(Québec) Dans une lettre ouverte publiée mercredi, le ministre de la Justice et ministre responsable de la Langue française, Simon Jolin-Barrette, souligne l’anniversaire de la loi 101 et promet que le gouvernement caquiste va agir pour renforcer la position du français au Québec.

Soutenant que « la ferveur qui, en 1977, animait nos gains a cédé tranquillement le pas à la tiédeur et aux hésitations, en particulier dans la métropole », le ministre déclare que « le temps des “mais” est révolu » et que le gouvernement veut agir.

Simon Jolin-Barrette n’aborde aucune véritable proposition en ce sens dans sa lettre, mais affirme être « préoccupé » face aux nouvelles données sur l’évolution de la langue au Québec. Il énumère les nombreux changements sociaux, économiques et technologiques qui menacent, selon lui, la place du français notamment dans les milieux de travail.

Le député de Borduas, en Montérégie, soutient que défendre et promouvoir la langue française constitue « une responsabilité historique du Québec » et que le français « n’est pas un problème, mais une solution ».

La semaine dernière, Simon Jolin-Barrette a cependant donné un avant-goût de son plan d’action qui doit notamment assujettir à la loi 101 les entreprises de compétence fédérale présentes au Québec, comme les banques ou VIA Rail.

De plus, le gouvernement du Québec prévoit changer ses façons de faire en communiquant exclusivement en français avec les personnes morales, soit les entreprises et autres organisations.

L’opposition veut du concret

Les réactions des partis d’opposition ont toutes reconnu les bonnes intentions, mais souligné le manque de substance dans le discours du gouvernement.

Le leader parlementaire du Parti libéral, André Fortin, a parlé d’un « bel énoncé historique », mais regrette que le ministre n’aborde aucune mesure concrète. « On veut voir la viande autour de l’os de ce que la CAQ va proposer », a-t-il commenté en rappelant que les libéraux ont déjà proposé d’offrir gratuitement des cours de français à tous les Québécois qui le voudraient.

Chez Québec solidaire, Sol Zanetti y voit une nouvelle manifestation du nationalisme de la CAQ qu’il décrit comme « un nationalisme à genoux qui bombe le torse en ne faisant pas grand-chose ».

Le porte-parole de QS en matière de souveraineté croit que la protection de la langue passe inévitablement par l’indépendance. Ce que la CAQ rejette.

« Monsieur Jolin-Barrette veut faire croire aux Québécoises et aux Québécois que nul n’est besoin de sortir de la cage, il suffit de l’aménager », a-t-il raillé.

Finalement, le leader parlementaire du Parti québécois, Martin Ouellet, dont la formation politique est à l’origine de la loi 101, dit espérer qu’un projet de loi soit déposé en priorité cet automne.

« Il nous a expliqué sa recette, mais vous savez comme moi qu’en cuisine on peut avoir les bons ingrédients, mais ça peut goûter mauvais », a comparé le député de René-Lévesque.

Hommage à la loi 101

C’est le 26 août 1977, il y a 43 ans, que le gouvernement du Parti québécois de René Lévesque a fait adopter la Charte de la langue française, mieux connue sous son numéro de loi 101.

« Cette union sacrée porte tous les accents de la langue française. Et avec elle, notre histoire, notre culture, nos espoirs, nos traditions, nos institutions, nos ambitions, nos réussites et, surtout, notre avenir », écrit le ministre Jolin-Barrette dans sa lettre publiée par plusieurs médias.

Il cite notamment les mots du premier ministre de l’époque René Lévesque ainsi que de l’auteur de la loi, l’ex-ministre d’État au Développement culturel Camille Laurin pour qui le Québec venait de reprendre « possession à la fois de sa langue et de son pays ».

« Ainsi, le Québec était, est et devra être francophone. Il s’agit d’un principe non négociable », plaide à son tour Simon Jolin-Barrette. Le ministre qualifie la loi 101 d’instrument ayant permis au Québec de « s’inscrire dans l’Histoire » et « d’assurer sa cohésion sociale ».

« Depuis 43 ans, parler du Québec, c’est aussi parler de sa langue, de notre langue, poursuit le ministre caquiste. De cette langue française qui nous permet de dire qui nous sommes — partout dans le monde — et, surtout, qui nous voulons être. »

Plus tôt ce mois-ci, des données de l’Enquête sur les exigences linguistiques auprès des entreprises, des municipalités et des arrondissements de Montréal, réalisée par l’Institut de la statistique du Québec, ont révélé que 40 % des entreprises avaient exigé ou souhaité que leurs employés aient des compétences en anglais, lors de leurs dernières embauches.

Un taux qui bondit jusqu’à 63 % chez les entreprises installées à Montréal. De plus, 20 % des municipalités ou arrondissements, soit des employeurs publics, ont reconnu avoir rejeté des candidatures à cause d’un manque de compétences en anglais.