(Ottawa) Le chef du NPD, Jagmeet Singh, invite les libéraux de Justin Trudeau à prendre une résolution toute simple pour la nouvelle année : ils ne doivent jamais tenir pour acquis en 2020 qu’ils obtiendront l’appui des néo-démocrates lors des votes de confiance qui auront lieu à la Chambre des communes.

S’ils font fi de son conseil, les libéraux, qui ne détiennent plus la majorité des sièges aux Communes, pourraient avoir de mauvaises surprises alors qu’ils entreprennent leur nouveau mandat, a affirmé M. Singh au cours d’une entrevue accordée à La Presse.

Des votes de confiance, il y en aura quelques-uns au cours des prochains mois. Jusqu’ici, le gouvernement Trudeau sait qu’il peut compter sur l’appui du Bloc québécois pour faire adopter le discours du Trône à la reprise des travaux parlementaires, prévue le 27 janvier. Ce sera également le cas lors du vote visant à réduire le fardeau fiscal des contribuables, une mesure présentée durant la courte session parlementaire et qui vise à augmenter progressivement le montant personnel de base de 12 298 $ à 15 000 $ d’ici 2023. Mais le plus gros test risque de survenir lors de la présentation du budget par le ministre des Finances Bill Morneau, en février ou en mars.

« Le premier ministre ne doit pas tenir pour acquis qu’il aura notre appui », a prévenu M. Singh. 

Si le premier ministre veut faire des choses pour améliorer la qualité de vie des gens, il pourra compter sur notre appui. Mais s’il veut simplement gouverner d’une manière qui lui permettra de rester au pouvoir, il devra se fier à d’autres partis, le Bloc québécois ou le Parti conservateur, pour y arriver.

Jagmeet Singh

En entrevue, le chef néo-démocrate a réitéré que son parti était prêt à collaborer avec le gouvernement Trudeau s’il présentait des mesures concrètes qui aideront « les gens ordinaires » – un thème qu’il martèle depuis des semaines. M. Singh cite l’exemple de la création d’un régime national d’assurance médicaments ou d’un programme d’assurance dentaire, ou encore une hausse des transferts fédéraux aux provinces pour les soins de santé. Il cite aussi comme priorité de nouvelles mesures pour lutter contre les changements climatiques, entre autres choses.

« Nos priorités restent les mêmes », a fait valoir M. Singh, se disant convaincu que ces priorités sont aussi celles d’une majorité de Canadiens dits progressistes.

Des attentes déçues

Jusqu’ici, le gouvernement Trudeau n’a pas convaincu le NPD qu’il entendait donner suite à des engagements que les libéraux ont eux-mêmes pris durant la campagne électorale, notamment la création d’un régime national d’assurance médicaments universel, selon M. Singh.

Il soutient aussi que les libéraux ont raté une belle occasion de démontrer qu’ils étaient prêts à travailler avec son parti en écartant la proposition du NPD de limiter la baisse du fardeau fiscal aux contribuables qui touchent un salaire annuel maximal de 90 000 $. En lieu et place, le ministre Morneau a annoncé que la diminution d’impôt serait progressivement réduite pour les personnes dont le revenu net est supérieur à 150 473 $. À terme, cette mesure privera le Trésor fédéral de 6 milliards de dollars en revenus en 2023.

Selon le NPD, le gouvernement Trudeau aurait pu utiliser une partie de cette somme, soit 1,6 milliard de dollars, afin de jeter les bases d’une assurance dentaire nationale qui aurait permis à 4,3 millions de Canadiens peu fortunés d’avoir accès à des soins dentaires.

« Cela aurait fait une grande différence dans la vie de ces gens. Mais le gouvernement de Justin Trudeau a refusé. C’est pourquoi il ne peut pas compter sur l’appui du NPD », a affirmé M. Singh.

Aux Communes, les libéraux ont besoin de l’appui de l’un des trois partis de l’opposition pour se maintenir au pouvoir. Aux dernières élections, le Parti libéral a obtenu 157 sièges, soit 13 de moins que la majorité requise de 170 sièges. Le Parti conservateur a remporté 121 sièges, le Bloc québécois, 32 sièges et le NPD, 24 sièges. Le Parti vert a pour sa part terminé la soirée électorale avec trois sièges, tandis qu’une députée indépendante, l’ancienne ministre de la Justice Jody Wilson-Raybould, a réussi à se faire élire.