L’ancien premier ministre John Turner a été décrit, mardi, lors de funérailles d’État, comme un politicien doué doté d’une forte conscience sociale et ayant passé des décennies à servir ses concitoyens.

Un groupe de 170 personnes endeuillées — parmi lesquelles le premier ministre Justin Trudeau — étaient sur place à la basilique-cathédrale Saint-Michel pour le service télévisé, avant une inhumation privée.

John Turner, 17e premier ministre du Canada, est décédé paisiblement chez lui le 19 septembre, a déclaré sa famille. Il avait 91 ans.

« Aujourd’hui, plus que jamais, nous avons besoin de plus de gens comme John », a déclaré le premier ministre Justin Trudeau aux personnes rassemblées. « Son héritage nous appelle à ne pas attendre que le changement se produise, mais à nous lever et à construire un pays meilleur pour tous. »

La cathédrale récemment rénovée a une capacité de 1600 personnes, mais les préoccupations concernant la propagation de la COVID-19 ont incité les organisateurs à limiter la liste des invités. Beaucoup de personnes présentes portaient des masques noirs et étaient espacées pour maintenir la distance physique.

Sous la lumière du soleil qui filtrait à travers les vitraux, la fille de M. Turner, Elizabeth Turner, a fait l’éloge de son père en tant que politicien et fonctionnaire dévoué qui, malgré les exigences de la vie publique, n’a jamais manqué de consacrer du temps à sa famille.

Surnommé « le Kennedy du Canada » à son arrivée à Ottawa dans les années 1960, l’athlète John Turner a finalement représenté trois provinces en tant que député libéral. Il a été solliciteur général et ministre de la Justice et des Finances dans divers cabinets avant son bref passage de 79 jours en tant que premier ministre en 1984.

Né en 1929 en Angleterre, John Napier Wyndham Turner a déménagé au Canada en 1932 après la mort prématurée de son père. Champion de course de calibre olympique, il a fait ses études supérieures en droit.

M. Turner est entré en politique pour la première fois en 1962 lorsqu’il a remporté un siège dans la circonscription québécoise de Saint-Laurent–Saint-Georges.

« La démocratie ne se fait pas par accident », aurait-il souvent répété, selon sa famille.

En 1965, le premier ministre de l’époque, Lester Pearson, a nommé M. Turner au cabinet, deux ans avant que le père de Justin Trudeau, Pierre Trudeau, et un autre futur premier ministre, Jean Chrétien, décrochent des postes au cabinet.

M. Turner s’est lancé dans la course pour succéder à M. Pearson en 1968, mais a perdu contre Pierre Trudeau, qui l’a nommé ministre de la Justice, un poste qu’il a utilisé pour aider à créer la Cour fédérale.

Il a défendu la loi martiale et la suspension des libertés civiles lors de la crise d’octobre 1970, mais aussi la dépénalisation de l’homosexualité et de l’avortement dans les années 1960.

Il a aussi sauvé le chef de l’opposition de l’époque, John Diefenbaker, de la noyade pendant ses vacances à la Barbade.

M. Turner a épousé sa femme, Geills McCrae Kilgour, petite-nièce du colonel John McCrae qui a écrit le poème « Au champ d’honneur », en 1963. Le couple a eu une fille, Elizabeth, et trois fils, Michael, David et Andrew.

Après avoir quitté la politique en 1976, ce passionné de plein air a passé près d’une décennie comme avocat d’entreprise sur Bay Street avant de revenir en politique après la démission de Pierre Trudeau. M. Turner a remporté la course à la direction des libéraux en 1984 contre Jean Chrétien, après un vote amèrement divisé.

M. Turner, qui s’est opposé au libre-échange avec les États-Unis, a déclenché des élections neuf jours après avoir prêté serment en tant que premier ministre. Le parti, mal préparé et divisé, n’a pas été à la hauteur de Brian Mulroney et de ses progressistes-conservateurs.

John Turner a démissionné de son poste de chef de parti en 1990 et a quitté la politique trois ans plus tard pour se joindre à un cabinet d’avocats de Toronto.

Malgré une santé déclinante, il a été un pilier de nombreux événements libéraux. Il a prononcé des discours rappelant au parti ses années d’or, parsemés d’histoires incroyables sur la vie en politique.