(Ottawa) Alors que des millions de Canadiens planifient un télétravail prolongé afin de contrôler la propagation de la COVID-19, les députés fédéraux jonglent avec un problème très particulier : comment voter virtuellement de façon sécuritaire ?

Différentes options sont maintenant sur la table, alors que les députés et des centaines de fonctionnaires, en coulisses, commencent à planifier à quoi pourraient ressembler les séances du Parlement à l’automne — dans la mesure du possible.

« Est-il préférable de se rencontrer en personne ou virtuellement, en septembre ? », a demandé lundi le président de la Chambre des communes, Anthony Rota, au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre. « La COVID a tellement changé en cours de route qu’il est très difficile de prédire ce qui se passera dans un mois et demi ou deux mois », a-t-il admis.

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Le président de la Chambre des communes, Anthony Rota

Mais en attendant, une application mobile pourrait être déployée afin de permettre aux députés de voter, qu’ils soient sur la colline du Parlement ou non, a précisé M. Rota. L’application est entièrement bilingue, répond aux normes d’accessibilité et est sécurisée, ce qui permettrait notamment aux administrateurs de savoir où se trouvent les députés lorsqu’ils votent et d’authentifier leur identité.

Le gouvernement libéral a eu du mal à trouver un mode de scrutin qui soit sécuritaire, alors que l’opposition conservatrice exigeait la reprise « normale » des travaux du Parlement. Plusieurs compromis ont été conclus en cours de route, notamment un modèle hybride qui permet aux députés de participer en personne ou virtuellement aux débats en Chambre ou aux réunions des comités des Communes.

Ces débats et réunions ont été de portée limitée et les conservateurs ont fait pression pour un retour complet aux affaires, qui élargirait les pouvoirs dont disposent les députés pour faire pression sur le gouvernement et obtenir plus d’informations sur la gestion des affaires courantes.

À l’heure actuelle, le Parlement devrait reprendre ses travaux à temps plein le 21 septembre — une journée unique de séance est toutefois prévue cette semaine. Ces journées de séance estivale faisaient partie des concessions obtenues par les partis d’opposition alors qu’ils se battaient pour que le gouvernement rende plus de comptes.

Visioconférence, modèle hybride…

Le président Rota a soutenu lundi qu’il valait mieux déployer le vote virtuel à l’automne, puisqu’il faudra du temps pour mettre en place le bon système.

En plus d’une application, M. Rota a présenté aux députés l’option d’une approche de visioconférence qui se grefferait sur le modèle hybride actuellement en place. Le rapport de M. Rota soulève par ailleurs plusieurs inquiétudes sur les visioconférences, y compris les connexions internet instables, le temps qu’il faudrait y consacrer et la question délicate des députés qui ne sont pas présents pour voter.

Il faudrait par exemple nommer chaque député tour à tour, pour vérifier qu’il n’a pas fermé son haut-parleur ou qu’il n’éprouve par de problèmes de connexion. « L’absence d’un député serait signalée au public, aux médias et aux autres membres de la Chambre, ce qui est contraire à la pratique actuelle », indique le rapport de la présidence.

Des observateurs ont remarqué récemment que de nombreux conservateurs ne se présentaient pas régulièrement aux travaux du « comité spécial COVID-19 », qui a remplacé la séance ordinaire de la Chambre des communes. Car contrairement aux séances habituelles de la Chambre, il est actuellement possible de savoir exactement qui est présent.

Les conservateurs se sont largement opposés au vote virtuel : ils ne veulent pas que les députés s’éloignent trop de la colline du Parlement. Ils soutiennent plutôt qu’il est tout à fait possible d’ajuster les procédures régulières afin de permettre une distanciation physique en Chambre et ils ont demandé au président comment le vote pourrait avoir lieu « en personne ».

M. Rota a admis que les députés pourraient par exemple faire la file à l’extérieur de la Chambre avant de voter, qu’ils pourraient aussi voter « par vague » ou encore par procuration. Ce vote en personne, par contre, serait long, et l’opération exigerait aussi temps et personnel pour désinfecter la Chambre à chaque fois.

Les députés membres du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre espèrent formuler leurs recommandations au Parlement plus tard ce mois-ci.