(Québec) Le premier ministre du Québec, François Legault, affiche un « nationalisme économique d’une autre époque » en voulant être un « patron autoritaire qui veut faire des deals avec l’argent des contribuables », accuse la cheffe du Parti libéral du Québec, Dominique Anglade.

Elle a placé l’économie, en particulier la reprise dans le contexte de la pandémie, au cœur de l’ordre du jour de la réunion de son caucus qui débute ce jeudi au parlement pour préparer la rentrée du 15 septembre.

Ce sera la première fois que Dominique Anglade se retrouve en chair et en os devant l’ensemble de ses députés depuis son arrivée à la tête du parti, en mai. Les parlementaires libéraux seront réunis au Salon rouge, vaste salle où les consignes sanitaires comme la distanciation physique pourront être respectées.

« Fabriqué au Québec »

La cheffe a réagi vivement aux propos de François Legault, qui, en entrevue avec La Presse cette semaine, a affirmé qu’il voulait remplacer « Fait en Chine » par « Fabriqué au Québec » sur les étiquettes de produits vendus ici. Il fait de l’augmentation de la production locale la « grande priorité » de la deuxième moitié de son mandat.

Dominique Anglade lui reproche d’exprimer surtout des vœux pieux, mais aussi de présenter une stratégie douteuse.

Le premier ministre a déclaré en outre qu’il était en train de cerner « les secteurs dans lesquels on va être très généreux avec les entreprises qui ont des projets pour produire plus au Québec ».

Selon Dominique Anglade, François Legault veut faire « des deals sur le coin d’une table, à gauche et à droite », qui n’auront que des effets à court terme sur l’économie québécoise.

Conditions propices aux secteurs d’avenir

L’État doit surtout créer des conditions propices à l’émergence de secteurs d’avenir, selon elle.

Un nationalisme économique moderne, c’est être capable d’anticiper les tendances, d’investir en innovation, d’être capable de créer des écosystèmes.

Dominique Anglade, en entrevue avec La Presse

Elle dit avoir agi en ce sens comme ministre de l’Économie dans le gouvernement Couillard, de 2016 à 2018, avec le développement de la grappe de l’intelligence artificielle et du manufacturier innovant.

Or, ces jours-ci, la Coalition avenir Québec ne manque pas de lui rappeler des épisodes difficiles de son passage à l’Économie. Comme la vente de Rona à Lowe’s. « Les deux parties voulaient avoir une transaction », et « le gouvernement n’est pas intervenu de la même manière qu’il n’était pas intervenu pour Provigo », acheté par Loblaws à l’époque où François Legault était ministre dans le gouvernement Bouchard, réplique-t-elle.

Et la cimenterie McInnis ? « Je ne peux pas vous dire que ç’a été le meilleur projet sous notre gouvernement et sous la gouverne du Parti québécois. Mais des contre-exemples, il y en a plusieurs », répond-elle. Elle fait valoir les investissements dans LM Wind Power, en Gaspésie, pour la fabrication de pales d’éoliennes.

Quant à François Legault, en deux ans de gouverne, « ses lignes de presse sont meilleures que ses résultats », lâche-t-elle, rappelant le dossier du Cirque du Soleil, par exemple.

Importations et production locale

La cheffe libérale se dit en accord avec la volonté de François Legault de substituer des importations par la production locale dans le secteur de l’agroalimentaire. Mais des substitutions dans d’autres secteurs, pour remplacer des produits chinois, par exemple, pourraient être une aventure risquée et peu profitable, selon elle.

« Si le seul objectif est de substituer des importations et que l’État investit des millions, on aura peut-être créé 200 jobs, mais ce n’est pas un nationalisme économique moderne, c’est un nationalisme économique de courte vue », affirme-t-elle.

Elle explique en substance que des entreprises risquent de dépendre des fonds publics pour fabriquer des produits à un prix compétitif pour les Québécois et qu’elles auront du mal à se tailler une place dans les marchés étrangers. Cette stratégie ne favorise pas les investissements en innovation, ajoute-t-elle.