles et enregistré 226 décès. Chaque jour, 251 travailleurs subissent un accident.

Selon les données de la CNESST, les lésions psychologiques ont augmenté de 67 % au cours des 10 dernières années.